X. Hélary  : Jeanne d’Arc et la Mise en commende du royaume (2013)

Texte intégral

Jeanne d’Arc et la Mise en commende du royaume

5Je suis très reconnaissant à la Société Archéologique et Historique de l’Orléanais, à son président, M. Hervé Finous et aux membres du bureau, de m’avoir invité à parler devant eux le vendredi 16 novembre 2012 ; je remercie également Mme Colette Beaune, Mme Françoise Michaud-Fréjaville et M. l’abbé Jestin pour les précieuses remarques qu’ils ont bien voulu faire sur la version orale de ma communication.

Que dire de plus ? Un jour, la Pucelle a demandé au roi de lui faire un présent. Cette prière fut aussitôt agréée. Jeanne ne demanda rien de moins que le royaume de France. Le roi, étonné, fit le cadeau après un instant de réflexion. Jeanne l’accepta, s’en fit faire, par les quatre secrétaires du roi, une charte dont il fut donné une lecture solennelle. Le roi en était un peu ébahi, et Jeanne, en le montrant à l’assistance, tint ce propos : Voilà le plus pauvre chevalier de son royaume ! Presque en même temps, par-devant les mêmes notaires, elle livra au Dieu tout-puissant le royaume de France qu’elle venait de recevoir en don. Puis, au bout d’un instant, obéissant à un ordre de Dieu, elle investit le roi Charles du royaume de France ; et de tout cela elle fit dresser un acte solennel1.

Tel est l’étrange épisode que rapporte le dominicain Jean Dupuy, et dont on trouve l’écho chez plusieurs autres contemporains de Jeanne d’Arc. Longtemps, cette mise commende du royaume, comme on la désigne généralement, n’a pas retenu l’attention des historiens de Jeanne, même quand ils se situaient dans la mouvance catholique : on ne savait pas trop quoi en faire. Ce n’est que dans les dernières années que l’épisode a été véritablement pris en considération, sans qu’une étude spécifique ne lui ait jamais été consacrée2.

Mise en commende : l’expression peut surprendre. Elle renvoie à la pratique qui consiste, surtout à partir de la fin du Moyen Âge, à mettre à la tête d’une abbaye une personne qui n’y réside pas, mais qui porte néanmoins le titre d’abbé et qui touche les revenus afférents. On dit que cette abbaye est tenue in commenda, en garde ou en dépôt, les termes français de commende et de commendataire s’étant peu à peu imposés dans ce sens spécifique3. Régulièrement mis en cause, notamment au moment de la Réforme, le système de la commende n’en fonctionne pas moins jusqu’à la Révolution. C’est par analogie avec ce régime juridique particulier que les historiens ont parlé, à propos de l’épisode relaté par Jean Dupuy, de mise en commende du royaume.

À bien y réfléchir, pourtant, l’analogie ne paraît pas entièrement satisfaisante. Ne vaudrait-il pas mieux parler plus banalement d’investiture du royaume, ou de ré-investiture du royaume ? 6Car c’est bien de cela qu’il s’agit chez Jean Dupuy : Charles VII s’en étant dépouillé au profit de Jeanne, celle-ci remet le royaume de France à Dieu, avant de le rendre à Charles VII, sur l’ordre de Dieu.

Néanmoins, dans la déposition que donne, en 1456, dans le cadre du procès d’annulation de la condamnation, Bertrand de Poulengy, un des compagnons de Jeanne au départ de Vaucouleurs, on lit ceci :

Cette Jeanne disait en effet que le royaume n’appartenait pas au dauphin, mais à son Seigneur ; ce dernier cependant voulait que le dauphin devint roi et tint le royaume en commende ; elle ajoutait que, malgré ses ennemis, le dauphin deviendrait roi et qu’elle le conduirait pour le faire sacrer. Lequel Robert [de Baudricourt] lui ayant demandé quel était son Seigneur, elle répondit : Le roi du ciel4.

C’est dans cette déposition que les historiens ont pris l’expression mise en commende. Pourtant, tel qu’il est raconté, de façon nettement plus ramassée, par Bertrand de Poulengy, l’épisode n’est pas exactement semblable à celui qu’a consigné Jean Dupuy, même si les deux ont un fonds commun. Chez Jean Dupuy, l’investiture est définitive ; chez Poulengy, le roi n’est que le dépositaire, temporaire ou précaire, du royaume : il le tient, bel et bien, en commende, conformément au sens premier de ce terme, et sans la charge négative que celui-ci a prise au fil du temps. Dans les deux cas, une chose est sûre, sous-entendue chez Dupuy, explicite chez Poulengy : Dieu est le vrai roi de France.

L’épisode se trouve encore rapporté dans deux autres sources. Comme Poulengy, Jean, duc d’Alençon, est lui aussi interrogé en 1456, sur les événements qui se sont passé au temps de Jeanne. Vingt-sept ans plus tôt, en l’absence du duc d’Orléans, prisonnier en Angleterre depuis Azincourt, et du duc de Bourgogne, allié aux Anglais, il est le premier des princes du sang. Dès qu’il apprend qu’une jeune fille qui se déclare envoyée par Dieu est arrivée auprès du roi, il se rend à Chinon ; le lendemain, il trouve Jeanne qui s’entretient avec le roi ; Jeanne demande qui il est et lui souhaite la bienvenue. Le lendemain encore, Jeanne assiste à la messe du roi et s’incline devant lui ; le roi l’emmène alors dans une chambre adjacente avec Jean d’Alençon et Georges de La Trémoille, alors que tous les autres reçoivent l’ordre de se retirer :

Alors Jeanne adressa plusieurs requêtes au roi, et entre autres pour qu’il donnât son royaume au Roi des cieux ; après cette donation le Roi des Cieux agirait comme il l’avait fait pour ses prédécesseurs, et le remettrait en son état antérieur ; il y eut aussi beaucoup d’autres choses, que le témoin ne se rappelle pas, mais dont on parla jusqu’au repas5.

