Jeanne d’Arc et Charles VII : l’entrevue du signe (mars-avril 1429) (1966)
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Jeanne d’Arc et Charles VII L’entrevue du signe (mars-avril 1429)
S’il est un épisode de l’histoire de Jeanne d’Arc qui semble bien connu, c’est, incontestablement, celui du signe. La tradition historique s’accorde, en effet, à penser que Jeanne a donné un signe à Charles VII lors de sa première rencontre avec le roi, à Chinon, au début du mois de mars 1429. Tout au plus argumente-t-on sur tel ou tel aspect de ce signe. Prière mentale1 ou objet matériel2, voilà la seule question que l’on se pose encore.
En ce qui nous concerne, nous avons voulu reprendre le problème au ras des textes, sans nous laisser aveugler par un a priori philosophique ou religieux. Cette méthode, qui consiste à retourner au témoignage que Jeanne porte sur elle-même et à celui que nous transmettent ses contemporains les plus éclairés, nous a conduit à une vision différente de cet épisode du signe. C’est dans la perspective ainsi dégagée que s’inscrit, selon nous, son importance réelle.
Le moindre paradoxe de l’histoire de Jeanne d’Arc n’est certes pas la méfiance qui s’est attachée aux révélations de la jeune paysanne à propos du signe. De la part de ses juges, bien sûr, puisqu’ils la convaincront de mensonge et de blasphème3, mais aussi de la part de ses thuriféraires. La légende, si prompte à accueillir tout ce qui touche au merveilleux, n’a guère fait honneur, en effet, aux déclarations de Jeanne. Interrogée, à ce propos, dans la séance du 10 mars, Jeanne répond qu’il est bel et honouré et bien créable, et est bon, et le plus riche qui soit4
, et elle ajoute qu’il durera jusques à mil ans et oultre5
. De ce signe doté de pérennité dans sa matière comme dans sa signification, Jeanne nous dit encore qu’il se trouve dans le trésor royal6 et, enfin, qu’il s’agit d’une couronne7.
Cette identification du signe à l’un des symboles de la royauté, les juges du procès de Rouen l’avaient déjà constatée. Nous n’en voulons pour preuve que l’interrogatoire du 9 mai 14318 et l’article II de l’acte d’accusation9. D’autre part, la cédule10 et la déposition du F. Ladvenu11, dans les actes postérieurs du procès, abondent dans le même sens.
Le principal reproche que les historiens adressent aux déclarations de Jeanne est l’invraisemblance due, non pas à la situation décrite, mais à la présence d’un ange et à son comportement.
Selon Jeanne elle-même, l’ange serait venu la chercher dans son logis et l’aurait menée devant le roi12. Après avoir monté les degrés qui conduisaient à la chambre royale13, il aurait parcouru, toujours en marchant, l’espace qui le séparait du souverain14 avant de s’incliner devant lui15 et de remettre à l’archevêque de Reims la couronne destinée à Charles VII16. Une fois le signe donné, l’ange aurait pris congé et serait remonté vers le ciel, à la grande déception de Jeanne17.
Nous sommes tout disposé à reconnaître qu’une telle scène est difficilement croyable ; pourtant nous nous opposons, avec la dernière énergie, à ceux qui, à la suite de Quicherat18, se servent de cet argument pour enlever toute valeur historique à ce texte.
En réalité, les historiens n’ont fait que reproduire la version issue des travaux préparatoires au procès de réhabilitation. Cette phase initiale est marquée, en effet, par la rédaction de quatre mémoires théologiques : ceux de Thomas Basin19, Théodore de Leliis20 et Paul Pontanus21, d’abord ; la Recollectio de Jean Bréhal22, ensuite.
Toute l’explication savante que ces théologiens vont donner de la scène s’articule sur deux arguments. Ne pouvant convaincre Jeanne de mensonge, ils l’imaginent présentant aux juges de Rouen une allégorie destinée à cacher la vérité sous un voile étrange23
. Tous les éléments y ont une valeur symbolique, ainsi la couronne représente-t-elle la promesse donnée au roi de lui faire recouvrer son royaume24. Le second point de l’argumentation repose sur l’identification de Jeanne avec l’ange considéré comme envoyé de Dieu25. En cette circonstance, les docteurs n’ont pas fait œuvre originale : ils ont purement et simplement repris la déposition de F. Jean Toutmouillé dans les actes postérieurs du procès de condamnation26.
Cependant, Quicherat et ses successeurs ont avancé contre le témoignage de Jeanne d’autres raisons que celle qui a été invoquée ci-dessus. Ils ont prétendu, pour commencer, qu’elle avait tout révélé en une seule séance, comme si, pour échapper au zèle inquisitorial de ses juges, elle leur avait raconté n’importe quoi.
Cette affirmation est quelque peu outrancière car, s’il est vrai que la séance du 13 mars27 a été presque exclusivement consacrée aux révélations de Jeanne, celle-ci nous avait déjà fourni des renseignements nombreux et importants lors des interrogatoires des 1er et 10 mars28. Mieux encore, le 22 février, elle faisait déjà allusion à cette scène29. Ajoutons à cela que les juges de Rouen l’interrogèrent sur la couronne et sur l’ange bien avant qu’elle ne passât aux aveux30, ce qui laisse à penser qu’il y avait un bruit dans l’air
, une rumeur qui s’était propagée jusqu’en Normandie.
L’autre argument avancé pour mettre en doute ses déclarations porte sur le fait qu’elle aurait avoué ce qu’elle refusait de révéler par crainte du parjure31. D’Estivet, au cours du réquisitoire32, n’a pas manqué de lui reprocher son inconséquence, mais, à cette accusation, Jeanne a su trouver la parade, en même temps qu’une explication que nous ferons nôtre. Selon elle, ce sont les gens d’Église qui l’ont obligée à faire ces révélations33.