Le chroniqueur allemand Eberhard Windecke donne une version très proche de celle de Jean Dupuy :

D’abord, quand la Pucelle vint au susdit roi, il dut lui promettre de faire trois choses. La première, qu’il se démît de son royaume, y renonçât et le remît à Dieu, car il le tenait de lui. La seconde, qu’il pardonnât à tous ses sujets qui lui avaient oncques fait tort ou avaient pris parti contre lui. La troisième, qu’il s’humiliât si fort, que tous ceux qui viendraient à lui, pauvres et riches, et demanderaient grâce, il les prît en grâce, amis ou ennemis6.

La proximité de ces différents récits entre eux est patente. On y repère tout de même une différence de taille. Contrairement à la version donnée par Jean Dupuy, ni Alençon ni Windecke ne couronnent l’anecdote par le retour du royaume à Charles VII par le truchement de Jeanne — une divergence à garder en mémoire pour la suite de notre propos.

Le dernier témoignage qu’on peut solliciter est une lettre recueillie par Antonio Morosini, ce patricien vénitien qui copiait les nouvelles envoyées par les correspondants des grandes maisons de commerce de la Sérénissime. L’auteur de la lettre est Giovanni da Molino, qui écrit d’Avignon, le 30 juin 1429 :

La glorieuse demoiselle a promis au dauphin de lui donner, après la couronne de France, un autre don qui vaudra plus que le royaume de France, et ensuite lui a déclaré qu’elle lui donnerait la conquête de la Terre sainte et qu’elle serait de sa compagnie, comme l’on dit7.

Le texte, on le voit, est plus vague. Mais ne faut-il pas voir, dans l’affirmation que Jeanne donnera bientôt à Charles VII un autre don qui vaudra plus que le royaume de France, une allusion à l’épisode qui nous retient, et qui aura été raconté dans une lettre précédente que nous ne possédons plus ? Ce qu’il faut comprendre, semble-t-il, c’est qu’avant de donner à Charles la conquête de la 7Terre sainte, Jeanne lui a déjà donné le royaume de France — ce qui n’est pas rien ! Il est du coup permis de penser que Giovanni da Molino, lui aussi, a eu vent de l’épisode signalé par Jean Dupuy, Eberhard Windecke, Jean d’Alençon et Bertrand de Poulengy.

Par chance, ces différents témoignages peuvent tous être datés avec une relative précision. Chronologiquement, comme on va le voir, le premier est celui de Jean Dupuy. Viennent ensuite la lettre de Giovanni da Molino (30 juin 1429) et les dépositions de Jean d’Alençon et de Bertrand de Poulengy (1456).

La chronique d’Eberhard Windecke s’intercale entre Jean Dupuy et Giovanni da Molino, d’une part, et le procès en nullité de la condamnation, de l’autre, non seulement parce que Windecke est mort en 1440, mais aussi parce qu’il se fonde sur la traduction en allemand de pièces de propagande en provenance de la cour de France, reçues dans l’entourage de Sigismond de Luxembourg, alors roi des Romains et roi de Bohême, le futur empereur (1433). Même s’il n’écrit sa chronique qu’à la fin de la décennie 1430, Windecke compile des informations qui datent du printemps 14298.

L’ensemble des témoignages s’étale donc de la fin du printemps 1429 au début de l’année 1456. En 1429, en effet, Jean Dupuy est à Rome. Dominicain, d’abord inquisiteur et professeur de théologie à Toulouse, Dupuy sera évêque de Cahors de 1431 à sa mort en 1438. On conserve deux ouvrages de lui : un Traité du pouvoir du concile général et du souverain pontife, d’orientation plutôt pontificale (l’Église panse alors les plaies du Grand schisme) ; et un Recueil des histoires (Collectarium historiarum, appelé autrefois Breviarium historiale), qu’il achève, précisément au cours de son séjour à Rome, le 22 avril 1429 (c’est lui-même qui donne la date). Mais, dans les semaines qui suivent, raconte-t-il, il reçoit des renseignements sur ce qui vient de se passer en France. Frappé par l’intervention de Jeanne d’Arc, il décide de prolonger son travail en y incluant ce qu’il sait de celle-ci ; il reproduit notamment le traité de Jean Gerson (daté du 14 mai 1429) et défend avec vigueur la Pucelle contre les calomnies (il faut supposer par conséquent que ses ennemis avaient déjà entrepris le pape Martin V à son propos9). C’est au terme de ses réflexions sur Jeanne d’Arc qu’il insère le récit sur l’investiture du royaume par lequel nous avons commencé cette étude.

Le témoignage de Jean Dupuy a été mis au jour assez tardivement. Alors que, depuis la publication des cinq tomes réunis par Jules Quicherat, la très grande majorité des textes relatifs à Jeanne était aisément disponible, les additions de Jean Dupuy n’ont été publiées qu’en 1885, par Léopold Delisle — le Recueil lui-même ayant été imprimé en 1479, mais sans le passage relatif à Jeanne d’Arc. Il existe, de fait, plusieurs manuscrits du Recueil, dont deux seulement comportent le texte qui nous occupe : le manuscrit 3757 du Vatican, le seul que connaissait Delisle ; et, plus complets, les deux manuscrits de Madrid, étudiés par le Père Dondaine10.

Trois manuscrits seulement : il est délicat, par conséquent, de penser que Jean Dupuy soit la source de Giovanni da Molino, d’Eberhard Windecke, de Bertrand de Poulengy, et du duc d’Alençon, d’autant plus que Jean Dupuy, séjournant à Rome, n’était pas au cœur de l’entourage de Charles VII. Il tenait nécessairement ses informations d’une source quelconque. Quelle pouvait être cette source ? Il n’est pas très difficile de le dire. Des travaux récents, et au premier chef ceux de Deborah Fraioli, ont montré que le gouvernement de Charles VII a largement diffusé, à l’intention des bonnes villes qui reconnaissaient son autorité, sans doute aussi auprès des grands, et incontestablement auprès des cours étrangères, comme celle de Sigismond, des dossiers de propagande (le terme ne doit pas nous faire peur)11. Ces dossiers rassemblaient des textes divers : le portrait, au physique et au moral, de Jeanne ; quelques détails sur son enfance ; le récit de son arrivée à Chinon, avec l’épisode bien connu de la reconnaissance miraculeuse du roi, dissimulé au milieu de ses courtisans ; l’avis favorable délivré par les théologiens à l’issue de l’examen subi par Jeanne à Poitiers (mars 1429) ; les prophéties censées annoncer sa venue ; au fil du temps, le récit de ses victoires ; dans les versions postérieures au mois de mai, le traité de Jean Gerson, achevé le 14 mai. De ce dossier de propagande, le Greffier de La Rochelle, le manuscrit de Kaerrymell (BnF, fr. 979), et au total une 8vingtaine de manuscrits donnent une idée, sous une forme ou sous une autre, sans qu’on ne puisse jamais reconstituer dans sa totalité un ensemble de textes mouvant dans sa composition comme dans sa présentation. Une des lettres recueillies par Morosini signale que Charles VII écrivit au moins une lettre au pape Martin V : le dossier y était peut-être joint12.

L’addition de Jean Dupuy à son Recueil des histoires fait partie des textes qu’on peut croire à bon droit inspirés par une des versions successives de ce dossier de propagande. Le passage sur l’investiture du royaume est en effet précédé de développements qu’on retrouve ailleurs : Jeanne rappelle les femmes guerrières de l’Ancien Testament, Esther et Déborah, et celles des livres des Gentils, comme Penthésilée et les Amazones. Comme elles, Jeanne a mis en fuite ses ennemis, devant Orléans. Elle est âgée de 17 ans, elle supporte les fatigues mieux que les hommes les plus robustes, elle ne recherche aucun profit temporel, elle distribue l’argent qu’on lui donne ; ses réponses sont brèves et simples ; elle est très prudente au fait de sa mission (in facto sue legationis prudentissima) ; ses mœurs sont irréprochables ; elle est sobre, ni superstitieuse ni adonnée aux sortilèges, quoique les envieux l’en aient accusée. Elle se confesse tous les jours avant d’entendre la messe ; elle communie chaque semaine ; ses actions dépassent, il est vrai, les forces de son sexe ; mais elle combat pour une cause utile et juste, puisque c’est pour pacifier le royaume de France, ce qui entraînera le relèvement de la foi, qui, à en juger par l’expérience des siècles passés, n’aurait pas tant souffert si la France n’avait pas été entraînée dans un tourbillon de guerres désastreuses. Il faut donc nécessairement conclure que les succès de la Pucelle sont dus à la volonté divine et non pas à des sortilèges, comme le prétend la jalousie (Léopold Delisle).

Il en va de même pour Eberhard Windecke, qui s’approvisionne aux nouvelles reçues par Sigismond de Luxembourg, tout comme pour Giovanni da Molino, à Avignon, avide de renseignements sur ce qui se passe dans le royaume voisin. En revanche, Jean d’Alençon et Bertrand de Poulengy ont personnellement côtoyé Jeanne, et ils déclarent rapporter des choses vues ; c’est particulièrement vrai du duc d’Alençon, qui aurait assisté en personne à la scène qu’il décrit. Mais, tant Windecke qu’Alençon racontent l’épisode de façon moins spectaculaire que Jean Dupuy : il s’agit simplement de la remise par Charles VII de son royaume à Dieu et sa restitution implicite ; le rôle d’intermédiaire joué par Jeanne dans l’opération a disparu, avec toute la mise en scène solennelle développée par Jean Dupuy (les notaires, les actes qui auraient été dressés, la dimension publique).

Le texte de Jean Dupuy est le plus détaillé ; c’est aussi, chronologiquement, le premier ; et c’est enfin le plus déroutant. C’est bien à lui qu’il faut revenir. Jeanne demande au roi de lui faire un cadeau, sans lui en préciser par avance la nature ; le roi accepte ; Jeanne lui demande alors le royaume de France ; en hésitant un peu, Charles accepte ; Jeanne fait alors dresser un acte en bonne et due forme, qui est lu publiquement. Voilà le plus pauvre chevalier de son royaume ! proclame alors Jeanne devant les présents. Jeanne fait alors dresser un autre acte, par lequel cette fois elle remet le royaume à Dieu, puis, aussitôt après, obéissant à un ordre de Dieu, elle en investit Charles ; cette dernière étape est marquée par l’établissement d’un troisième acte par les secrétaires du roi.