D’autre part, et quoi qu’on puisse en penser, Jeanne n’avait pas exclu toute possibilité de réponse. C’est dans ce sens, croyons-nous, qu’il faut interpréter ses déclarations du 27 février. Il semble bien qu’avec l’accord de ses saintes protectrices, Jeanne était disposée à passer outre à son serment34. D’autant plus qu’elle l’avait prononcé à la demande du roi pour éviter les indiscrétions35. Peut-être cette intervention royale explique-t-elle à long terme la nécessité d’une version officielle
avant la sentence de réhabilitation.
Certains ont encore objecté, avec quelque pertinence, que Jeanne était revenue sur ses déclarations et avait avoué son mensonge36
. Qu’il nous soit simplement permis de rappeler que la déposition de Ladvenu, qui, seule, y fait écho, est consignée dans les actes postérieurs du procès de condamnation, ceux-là mêmes que les notaires présents à Rouen ont refusé d’authentiquer. Dans ces conditions, la valeur probante du témoignage nous semble fort mince.
S’il est un élément qui plaide en faveur de Jeanne, c’est, à notre avis, la fermeté avec laquelle elle maintient ses déclarations, quelles que soient les circonstances. En pleine cause de relapse, alors qu’elle joue sa vie, à la question des juges qui lui demandent si elle a dit la vérité, à propos de la couronne, elle répond : De tout je vous en ay dit la vérité en procès, le mieulx que j’ay sceu37
.
Sa constance sur ce qui touche au signe transparaît dans les différentes phases du procès, et non pas seulement lors des interrogatoires. Ainsi en va-t-il pour celles où s’exprime l’accusation. L’article LI du réquisitoire, dû à d’Estivet, lui prêtait des paroles que, manifestement, elle n’avait jamais prononcées : un examen même rapide de ses réponses suffit à nous en convaincre38. Or, l’acte d’accusation, rédigé après le réquisitoire, témoigne d’une plus grande fidélité à ses déclarations39. Comment expliquer ce revirement, sinon par une opiniâtreté que l’on conçoit mal chez une fabulatrice ?
L’attitude intransigeante de Jeanne eut, d’ailleurs, une conséquence inattendue dans le chef de Raoul Le Sauvage, bachelier en théologie et, à ce titre, assesseur au procès de Rouen. En effet, sommé de donner son avis sur la teneur du deuxième article de la cédule, il répond : nescio ; forte fictivum est et mendacium adinventum40
. Prudence que nous aurions aimé rencontrer chez les historiens de Jeanne.
Le dernier grief formulé par ceux-ci, à l’encontre de ses révélations, est fondé sur l’absence de confirmation par d’autres sources que le procès de condamnation. À cet argument, nous objecterons tout d’abord que, seul parmi les personnes présentes à l’entrevue du signe, le duc, d’Alençon a déposé à la Réhabilitation et qu’il n’avait aucun intérêt à révéler quoi que ce soit, alors qu’une version officielle
avait été accréditée avant même le début de ce procès. Ajoutons que sa déposition se termine sur cette phrase ambiguë : Nec aliud scit, super hoc interrogatus41, et que, comme les autres témoins de ce procès, il n’a pas été interrogé à propos du signe.
D’autre part, nous avons relevé un texte assez peu connu et publié en 1885 par Léopold Delisle, sous le titre : addition au Breviarum Historiale42. Il s’agit d’une chronique due à un auteur inconnu, mais que l’on suppose être un clerc français de Rome, probablement de l’entourage du pape43.
Au terme d’une analyse fouillée, Léopold Delisle a conclu que l’auteur mettait la dernière main à son Breviarum Historiale avant que l’année 1428 fût complètement révolue44. Quant à l’article complémentaire, relatif à Jeanne d’Arc, il n’y a pas à se méprendre sur la date de composition : il a été rédigé aussitôt après qu’on apprit à Rome la nouvelle de la délivrance d’Orléans et avant qu’on y sût le sacre de Reims, c’est-à-dire pendant l’été 142945. Cette précision chronologique confère au témoignage une incontestable valeur, même si l’auteur n’est pas témoin direct et s’il travaille sur des informations, officielles ou non, qui lui parviennent de France, peut-être par le canal des courriers pontificaux.
Venons-en à l’extrait qui nous concerne. Après avoir énoncé les motifs qui l’ont poussé à reprendre la plume, l’auteur nous parle avec emphase de la levée du siège d’Orléans et des mérites de Jeanne. Ensuite, il décrit la vie simple et religieuse qu’elle mène ; puis il conclut en racontant une entrevue au cours de laquelle Charles VII aurait, à la demande de Jeanne, remis le royaume entre les mains de Dieu, avant de s’en voir réinvesti, symboliquement, par cette dernière46. Le second volet de cette cérémonie en forme de diptyque présente une indubitable analogie avec l’entrevue du signe. Le symbole de la couronne est, d’ailleurs, fort clair et Jeanne elle-même ne fait qu’en confirmer la signification lorsqu’elle déclare que la couronne signifioit qu’il tendroit le royaume de France47
.
Indépendamment du procès de condamnation, les éléments constitutifs de la scène trouvent un écho dans une autre source, la Réhabilitation. Relisons la déposition du duc d’Alençon. Lors de son premier séjour (mars 1429), Jeanne aurait présenté au roi plusieurs requêtes, lui demandant, notamment, de céder son royaume à Dieu, puis lui promettant de le replacer, après ce don, dans son état antérieur, c’est-à-dire de réinvestir le roi en son bien48. Ce scénario correspond parfaitement à la scène décrite par le Breviarum Historiale et aux déclarations de Jeanne, du moins en ce qui concerne la seconde partie. Dans ces conditions, il devient difficile de parler de témoignage isolé et, par le fait même, d’adhérer aux raisons invoquées par les historiens pour le réfuter.
Une fois engagée dans la voie des aveux, Jeanne ne nous fait grâce d’aucun détail. Nous savons par elle que tout s’est déroulé dans la chambre du roi, au château de Chinon, et elle poursuit : Du jour je ne sais ; et pour ce qui est de l’heure, il était haute heure49.