Plusieurs points méritent d’être commentés. Le point le plus frappant est l’ambiguïté globale qui se dégage de cette scène. Est-on dans l’allégorie ou dans le récit véridique ? Il est difficile de le dire. Pour nous, bien sûr, l’affaire est entendue : il s’agit d’une historiette merveilleuse, une sorte d’exemplum destiné à démontrer la légitimité divine de Charles VII par le truchement de Jeanne d’Arc — en faisant donc d’une pierre deux coups, puisque tant le roi que la Pucelle se trouvent ainsi mis en valeur13. Mais qu’en était-il pour les hommes et les femmes de 1429, auxquels était destinée l’anecdote ? Après tout, cette scène se donne jusqu’à un certain point apparences de la vérité. Certes, elle n’est pas précisément datée : quoi de plus vague qu’un jour ? D’autre part, l’épisode clôt l’addition que consacre Jean Dupuy à Jeanne d’Arc, comme si l’auteur n’avait pas su quoi en faire, comme s’il n’avait pas su l’insérer dans le portrait qu’il dresse de la Pucelle. Mais, pour le reste, la mention des quatre secrétaires du roi, l’établissement de trois actes officiels dont lecture solennelle est faite et qui matérialisent trois opérations juridiques à la fois distinctes et complémentaires, la présence d’un public : tout concourt à donner une impression de véridicité. Mais n’est-ce pas aussi l’apparence que se donnent les exempla des prédicateurs ? Force est de constater, par conséquent, que l’ambiguïté de la scène ne joue pas nécessairement contre son éventuel succès auprès du public. En un sens, que l’épisode ait été perçu comme vrai ou faux, sa signification profonde et, au-delà, son efficacité, ne varient guère.

Que signifie d’ailleurs, au juste, cette investiture compliquée ?

9Sans doute, faut-il commencer par noter que Charles VII y est le roi, et non pas le dauphin, comme Jeanne d’Arc, semble-t-il, l’appelait jusqu’à son sacre : peut-être faut-il y voir un indice ténu de l’origine de l’épisode, venu non pas directement de Jeanne, mais passé par la médiation des conseillers du roi ; signalons au passage que Bertrand de Poulengy, quant à lui, évoque bien le dauphin, et non le roi — sans doute est-il plus proche sur ce point de l’esprit de Jeanne.

S’il faut faire cette remarque, c’est que la clé de que l’interprétation de l’épisode se joue tout autant dans le dépouillement volontaire de Charles VII que dans son investiture finale : c’est parce qu’il est déjà roi que l’abaissement auquel il consent est aussi spectaculaire. Les exemples historiques d’abdications volontaires sont assez peu nombreux pour le Moyen Âge14. En dehors de quelques princes se retirant dans un monastère (un duc de Bourgogne, un duc de Brabant) ou songeant à le faire (saint Louis et les ordres mendiants), on ne connaît guère que des destitutions plus ou moins violentes, comme celles qui frappent Louis le Pieux ou les rois d’Angleterre Édouard II (1327) et Richard II (1399). Sans doute y en a-t-il d’autres, mais un seul exemple pourrait se révéler pertinent : en 1285, Pierre III d’Aragon aurait renoncé à ses titres de roi d’Aragon et de comte de Barcelone pour ne plus se faire appeler que chevalier d’Aragon ; en transférant ses titres à son fils, il s’agissait pour lui d’éviter la déposition qu’avait prononcée à son encontre le pape Martin IV (1281-1285), à la suite de l’aide apportée par le roi d’Aragon aux Siciliens qui s’étaient révoltés contre Charles d’Anjou (Vêpres siciliennes, mars 1282)15.

Si les exemples proprement historiques semblent donc très rares, les récits hagiographiques comptent en revanche plusieurs cas qui peuvent avoir inspiré la scène racontée par Jean Dupuy. Avant son baptême, Clovis avait été sommé par saint Rémi de se dépouiller de ses ornements barbares16 ; dernier fils du roi des Francs Clodomir, le prince mérovingien Clodoaldus (Cloud), ayant échappé à la mort violente qui avait frappé ses deux frères, fut abrité dans un monastère ; devenu adulte, il se coupa lui-même les cheveux, ce qui signifiait qu’il renonçait à toute prétention à la succession de son père17. Sans doute trouverait-on encore d’autres exemples similaires, qui faisaient du renoncement à la royauté une scène présente à l’esprit des hommes du XVe siècle. Après tout, avant que l’irruption de Jeanne d’Arc ne change tout, Charles VII lui-même aurait songé à abandonner la partie pour se réfugier en Dauphiné, principauté d’Empire alors théoriquement distincte du royaume de France18.

Mais la source d’inspiration la plus probante n’est-elle pas à chercher plus loin encore ? Dans l’épître aux Éphésiens, opposant les fidèles du Christ aux païens, saint Paul disait :

Mais vous, ce n’est pas ainsi que vous avez appris le Christ, si du moins vous l’avez reçu dans une prédication et un enseignement conformes à la vérité qui est en Jésus, à savoir qu’il vous faut abandonner votre premier genre de vie et dépouiller le vieil homme qui va se corrompant au fil des convoitises décevantes, pour vous renouveler par une transformation spirituelle de votre jugement, et revêtir l’Homme Nouveau, qui a été créé selon Dieu, dans la justice et la sainteté de la vérité19.

En abandonnant la royauté, Charles VII rejetait sa vie passée pour devenir l’Homme Nouveau. Avec quoi devait-il rompre ? Des mœurs dissolues ? Le discrédit jeté sur sa personne par le traité de Troyes — même si les conditions de sa naissance ne paraissent pas avoir été mises en doute, comme une longue tradition historiographique l’a laissé entendre ? Les deux à la fois, d’autres choses encore ? Il est impossible de le dire. Une chose est sûre : ce dont il s’agit ici, c’est de restaurer de manière spectaculaire la légitimité de Charles VII, sur un plan personnel comme sur un plan institutionnel.