Partant de ces déclarations, beaucoup d’historiens y ont vu une réminiscence de sa première rencontre avec Charles VII. Mais ils ont mal lu, ou plutôt, n’ont pas lu suffisamment, car, un peu plus loin, Jeanne précise : et fuit hoc in mense aprilis vel marcii, et d’ajouter que cela se passait après Pâques (27 mars)50.
Une telle précision chronologique implique nécessairement un second séjour à Chinon après les enquêtes menées dans la ville de Poitiers. Pasquerel, qui devint plus tard le confesseur de Jeanne, ne dit pas autre chose51. Simon Beaucroix52, puis Ebehard de Windecke dans sa chronique53, le confirment implicitement en faisant de Chinon le point de départ de l’escorte vers Orléans, théâtre des opérations.
Aucun de ces témoins, cependant, ne donne une date précise54 ; c’est pourquoi les historiens, partant du principe que les enquêtes préalables ont duré six semaines et qu’elles se sont achevées à Poitiers, pensaient que Jeanne n’avait pu revenir à Chinon avant la mi-avril, soit à quelques jours de son départ pour Orléans.
En ce qui nous concerne, nous serions plutôt tenté de proposer pour le retour à Chinon la semaine du 27 mars au 3 avril. Le simple fait que cette période chevauche à la fois mars et avril suffirait à expliquer l’hésitation de Jeanne entre ces deux mois55, ce qui, convenons-en, est plus difficile à admettre dans l’hypothèse d’un retour vers la mi-avril. Mais ce n’est pas là notre seul argument.
Suivant Jeanne, en effet, l’entrevue du signe aurait coïncidé avec la fin des enquêtes56, ce qui nous fournit un repère chronologique des plus précieux, à condition, bien sûr, de connaître la durée de ces dernières. S’il est généralement admis que les docteurs et les clercs ont interrogé la Pucelle pendant trois semaines à Chinon et à Poitiers57, il apparaît que l’ensemble des examens n’a pas excédé un mois. C’est ce qui ressort des déclarations de Jeanne au procès de Rouen58, des dépositions de Dunois59 et de Gaucourt60 à la Réhabilitation et, enfin, d’une lettre écrite par le marchand génois Giustiniani à son père, en date du 9 juillet 142961. Si nous ajoutons la durée maximum d’un mois aux deux dates terminales (24 février-3 mars 1429) entre lesquelles s’inscrit l’arrivée de Jeanne à Chinon, la fin des interrogatoires devrait se situer entre le 27 mars et le 3 avril62.
À ce raisonnement certains objecteraient volontiers le texte des conclusions des docteurs de Poitiers, justifiant le départ de Jeanne pour Orléans et dans lequel une durée de six semaines serait appliquée à l’ensemble des enquêtes. Mais, là encore, une bonne lecture s’impose, car le document dit, textuellement, que le roi la faist garder avec luy, bien par l’espace de six semaines63
. Autrement dit, les quarante-deux jours couvrent la période allant de l’arrivée de Jeanne à Chinon jusqu’à la publication de cet avis, et non pas seulement la durée des enquêtes. Ajoutons encore que nous possédons une lettre de Charles VII, datée de Chinon le 5 avril 142964, ce qui implique son retour dans la ville, au plus tard, à cette date.
Lorsqu’on lit le procès de condamnation, on se rend compte que l’entrevue du signe a revêtu, aux yeux de Jeanne, une importance capitale. Selon son propre témoignage, cette entrevue a provoqué la fin des enquêtes en même temps qu’elle décidait le roi à la mettre à l’œuvre65. Malgré ses déclarations formelles, nous ne croyons pas que la relation de cause à effet joue dans le même sens que celui indiqué par Jeanne.
En effet, pour que la cérémonie de la couronne présente une quelconque signification, il fallait nécessairement que Jeanne apparût aux yeux du roi, sinon comme une envoyée de Dieu, du moins comme une bonne chrétienne, saine de corps et d’esprit. Or, une semblable disposition chez le souverain ne peut guère se concevoir qu’après les interrogatoires de Chinon et de Poitiers ; ce qui ne soulève, d’ailleurs, aucune difficulté du point de vue chronologique. L’erreur de Jeanne — si erreur il y a — s’explique très facilement. Avec le recul historique, nous accordons aux événements une autre valeur que celle qu’elle leur attribuait. D’autant plus qu’elle était obnubilée par le signe et que, dans sa logique d’inspirée, elle ne pouvait envisager d’autre explication pour la fin des interrogatoires.
Quant à la deuxième conséquence (la décision de mettre Jeanne à l’œuvre), elle mérite un examen approfondi et le recours à d’autres textes.
Suivant en cela les ordres qui leur avaient été donnés, les mandati ex parte regis qui l’interrogèrent, les uns pendant trois semaines, les autres pendant un mois, présentèrent au Conseil royal un rapport sur les examens qu’ils venaient d’entreprendre : et ista omnia retulerunt concilia regis66, déclare Seguin Seguin, un des membres de la Commission théologique qui l’interrogea à Poitiers. Et Jean d’Aulon, l’écuyer de Jeanne, se trouvait au Conseil quand iceulz maistres firent leur rapport de ce que avaient trouvé de la ditte Pucelle67
. Après ce compte-rendu, le Conseil se réunit et décide de mettre Jeanne à l’œuvre. Les dépositions de deux témoins oculaires, le duc d’Alençon68 et Jean d’Aulon69, l’établissent de manière indubitable. Dunois70, Seguin Seguin71 et Simon Charles72 soulignent eux aussi l’importance de ce Conseil qui, sur la foi du rapport dressé à la suite des enquêtes, prit la responsabilité d’envoyer Jeanne à Orléans.