En cela, la scène rapportée par Jean Dupuy n’a rien de bien étonnant. La guerre de Cent Ans est dans son principe une querelle dynastique, qui se greffe sur des enjeux nationaux. Les revendications 10d’Édouard III se fondent d’abord sur la proximité du sang. Le roi d’Angleterre, neveu des trois fils de Philippe le Bel et petit-fils de ce dernier, se dit plus proche d’eux que ne l’est Philippe de Valois, leur cousin germain. Henri V, vainqueur à Azincourt (1415) et conquérant de la Normandie (1417-1419), se sent suffisamment fort pour substituer un autre fondement à celui que défendait son arrière-grand-père : en 1420, en effet, le traité de Troyes prévoit son mariage avec Catherine, une des filles de Charles VI, et sa reconnaissance comme héritier légitime de ce dernier, devenu son beau-père. Privé de ses droits en raison de sa désobéissance, le dauphin Charles est écarté du trône. En 1422, la mort coup sur coup de Henri V (31 août) et de Charles VI (21 octobre) place sur la tête du tout jeune Henri VI les couronnes de son père et de son grand-père, tandis que le dauphin Charles, qui se disait jusqu’ici régent du royaume, se proclame roi de France. Les deux légitimités peuvent se défendre : la validité du traité de Troyes, dont la conclusion a été l’œuvre du duc de Bourgogne Philippe le Bon, a été reconnue par les principales institutions du royaume ; les habitants de Paris, de l’Île-de-France, de la Normandie, et d’une grande partie des régions du royaume situées au nord de la Loire, n’en contestent pas le principe20. Sur la Loire, et au sud du fleuve, en revanche, on tient pour Charles VII, seul fils survivant de Charles VI ; le juriste Jean de Terrevermeille met son talent au service de ses convictions et promeut l’idée que le roi ne peut pas disposer lui-même de la couronne, qui passe nécessairement à l’aîné de ses fils, ou à son plus proche parent mâle21.

Replacée dans ce contexte, la scène du dépouillement et de l’investiture de Charles VII prend tout son sens. Il s’est agi, pour ceux qui, parmi les conseillers du roi, en ont diffusé le récit, d’entourer la légitimité de celui-ci d’une aura merveilleuse. Pour bien prendre la mesure de ce texte, sans doute ne faut-il pas oublier qu’il était inséré au milieu d’un dossier de propagande qui en comprenait beaucoup d’autres, de natures très diverses, puisqu’on y trouvait, comme on l’a dit plus haut, une description de Jeanne, l’avis des théologiens de Poitiers, des prophéties. En d’autres termes, le texte qui nous occupe ne doit pas seulement être pris isolément, mais replacé dans un propos général qui, en adoptant différents points de vue, visait à défendre à la fois la légitimité du roi et celle de Jeanne d’Arc.

Mais, même si ce n’était qu’un élément parmi d’autres à l’appui de la légitimité de Charles VII, n’allait-on pas déjà trop loin ? Il peut paraître en effet pour le moins curieux, et même dangereux, qu’un tel rôle ait été confié à Jeanne d’Arc. Dans le récit de Jean Dupuy, celle-ci se retrouve brièvement investie du royaume, avant de le remettre à Dieu puis d’en réinvestir Charles VII. C’est conférer à une toute jeune fille un rôle inouï, même si on admet que les contemporains n’y voyaient qu’une allégorie (et rien n’est moins sûr, comment savoir ?). Appuyer la légitimité de Charles VII sur un socle aussi fragile, n’est-ce pas l’affaiblir ?

Sans doute, à moins de considérer plus attentivement le contexte précis dans lequel ce texte s’inscrit, et particulièrement la date à laquelle notre récit a pu être mis en circulation. Jean Dupuy copie le texte du traité de Jean Gerson, achevé le 14 mai 1429, et il est au courant de la levée du siège d’Orléans (8 mai), mais il ne mentionne ni la victoire de Patay (18 juin) ni le sacre de Reims (17 juillet) : étant donné le temps nécessaire pour que les nouvelles arrivent à Rome, on peut donc penser qu’il écrit en juin ou en juillet 1429. Cela ne nous dit rien de positif sur la date de la composition du récit de l’investiture de Charles VII, mais on peut juger vraisemblable que celui-ci n’ait été diffusé qu’après le dégagement d’Orléans, à partir du moment où Jeanne avait donné effectivement un signe attestant de sa mission divine, ce signe que devant les théologiens de Poitiers elle se faisait fort de donner — auparavant, tant que Jeanne n’était qu’un bruit, il aurait sans doute été trop risqué de lui attribuer un rôle aussi crucial dans la restauration de la légitimité de Charles VII. Dater ce texte du mois de mai 1429 explique que Giovanni da Molino en ait eu connaissance, comme on peut le penser, même si la lettre dans laquelle il aurait pu évoquer la scène n’a pas été transcrite par Morosini.

Un tel récit est certainement antérieur au sacre de Reims. Après le sacre, de fait, il ne sera plus question d’une investiture du roi par le biais de Jeanne : puisqu’il a reçu le sacre dans les formes prévues, comme ses ancêtres avant lui, puisqu’il a touché les écrouelles, puisque sa campagne de l’été 1429 a été victorieuse, Charles n’a plus un besoin aussi crucial de Jeanne d’Arc. Il peut même devenir embarrassant d’appuyer sa légitimité sur le bras d’une jeune fille. C’est pourquoi la scène de l’investiture n’est plus reprise par la suite ; c’est pourquoi Eberhard Windecke, Jean d’Alençon et Bertrand de Poulengy n’en donnent plus qu’une version édulcorée, dont on peut trouver la forme définitive chez Jean Pasquerel, le confesseur de Jeanne, quand il est interrogé en 1456 :

11Le sire comte de Vendôme conduisit Jeanne auprès du roi et la fit entrer dans la chambre royale. Lorsqu’il la vit, le roi demanda à Jeanne son nom ; elle répondit : Gentil dauphin, j’ai nom Jeanne la Pucelle ; et le roi des cieux vous mande par moi que vous serez sacré et couronné dans la ville de Reims, et vous serez le lieutenant du roi des cieux, qui est roi de la France. Après plusieurs questions posées par le roi, Jeanne dit à nouveau : Moi je te dis, de la part de messire, que tu es vrai héritier de France et fils du roi ; et Il m’envoie à toi pour te conduire à Reims, où tu recevras la couronne et le sacre, si tu veux. L’ayant entendue, le roi déclara aux assistants que Jeanne lui avait dit certains secrets, que personne ne connaissait ou ne pouvait savoir, si ce n’est Dieu ; aussi avait-il grande confiance en elle. Toutes ces choses le témoin les a entendues de Jeanne elle-même, car il ne fut pas alors présent22.