Si les textes de la Réhabilitation sont concluants, le témoignage des chroniques d’Antonio Morosini73 et de Mathieu Thomassin74, antérieures à ce procès, ne l’est pas moins. Enfin nous possédons les conclusions écrites (on dirait aujourd’hui : le communiqué), où le Conseil justifie sa décision75. Ce texte insiste, lui aussi, sur l’importance du rapport fait par les examinateurs.
À la fois conséquence des enquêtes préalables et cause de la mise à l’œuvre de Jeanne, l’entrevue du signe doit-elle s’identifier à la réunion du Conseil dont parlent ces sources ? Nous ne le pensons pas pour différentes raisons.
Lorsque Jeanne nous a décrit la scène, elle a cité quelques témoins : l’archevêque de Reims et d’autres évêques dont elle ne connaît pas le nom, mais aussi Charles de Bourbon, le sire de La Trémoille, le duc d’Alençon et quelques chevaliers ou capitaines76. Parmi ces derniers, les juges de Rouen mentionnent Boussac et La Hire77. Malgré la qualité des personnes présentes, Jeanne n’a jamais déclaré qu’il s’agissait du Conseil. Objecter à cela son ignorance des institutions serait assez mal venu, car elle a vécu dans l’entourage du roi et a été interrogée à plusieurs reprises par ce même Conseil. Ensuite, ni le duc, d’Alençon ni Jean d’Aulon, qui ont assisté aux délibérations du Conseil, n’y signalent la présence de Jeanne.
D’autre part, Jeanne elle-même, au procès de Rouen, n’a pas fait allusion à un quelconque rapport de ses examinateurs, alors que cet élément joue un rôle primordial dans la décision prise par le roi et ses conseillers.
Enfin, et surtout, la confusion de l’entrevue du signe avec la réunion du Conseil est insoutenable pour une raison de chronologie. En effet, si la première a eu lieu entre le 28 mars et le 3 avril, l’autre ne s’est tenue que six semaines au moins après l’arrivée de Jeanne, soit : dans la semaine du 10 au 17 avril et, plus probablement, aux environs de cette dernière date.
À ces arguments d’ordre général, nous pouvons ajouter un texte extrait de l’acte d’accusation du procès de Rouen. Il s’agit de l’article II qui énonce ainsi les conséquences du signe : per quod determinatus fuit (rex) ad credendum ei de suis revelationibus et ad eam recipiendum, pro bellis agendis78.
Si nous connaissons déjà la première conséquence, en revanche la réception
qui aurait décidé la mise en œuvre de Jeanne, apparaît pour la première fois. Les mêmes effets provenant d’une cause identique, il nous semble raisonnable d’assimiler cette réception
à la réunion du Conseil qui s’est tenue vers la mi-avril. Cette identification est d’autant plus fondée, qu’elle se retrouve dans certains témoignages de la Réhabilitation. Ainsi Garivel79, Dunois80, Ricarville81 et Reginald Thierry82 parlent-ils, eux aussi, d’une réception
provoquée par le rapport favorable des examinateurs et décidant la mise à l’œuvre de Jeanne.
Puisque l’entrevue du signe doit être nettement distinguée de la réunion du Conseil qui habilita Jeanne, nous pouvons nous demander quelle fut sa raison d’être en dehors de toute signification religieuse ou symbolique.
Il est incontestable qu’en satisfaisant une requête qu’elle lui avait adressée peu après son arrivée à Chinon83, le roi manifestait clairement sa confiance à l’égard de Jeanne. Mais dans quel dessein ? Ici nous en sommes réduits aux hypothèses. Ou bien cette entrevue était destinée aux membres de son Conseil encore opposés à Jeanne, ou bien elle avait pour but de rassurer la jeune Lorraine sur ses intentions ultérieures.
Les preuves, sinon d’une opposition, du moins d’une méfiance à l’endroit de Jeanne, ne manquent pas. Elle-même n’en était pas dupe lorsqu’elle avoue, le 3 mars, à ses juges : Je ne sais s’ils me croient et je m’en rapporte à leur âme84.
Dans une lettre datée du 10 mai 1429, Pancrace Giustiniani écrit qu’on en faisait les plus belles mocqueries du monde, surtout d’une Pucelle gardeuse de moutons85
. Mais c’est le pape Pie II qui, dans ses Mémoires, a le mieux décrit les tendances divisant le Conseil : pour certains, Jeanne n’était qu’une créature du diable ; pour d’autres, elle était inspirée par l’Esprit-Saint86
. Dans le même ordre d’idées, il ne faut pas être grand clerc pour s’apercevoir que l’avis adopté par le Conseil se présente comme un texte de compromis. Les divergences restaient donc très vives87.
Mathieu Thomassin88, le doyen de Saint-Thibault de Metz89 et l’auteur de la Chronique des Cordeliers90, ont raconté, eux aussi, l’ambiance de scepticisme, voire de dérision, qui entourait Jeanne. Monstrelet a donné une explication très pertinente de ce phénomène : car, à si grans prinches et aultres nobles hommes, telles ou pareilles paroles sont moult doubtables et périlleuses à croire, tant pour l’yre de Nostre-Seigneur princhipalement, comme pour le blasphème qu’on en pourroit avoir des parlers du monde91
.
Quant à la seconde hypothèse, à savoir la volonté du roi de rassurer Jeanne d’Arc sur ses intentions, elle est tout aussi probable, mais, comme il arrive souvent dans l’histoire de Jeanne d’Arc, l’absence de documents nous empêche de conclure.
De toute façon, cette motivation politique nous semble relativement plus importante que toute intention symbolique ou religieuse. Et cela, contrairement à la conviction de la voyante. Nous en voulons pour preuve le fait que, pour tout le monde (le roi, les théologiens et les conseillers clercs ou laïcs), c’est à Orléans qu’elle devait fournir le signe divin. Gaucourt92, Garivel93 et Seguin Seguin94 l’ont rappelé au procès de réhabilitation, mais c’est dans l’avis donné par le Conseil qu’on en retrouve la formulation la plus explicite : Le roy, attendu la probacion faicte de ladicte Pucelle, en tant que luy est possible, et nul mal ne trouve en elle, et considéré sa réponse, qui est de demonstrer signe divin devant Orléans ; veue sa constance et sa persévérance en son propos, et ses requestes instantes d’aller à Orléans pour y monstrer le signe de divin secours, ne la doit point empescher d’aller à Orléans95.
L’entrevue du signe, telle que nous l’avons décrite, bouleverse non seulement les conceptions traditionnelles des historiens, mais encore la vision de l’histoire à laquelle ils nous avaient habitués. Nous sommes très loin, en effet, de ce signe mystérieux donné par Jeanne à Charles VII lors de leur première rencontre et que démentent formellement les déclarations de la jeune Lorraine au procès de condamnation. Et, de fait, c’est en nous inspirant de ses révélations que nous avons pu reconstituer ce que fut la vraie, mais aussi l’unique entrevue du signe.
De quoi s’agit-il ? Au retour de Poitiers où se sont terminées les enquêtes auxquelles Jeanne avait dû se soumettre, le roi la reçoit dans son château de Chinon à une date que nous avons pu fixer entre le 27 mars et le 3 avril 1429, soit un mois après sa première rencontre avec le souverain. Charles VII est assisté des principales personnalités laïques et ecclésiastiques de son entourage lorsque Jeanne, selon toute probabilité, agissant comme envoyée de Dieu, remet une couronne à l’archevêque de Reims qui en investit aussitôt le roi. Cette couronne symbolise le royaume de France dont Charles VII se montre ainsi le titulaire de droit divin. Elle est signe dans la mesure où elle constitue une anticipation96 : en l’occurrence, une anticipation du sacre de Reims.
À côté de son indéniable valeur symbolique et religieuse, cette entrevue présente, à notre avis, une double signification politique. En accédant à une requête qu’elle avait formulée dès leurs premières rencontres à Chinon, le roi la rassurait à la fois sur le résultat des enquêtes et sur ses intentions ultérieures en même temps qu’il lui accordait sa confiance en un moment où les oppositions restaient vives à l’égard de la jeune paysanne. Ainsi, sur la foi des enquêtes, elle était habilitée officieusement à accomplir sa mission.
C’est en cela que l’entrevue du signe revêt toute son importance : le simple fait qu’elle ait eu lieu prouve que Jeanne, à ce moment (et à ce moment-là seulement), venait d’obtenir la confiance du roi et des grands du royaume. Plus rien, dès lors, ne s’opposait à l’accomplissement de sa mission.
Claude Desama.
Notes
- [1] D’après la chronique de Pierre Sala (J. Quicherat, Procès, t. IV, p. 278, 1849).
- [2] La couronne dont nous allons parler tout au long de cet article.
- [3] P. Champion, Procès de condamnation, t. I, pp. 272-273, Paris, 1920 : article II des douze articles de l’acte d’accusation.
- [4] P. Champion, op. cit., t. I, p. 92 (séance du 10 mars) :
Interrogata utrum sit aurum, argentum, lapis preciosus vel corona. Respondit : Ego non dicam vobis aliud, nec homo sciret describere rem adeo divitem sicut est signum.
- [5] P. Champion, op. cit., t. I, p. 93 (séance du 10 mars).
- [6] P. Champion, op. cit., t. I, p. 93 (séance du 10 mars) :
Item dicit quod dictum signum est in thesauro regis sui.
- [7] P. Champion, op. cit., t. I, p. 115-116 (séance du 13 mars) :
Interrogata quale signum habuit rex ejus et qui cum eo erant, est ipsamet ad credendum quod esset unus angelus hanc coronam apportaverat, respondit quod rex suus hoc credidit per instructionem seu documentum virorum ecclesiasticorum qui erant illuc et per signum corone.
P. Champion, op. cit., t. I, p. 109 (séance du 13 mars) :Item dicit quod illud signum fuit quod angelus certificabat hoc regi suo, sibi apportando coronam et ei dicendo quod ipse haberet totum regnum.
- [8] P. Champion, op. cit., t. I, p. 327 :
Item interrogata de signo corone quam dicit fuisse traditam archiepiscopo Remensi.
- [9] P. Champion, op. cit., t. I, p. 272 :
Et alia vice (dixit) quod, prout credit, unus archiepiscopus recepit illud signum coronæ.
- [10] P. Champion, op. cit., t. I, p. 353. L’accusateur s’adresse à Jeanne :
Alia vice, dixisti quod ipsa corona, quam signum appellas, fuit tradita archiepiscopo Remensi.
- [11] P. Champion, op. cit., t. I, p. 397. Cette déposition est faite le 7 juin 1431. Ladvenu déclare que Jeanne lui a avoué son mensonge :
De dicta corona aut signo dato illi quem dixit regem suum.
- [12] P. Champion, op. cit., t. I, p. 112-113 (séance du 13 mars) :
Eram ego (Johanna) in hospicio meo, in domo unius bone mulieris prope castrum de Chinon, quando ipse angelus venit ; et postea ipse et ego simul ivimus ad regem.
- [13] P. Champion, op. cit., t. I, p. 112 (séance du 13 mars) :
Item dicit (Johanna) quod, quando idem angelus venit, ipsa associavit eum et ivit cum eo per gradus ad cameram regis sui ; et intravit primo angelus.
- [14] P. Champion, op. cit., t. I, p. 112 (séance du 13 mars) :
Et deposit hostium, ipse angelus gradiebatur et ibat super terram, veniendo ad dictum regem suum.
- [15] P. Champion, op. cit., t. I, p. 112 (séance du 13 mars) :
Quando idem angelus venit coram suo rege, fecit eidem reverendam, inclinando se coram eo.