Charles VII n’est plus un roi en commende : il est devenu, de façon plus neutre, plus attendue, le lieutenant du roi des Cieux. Lieutenant, c’est-à-dire lieu-tenant, celui qui tient lieu de : il faut voir dans ce titre un écho de la scène de l’investiture que Jean Pasquerel, plus avisé que le duc d’Alençon ou Bertrand de Poulengy, préfère escamoter. Le rôle de Jeanne, du coup, tend à se modifier : elle n’est plus celle qui investit le roi de la part de Dieu ; même si c’est déjà beaucoup, sa mission n’est plus que de le rassurer sur sa légitimité et de lui frayer la voie jusqu’à Reims.

Est-ce-à-dire qu’il y a bien eu, concrètement, au cours d’une de leurs rencontres, une scène dans laquelle Jeanne aurait demandé au roi de se dépouiller de sa royauté, telle qu’il la tenait par le sang, pour la revêtir à nouveau, cette fois au nom de Dieu ? Et qu’ensuite la décision aurait été prise, dans l’entourage du roi, d’en rendre public le récit, sans doute un peu arrangé ? C’est peut-être moins invraisemblable qu’on ne pourrait le croire au premier abord23.

Dès le 22 mars, alors qu’elle se trouve encore à Poitiers, Jeanne fait publiquement connaître ses intentions, par la fameuse lettre aux Anglais, sans doute massivement diffusée par les soins de la chancellerie de Charles VII24. La structure en est plutôt décousue, ce qui a pu laisser penser que le texte était en fait composé de plusieurs lettres accolées l’une à l’autre ; il paraît plus probable que Jeanne a suivi son inspiration pour dicter ce défi jeté à ses adversaires. Adressée directement au roi d’Angleterre, au duc de Bedford (qui vous dites régent de France), et aux trois chefs de l’armée anglaise devant Orléans (le comte de Suffolk, Talbot et le sire de Scales), la lettre les somme de rendre les clefs de toutes les bonnes villes qu’ils ont prises et violées en France. Jeanne s’y présente explicitement comme la Pucelle qui est ici envoyée de par Dieu. Dans le cours du texte, elle s’adresse à vous tous, archers, compagnons de guerre, gentilshommes et autres qui êtes devant la ville d’Orléans : allez-vous en en votre pays, de par Dieu. De nouveau, Jeanne interpelle le roi d’Angleterre : Roi d’Angleterre, si vous ne le faites ainsi, je suis chef de guerre, et en quelque lieu que j’attendrai vos gens en France, je les en ferai aller, qu’ils veuillent ou non. Et s’ils ne veulent obéir, je les ferai tous occire ; je suis ici envoyée de par Dieu, le Roi du Ciel, corps pour corps, pour vous chasser hors de toute la France, et plus loin : Aux horions [coups] on verra qui aura meilleur droit de Dieu du ciel. Dans la lettre, l’enjeu est en effet clairement exprimé, la possession légitime du royaume de France : vous ne tiendrez point le royaume de France de Dieu, le Roi du Ciel, fils de sainte Marie, mais le tiendra le roi Charles, vrai héritier ; car Dieu, le Roi du Ciel, le veut, et cela est révélé par la Pucelle au roi Charles, lequel entrera à Paris en bonne compagnie. De ce discours à la tonalité pour le moins belliqueuse, la perspective de la paix n’est pas absente. Mais il ne s’agit pas d’une paix négociée : Jeanne, dit-elle en passant à la troisième personne, est prête à faire la paix, si vous voulez lui faire raison en abandonnant la France et payant pour ce que vous l’avez tenue. La lettre se termine sur un appel spécifique au duc de Bedford : si celui-ci accepte de se retirer de France, il pourra aller, en la compagnie de Jeanne, là où les Français feront le plus beau fait qui jamais fut fait pour la chrétienté. Un appel à la croisade, à la reprise de la Terre sainte, dans la littérature politique du temps, était un thème plutôt courant. Chez Jeanne, néanmoins, ce n’est pas un lieu commun, un passage obligé, c’est certainement une conviction sincère. Après la libération du royaume, les Français reprendront Jérusalem : la mission de Jeanne dépasse de loin la seule guerre contre les Anglais.

Dans la stricte perspective de cette étude, la lettre aux Anglais suscite deux remarques. La première remarque tient aux deux éléments complémentaires qui y justifient la légitimité de Charles VII : le 12sang (il est le vrai héritier) et Dieu (car Dieu, le Roi du Ciel, le veut) ; de telle sorte que Jeanne ne réfléchit pas en juriste, à la manière d’un Jean de Terrevermeille — on ne saurait s’en étonner — mais à sa façon, en combinant entre eux deux facteurs clairement distincts l’un de l’autre. Le plus souvent, on se contente de répéter que Jeanne d’Arc se dit l’envoyée de Dieu ; mais n’est-ce pas oublier que, à ses yeux, Dieu est aussi la garantie de la légitimité de son roi, et pas seulement de sa propre légitimité, à elle, la Pucelle ?