- [16] P. Champion, op. cit., t. I, p. 110 (séance du 13 mars) :
(Johanna) respondit quod predicta corona fuit tradita uni archiepiscopo, videlicet archiepiscopo Remensi, prout videtur, in presencia regis sui ; et dictus archiepiscopus eam (coronam) recepit et tradidit eidem regi suo ; et ipsamet Johanna erat presens.
- [17] P. Champion, op. cit., t. I, p. 112 (séance du 13 mars) :
Respondit quod (angelus) ab ea recessit in quadam parva capella ; et fuit bene irata de recessu eius ; ipsa quoque, flebat et libenter ivisset cum eo, hoc, est quod anima sua ivisset cum eo.
- [18] J. Quicherat, Aperçus nouveaux sur l’histoire de Jeanne d’Arc, p. 64, Paris, 1850.
- [19] Ayroles, La vraie Jeanne d’Arc, t. I, pp. 313-319, Paris, 1890.
- [20] Ayroles, op. cit., t. I, pp. 261-270, Paris, 1890.
- [21] Ayroles, op. cit., t. I, pp. 241-260, Paris, 1890.
- [22] Révérends Pères Marie-Joseph Belon et François Balme, Jean Bréhal, grand inquisiteur de France et la réhabilitation de Jeanne d’Arc, livre IV, Paris, 1893.
- [23] Ayroles, op. cit., t. I, pp. 346 : Mémoire de Basin. Belon-Balme, op. cit. (Recollectio), p. 80*.
- [24] Ayroles, op. cit., t. I, pp. 346 : Mémoire de Basin ; p. 266 : Mémoire de Leliis ; p. 246 : Mémoire de Pontanus. Belon-Balme, op. cit. (Recollectio), p. 82* :
De signo vero illo seu corona, de qua sic moleste ipsa impeditur, ex ejusdem dictis aperti satis colligitur, quod nichil aliud per hoc intelligabat nisi futuram domini regis coronacionem, quam fiducialiter illi predicebat atque promittebat.
- [25]Ayroles, op. cit., t. I, pp. 346 : Mémoire de Basin ; p. 266 : Mémoire de Leliis ; p. 246 : Mémoire de Pontanus. Belon-Balme, op. cit. (Recollectio), p. 82* :
Dicamus ergo quod ipsamet angelus fuit, sicut eciam et quodam loco se declaret.
- [26] P. Champion, op. cit., t. I, p. 398 :
Ipsa (Johanna) dixerat et confessa fuerat quod, de corona, non erat nisi fictio quaedam, et quod ipsamet erat angelus.
- [27] P. Champion, op. cit., t. I, p. 109-116 (séance du 13 mars).
- [28] P. Champion, op. cit., t. I, p. 68 (séance du 1er mars) ; pp. 94-95 (séance du 10 mars).
- [29] P. Champion, op. cit., t. I, p. 41 (séance du 22 février) :
Interrogata utrum videritne aliquem angelum supra ipsum regem suum ; respondit : parcatis michi, transeatis ultra. Dixit tamen quod antequam rex suus poneret eam in opus, ipse militas habuit appariciones et revelaciones pulchras.
- [30] À propos de l’ange : P. Champion, op. cit., t. I, p. 56 (séance du 27 février) ; pp. 94-95 (séance du 10 mars) ; p. 98 (séance du 12 mars). À propos de la couronne : P. Champion, op. cit., t. I, p. 68 (séance du 1er mars) ; pp. 94-95 (séance du 10 mars).
- [31] P. Champion, op. cit., t. I, p. 68 (séance du 1er mars) :
Ego promisi in tali loco quod non possim vobis dicere sine parjurio.
- [32] P. Champion, op. cit., t. I, p. 252 : Réquisitoire, article LX.
- [33] P. Champion, op. cit., t. I, p. 252.
- [34] P. Champion, op. cit., t. I, p. 252 :
Sed, de hoc quod tangit revelationes tangentes regem Franciae, ipsa non dicet sine licentia voris suae.
Remarquons, en outre, que, le 21 février, à la question de savoir si ses voix lui avaient interdit de révéler quoi que ce soit, elle répond :Ego non sum consulta de hoc. Detis mini dilationem XV dierum, et ego de hoc vobis respondebo.
(P. Champion, op. cit., t. I, p. 46). - [35] P. Champion, op. cit., t. I, p. 64 :
Et ipsamet Johanna ad requestam sui ipsius regis ; hoc (la promesse de ne rien révéler) fuit, quia nimis multae gentes hoc petivissent ab ea, nisi illud praedictis Sanstis promisisset.
Cette promesse avait été faite dans une petite chapelle attenante à la chambre du roi et elle déclarait elle-même :Hoc fuit ostensum regi.
(P. Champion, op. cit., t. I, p. 68.) L’intervention royale est donc indubitable. - [36] P. Champion, op. cit., t. I, pp. 396, 397, 398, 400.
- [37] P. Champion, op. cit., t. I, p. 376 (séance du 28 mai).
- [38] P. Champion, op. cit., t. I, pp. 233-234.
- [39] P. Champion, op. cit., t. I, p. 272 : Acte d’accusation, art. II.
- [40] P. Champion, op. cit., t. I, p. 302.
- [41] P. Doncœur, Documents et recherches relatifs à Jeanne la Pucelle, t. V, p. 216, Paris, 1961.
- [42] L. Delisle, Un nouveau témoignage relatif à la mission de Jeanne d’Arc, dans Bibliothèque de l’École des Chartes, n° XLVI, pp. 649-668, Paris, 1885.
- [43] L. Delisle, op. cit., p. 652.
- [44] On lit, en effet, à l’antépénultième page :
Item Sigismondus imperator anno praesenti 1428.
(L. Delisle, op. cit., p. 657.) - [45] L. Delisle, op. cit., p. 652.