Le second point qu’on peut noter concerne le relatif effacement de Charles VII. Dans la lettre aux Anglais, Charles, certes, n’est pas totalement absent ; mais c’est Jeanne qui occupe tout l’espace. Ne se dit-elle pas chef de guerre, n’entend-elle pas conduire en personne les opérations qui chasseront les Anglais ? Il faut que la figure de Jeanne nous soit bien familière pour que nous ne prêtions plus attention à cette répartition des rôles, la jeune fille au combat, le roi en arrière. De fait, au cours du printemps 1429, Charles paraît étrangement distant. Il n’est visiblement pas question pour lui de prendre la tête de l’armée ; il ne s’y résout qu’à la fin du mois de juin, quand est décidée la marche sur Reims ; mais les rares sources disponibles laissent penser que le choix n’a pas été facile.

La renonciation du roi à sa couronne, sa ré-investiture par une toute jeune fille, le caractère précaire d’une donation en commende : si, comme on peut le penser, tout cela a été diffusé dans l’opinion, on comprend que Charles VII, jusqu’à son sacre, se soit fait discret. Encore une fois, le sacre change tout, puisqu’il n’y a plus désormais qu’un roi de France25. Sous l’Ancien régime, on pensait que Jeanne d’Arc, une fois passé le sacre de Reims, avait achevé sa mission. Sans doute elle-même n’aurait-elle pas été d’accord, car son comportement laisse penser que ses ambitions étaient beaucoup plus étendues. Mais, en un sens, tel était bien le cas. Charles VII dûment sacré, et à moins d’une mort prématurée du roi et de son fils le dauphin Louis, les Anglais ne pouvaient plus gagner la guerre : Jeanne avait rempli son rôle historique.

On comprend sans peine, dans ces conditions, que la mise en commende du royaume ait totalement disparu de la propagande de Charles VII. Mais, de l’effort consenti pour diffuser cette scène, qu’on peut dire en quelque sorte inaugurale, il restait des traces, chez Jean Dupuy ou Windecke, il restait des témoins, plus ou moins bien informés, comme Poulengy, Jean d’Alençon ou le frère Pasquerel.

Et il restait Jeanne elle-même. Prise le 23 mai 1430 devant Compiègne, Jeanne est jugée à Rouen à partir du 9 janvier de l’année suivante, Le 7 juin 1431, une semaine après son exécution, ses juges, l’évêque de Beauvais Pierre Cauchon et le vicaire de l’inquisiteur Jean Le Maître, font consigner par écrit les dépositions de plusieurs clercs et religieux qui avaient visité Jeanne, avec eux, au matin du supplice : c’est ce qu’on appelle l’information posthume26. La valeur de ces témoignages recueillis dans des conditions contestables pose naturellement problème. Mais admettons-la par hypothèse. L’un des enjeux de l’information posthume est l’existence des voix ; Jeanne la défend fermement. Elle cède, en revanche, sur l’autre point. Les juges étaient visiblement tracassés par une scène sur laquelle ils étaient souvent revenus au cours des interrogatoires. Jeanne avait en effet déclaré avoir assisté à la remise au roi, par un ange descendu du ciel, d’une couronne merveilleuse ; interrogée à plusieurs reprises, elle avait maintenu ses propos sans ciller. Ce n’est que le matin de sa mort, prête à monter au bûcher, qu’elle aurait admis qu’elle avait inventé la scène, et que l’ange n’était autre qu’elle-même. Or, dans ce cas, Jeanne n’aurait rien fait d’autre que de transposer la scène de la mise en commende du royaume, telle que la décrit Jean Dupuy. Qu’un ange apporte une couronne à Charles VII, c’était, pour les partisans de l’Union des deux couronnes, profondément dérangeant. Mais l’était-ce beaucoup moins que ce fût Jeanne qui le fasse ? Après tout, Jeanne a peut-être mis en scène une sorte de métaphore : apporter la couronne au roi aurait renvoyé à l’ensemble de son action, de la levée du siège d’Orléans au sacre et au-delà. Mais pourquoi ne pas penser qu’il y a bien eu, à l’occasion d’une des rencontres entre Jeanne et le roi, la remise d’une couronne à ce dernier, une sorte d’investiture par la Pucelle envoyée de Dieu ? Ne sommes-nous pas, en définitive, trop enclins à rationaliser, là où les hommes et les femmes du XVe siècle voyaient plus volontiers l’intervention du surnaturel ?

Pour ses contemporains, que Jeanne prétende avoir des voix n’allait pas de soi ; les théologiens étaient fort prudents sur ces questions ; il existait des traités dans lesquels on s’efforçait de déterminer les critères qui pouvaient faire conclure à la réalité des voix ; Jeanne elle-même fut soumise à un examen serré à Poitiers. Mais, malgré toutes ces réserves, la possibilité existait, et c’est dans ce sens que conclurent les partisans de Charles VII : Jeanne était inspirée. Si le roi lui-même en était convaincu, il n’est pas interdit de considérer comme plausible que, devant un public plus ou moins restreint, une couronne lui ait été remise, symbolisant sa pleine légitimité ; 13et pourquoi ne pas imaginer alors que Charles se serait au préalable dépouillé d’une autre couronne ? Au fond, il y a, dans la relation entre Charles VII et Jeanne, un mystère irréductible : une scène semblable à mise en commende est une des solutions qu’on peut proposer.

C’est, pensera-t-on, laisser trop libre cours à l’imagination ; maïs cette hypothèse a au moins le mérite de nous rappeler que Jeanne et Charles VII n’évoluent pas dans un monde qui obéirait aux mêmes règles que le nôtre, un monde rationnel (si tant est que le nôtre le soit !), un monde dans lequel domineraient les considérations politiques, et dans lequel Charles VII se servirait de Jeanne comme d’un étendard avant de l’abandonner une fois sa mission achevée. Comme l’écrit Philippe Contamine :

Aux yeux de l’historien, le cas de Jeanne d’Arc, dans l’aujourd’hui de son surgissement, est incompréhensible si l’on n’admet pas l’existence dans la mentalité contemporaine, à l’état au moins virtuel, de prophéties, d’images-forces, de toute une attente, de toute une espérance, bref d’une idéologie dont l’action de la Pucelle s’est nourrie, à laquelle elle a participé (dans une mesure et selon des processus qui demeurent assez mystérieux)27.