- [46] L. Delisle, op. cit., p. 665 (addition au Breviarum Historiale) :
Quid plura ? Dicta puella a Francorum rege unum donum sibi dari. Quod rex admiratus, post tractus temporis, illi dedit et ipsa acceptavit, voluitque sibi litteras per quattuor regis secretarios confici et recitari sollemniter. Quo facto, rex remansit aliquantulum admiratus. Et ipsa circumstantibus ait : en hic est pauperior miles sui regni ! Et post pusillum temporis tractum, coram dictis notariis, tamquam donataria regni Francie, illud remisit Deo omnipotente. Post autem alium temporis tractum, Dei jussu, ipsum regem Karolum de regno Francie investivit, et de omnibus voluit litteras sollemniter confici.
- [47] P. Champion, op. cit., t. I, p. III (séance du 13 mars). À propos de la couronne circulait une légende, reprise par le marquis de Montferrat dans une lettre datée du 9 juillet 1429 (soit huit jours avant le sacre), suivant laquelle Jeanne aurait réclamé, pour en ceindre le roi, la couronne de Saint Louis que détenait le chancelier, c’est-à-dire l’archevêque de Reims, Regnault de Chartres (G. Lefèvre-Pontalis, Chronique d’Antonio Morosini (1366-1433), Extraits relatifs à l’Histoire de France, t. III, p. 161, Paris, Société de l’Histoire de France, 1892-1902). Ne doit-on pas voir dans ce récit, d’allure quelque peu fabuleuse, comme un écho de l’entrevue du signe, semblable, quoique moins circonstancié, et moins sûr, à l’extrait du Breviarum Historiale ?
- [48] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 211 :
Ipsa tunc Johanna regi fecit plures requestas et inter alias quod donaret regnum suum Regi coelorurn, et quod rex, post hujusmodi donacionem sibi faceret prout fecerat suis predecessoribus, et eum reponeret in pristinum statum ; et multa alia de quibus ipse loquens non recolit.
- [49] P. Champion, op. cit., t. I, pp. 110-111 :
Hoc (cette cérémonie) fuit in camera regis sui, in Castro de Chinon. […] de die nichil scit ; et quantum est de hora, erat hora alta ; aliter non habet memoriam de hora.
- [50] P. Champion, op. cit., t. I, p. 111 :
Et fuit hoc in merise aprilis vel marcii, prout ei videtur. Dixitque : in proximo mense aprilis aut in praesenti mense mardi essent duo anni elapsi ; et quod hoc fuit post Pascha.
- [51] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 217 :
Et hoc facto (les examens de Poitiers) fuit reducta ad villam de Chinon.
- [52] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 203 :
Et de villa de Chinon, ipsa Johanna venit in societate domini Johannis d’Olon ad villam blesensem.
- [53] Germain Lefèvre-Pontalis, Les sources allemandes de l’histoire de Jeanne d’Arc, Ebehard de Windecke, p. 165, Paris, 1903 :
La Pucelle partit de Chinon d’auprès du roi et tira vers Orléans, le 21e jour d’avril, et alla à Blois.
- [54] L’itinéraire de Jeanne, dressé par Quicherat (Procès, t. V, pp. 378-382), ne nous est d’aucun secours, car ses faiblesses et ses insuffisances ne nous permettent pas d’en tenir compte.
- [55] P. Champion, op. cit., t. I, p. 111 (séance du 13 mars) :
Et fuit hoc (l’entrevue du signe) in mense aprilis vel marcii.
- [56] P. Champion, op. cit., t. I, p. 94 (séance du 10 mars) :
Dicit ultra quod clerici cessaverunt arguere eam, quando habuerunt signum predictum
; p. 95 (séance du 10 mars) ; p. 113 (séance du 13 mars) ; p. 114 (séance du 13 mars). - [57] P. Champion, op. cit., t. I, p. 56 :
Item dixit (Johanna) quod per tres ebdomadas fuit interrogata per clerum, apud villam de Chinon et Pictavis.
P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 169 :Qui (les théologiens), pluribus et iteratis viribus, et quasi spacio trium septimanarum, examinaverunt dictam Johannam.
- [58] P. Champion, op. cit., t. I, p. 71 (séance du 3 mars) :
Interrogata an recordetur quod magistri qui examinaverunt eam in alia obedientia, aliqui per unum mensem, alii per tres hebdomadas, interrogaveruntne ipsam in mutatione sui habitus.
- [59] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 161 :
Transacto autem trium ebdomadarum aut unius mensis spacio, quo pendente tempore rex jusserat dictam Puellam examinari per clericos, prelatos et doctores theologiae.
- [60] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 167-168 :
Quia facta et dicta fuerunt examinata… spacio et tempore trium septimanarum et amplius tam Pictavis quam Caynone.
- [61] G. Lefèvre-Pontalis, Morosini, t. III, p. 99 :
C’est pourquoi il (le roi) a fait réunir beaucoup de sages hommes, et ils commencèrent à discuter avec elle et à l’éprouver de mille manières […] pendant l’espace d’un mois.
- [62] Ce sont les dates terminales que l’on peut induire des témoignages de Poulengy (P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 151) et de Jean de Metz (P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 138) au procès de réhabilitation, compte tenu qu’en 1429, le dimanche des Bures tombait le 13 février et la mi-carême le 6 mars, tandis que le voyage de Jeanne de Vaucouleurs à Chinon a duré onze jours.
- [63] J. Quicherat, Procès, t. III, p. 391, Paris, 1846.
- [64] Cette lettre est publiée par G. de Beaucourt, Histoire de Charles VII, t. III, pp. 515-517, Paris, 1872.
- [65] P. Champion, op. cit., t. I, p. 94 (séance du 10 mars) :
Ipsa (Johanna) regraciata fuit Deo de hoc quod liberavit eam a poena que sibi fiebat per clericos de illa parte qui arguebant contra ipsam
, et elle ajoute :Clerici cessaverunt arguere eam quando habuerunt signum predictum.
Cf. P. Champion, op. cit., t. I, p. 95 (séance du 10 mars) ; pp. 113-114 (séance du 13 mars). En ce qui concerne la mise à l’œuvre de Jeanne, P. Champion, op. cit., t. I, pp. 98, 109, 114. - [66] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 282.
- [67] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 298.
- [68] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 211 :
Scit tamen quod postmodum, in concilio regis, fuit relatum quod illi qui eam examinaverunt, dixerant quod in eadem nichil invenerat fidei catholica contrarium et quod, actenta necessitate, quod rex de eadem se juvare poterat.
- [69] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 298 :
Fut par ledit seigneur concluez en son conseil que d’illec en avant il s’aideroit d’elle ou fait de ses guerres, actendu que, pour ce faire, lui estoit envoyé.
- [70] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 161 :
Sed audita opinione dictarum prelatorum et doctorum, scilicet quod nichil erat mali in dicta Puella, misit eamdem […] ad villam de Bloys.
- [71] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 282 :
Et fuerunt opinionis quod, actenta necessitate eminente et periculo in quo erat villa Aurelianis, rex poterat de ea se juvare, et eam mictere Aurelianis.
- [72] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 225.
- [73] G. Lefèvre-Pontalis, Morosini, t. III, pp. 99-100 :
Ceux-ci voyant quelle était sa vie et principalement comme elle parlait et répondait aux questions qu’ils lui faisaient et disaient, ils conclurent que cette créature n’était autre que sainte […] et ils conseillèrent au dauphin de vouloir la croire de tout son cœur.
- [74] Quicherat, Procès, t. IV, p. 306 :
Vue et considérée la conclusion, mon dit seigneur le dauphin fit armer et monter ladicte Pucelle.
- [75] Quicherat, Procès, t. III, p. 391.
- [76] P. Champion, op. cit., t. I, p. 92 (séance du 10 mars) :
(Signum) fuerat ostensum coram notabilibus viris ecclesiasticis et aliis, archiepiscopis et episcopis, videlicet coram archiepiscopo Remensi et aliis quorum nescit nomina […] ubi erat Karolus de Borbonio, dominus de Tremoillia, dux Alenconii et plures alii milites.
- [77]6) P. Champion, op. cit., t. I, p. 322 (séance du 2 mai) :
Interrogata an, de signo tradito regi suo, ipsa velit se referre archiepiscopo Remensi, domino de Boussac, Karolo de Borbonio, domino de Tremoillia et Stephano dicto La Hyre.
- [78] P. Champion, op. cit., t. I, p. 272.
- [79] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 169 :
Tandem post longam examinacionem […] omnes deliberaverunt et concluserunt quod rex poterat licite eam recipere, et quod duceret societatem armatorum ante obsidionem aurelianensem, quia nichil invenerunt in ea nisi catholicum et omni ratione consonum.
- [80] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 161 :
Rex jusserat dictam Puellam examinari per clericos, prelatos et doctores theologie, super dictis et factis, ad sciendum si secure posset eam recipere.
- [81] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 170 :
Ipsa (Johanna) non fuit de levi recepta apud regem, quinimo voluit ipse rex quod primo examinaretur, et sciretur de sua vita et statu, et si deberet licite recepi.
- [82] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 170 :
De modo autem quem habuit rex in recipiendo eam, deponit sicut precedens (Garivel).
- [83] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 211 (déposition du duc d’Alençon).
- [84] P. Champion, op. cit., t. I, p. 76 (séance du 3 mars).
- [85] G. Lefèvre-Pontalis, Morosini, t. III, pp. 41-42. On trouve également une allusion à la méfiance qui entoure Jeanne dans une lettre du 4 juin 1429 :
Le dauphin, voyant dire toutes ces choses par la bouche d’une fillette, en fit railleries, croyant qu’elle était folle et possédée du démon, tant elle était effrontée.
(G. Lefèvre-Pontalis, op. cit., t. III, p. 99). - [86] J. Quicherat, Procès, t. IV, p. 510 :
Res aliquamdiu in concilio diversis sententiis agitata est alii captam daemonio illusam alii spiritu sancto plenam putabant.
- [87] J. Quicherat, Procès, t. III, p. 391.
- [88] J. Quicherat, Procès, t. IV, p. 305 :
Et de prime face, chacun disoit que c’estoit une trufferie, et à nulle chose que elle dist l’on ne adjouxtait point de foy.
- [89] J. Quicherat, Procès, t. IV, p. 326 :
Sy n’en faisoient les capitaines du roy qu’une dérision et mocquerie.
- [90] Ayroles, La vraie Jeanne d’Arc, t. III, p. 629, pièce justificative :
(Le dauphin) la (Jeanne) mist en très grand estat, dont la plus grant partie de ses gens furent moult esmerveillé, car ilz tenoient ycelle Jeannette à folle et à nyce.
- [91] J. Quicherat, Procès, t. IV, p. 362.
- [92] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 168 :
Tunc respondit quod signum (pro credendo dictis suis) quod ostenderet eis, esset de levacione obsidionis et succursu ville aurelianensis.
- [93] P. Doncœur, op. cit. , t. V, p. 169 :
Sed ipsa respondit illis (aux théologiens), quod signum sibi datum a Deo erat levare obsidionem aurelianensem.
- [94] P. Doncœur, op. cit., t. V, p. 281 :
En nom Dieu, je ne suis pas venue à Poitiers pour faire signes ; sed ducatis me Aurelianis ; ego ostendam vobis sigma ad quae ego sum missa.
- [95] J. Quicherat, Procès, t. IV, p. 391.
- [96] Jean-Jacques von Allmen, Vocabulaire biblique, p. 178, col. 2, Paris-Neufchâtel, 1904.
Sources
Article paru dans la Revue de l’histoire des religions, tome 170, n°1, juillet-septembre 1966, après avoir été présenté au séminaire d’Histoire moderne du professeur Léon-Ernest Halkin (1906-1998), à l’Université de Liège, Persée.