Dans le monde de 1429, la part du surnaturel, sans être omniprésente, est substantiellement plus forte. Malgré sa méfiance, malgré ses réserves, Charles VII a peut-être été, ne serait-ce que pendant quelques mois, subjugué par Jeanne d’Arc. En tout cas, telle est l’impression qu’on retire des témoignages contemporains. Le Greffier de La Rochelle, dont on a dit plus haut qu’il utilisait des éléments provenant d’une des versions du dossier de propagande diffusé par la chancellerie royale, en est un bon exemple. Après avoir rappelé comment Jeanne a démasqué Charles de Bourbon, qui se faisait passer pour Charles VII, et reconnu ce dernier au milieu de ses familiers, le Greffier écrit ceci :

Et tantost après le roy saillit d’unne chambre, et tantost qu’elle le vit, elle dit que c’estoit il et luy dit qu’elle estoit venue a luy de par le Roy du Ciel, et qu’elle vouloit parler a luy. Et dit-on qu’elle luy dit certaines choses en secret, dont le roy fut bien esmerveillé. Et après, la ditte Pucelle luy dit que, si il vouloit faire ce qu’elle luy ordonneroit, qu’il recouvreroit sa seigneurie et que lesdits Anglois s’en iroyent hors de son royaulme. Et après, pour ce que le Roy nostre dit seigneur fut bien esmerveillé de la venue et dire de la dite Pucelle et de son estat, il la fit interroger d’où elle estoit, de quoy elle avoit usé et pour quelle cause elle estoit venue. Laquelle dit qu’elle estoit dudit lieu de Vaucouleur en Lorraine, et qu’elle avoit tousjours gardé les brebis, et qu’en les gardant luy estoient venues par plusieurs fois advisions et admonestemans de venir par devers le roy nostre dit seigneur, et que pour cette cause elle s’estoit mise en chemin et estoit venue de par ledit Roy du Ciel ; et que si le Roy nostre dit seigneur vouloit faire ce qu’elle luy ordonneroit, que les Anglois s’en iroient tous de son royaume ou mourroient, et recouvreroit tout ce qu’il y avoit perdu28.

Charles doit donc faire ce que Jeanne lui ordonnera. A-t-on prêté assez attention à cette insistance sur l’obéissance que le roi doit montrer envers la Pucelle ? Le Greffier de La Rochelle n’est pas le seul à évoquer ce curieux rapport inversé. Une lettre recueillie par Morosini, datée du 9 juillet 1429, donne un compte-rendu très similaire :

Venue en présence du noble prince le dauphin Charles, fils du roi de France dernièrement mort, elle lui notifia de par Jésus notre rédempteur qu’il plaisait à celui-ci [qu’elle vint] pour trois choses, lesquelles ainsi, comme elle lui disait, s’ensuivraient, s’il avait ferme confiance en elle, et laissant la vie [qu’il menait], s’il s’amendait et se gouvernait selon elle, moyennant la grâce de Dieu, par le commandement duquel elle était mue. D’abord elle était venue pour lever le siège que les Anglais tenaient à Orléans ; en second lieu, pour le couronner librement et le faire roi de toute la France et de ses appartenances ; en troisième lieu, pour faire la paix entre lui et les Anglais ; et, encore, pour faire sortir à l’amiable le duc d’Orléans de sa prison d’Angleterre.

On aura noté au passage la nécessité pour ce Charles VII de s’amender et de changer de vie, ce qui n’est pas sans rappeler la scène de la mise en commende. Un peu plus loin, cette lettre se rapproche d’ailleurs du récit de Jean Dupuy : si le roi n’obéit pas à Jeanne, alors il perdra tout ; mais, s’il fait selon ses ordres, en bref [espace] de temps Dieu lui donnera bonne grâce dans sa miséricorde et le fera seigneur de tout son pays29.

Même constatation, de nouveau, dans la lettre de Perceval de Boulainvilliers, datée du 21 juin 1429 (antérieure au sacre, par conséquent). Il y est dit qu’alors que la Pucelle gardait les brebis de ses parents dans les champs, au village de Domremy :

14Soudain une nue très brillante s’offrit à yeux, et de la nue sortit une voix lui disant : Il convient que tu mènes une autre vie et que tu accomplisses des actions merveilleuses, car tu es celle que le Roi du Ciel a choisie pour être la réparation du royaume de France, l’aide et la protection du roi Charles, expulsé de sa seigneurie. Revêts un habit d’homme : en prenant les armes, tu seras chef de guerre ; toutes choses seront gouvernées par ton conseil. La voix ayant parlé, la nue disparut. La Pucelle demeura stupéfaite, elle ignorait si elle devait y croire. Des apparitions semblables eurent lieu nuit et jour, mais elle se tut, n’en parlant qu’à son curé30.

Des premiers temps de la vie publique de Jeanne d’Arc, on retient généralement la force de conviction de cette toute jeune fille, que son aplomb imperturbable — ne se dit-elle pas envoyée par Dieu ? — fait triompher de tous les obstacles, de Vaucouleurs à Orléans, en passant par la rencontre de Chinon et l’examen de Poitiers. C’est juste, naturellement. L’irruption de Jeanne d’Arc chasse les autres protagonistes du devant de la scène, et on ne s’étonne plus de voir si peu Charles VII. Mais il faut aller plus loin. Tout laisse penser qu’au printemps 1429, le roi s’est de lui-même mis en réserve, en plaçant son sort entre les mains de Jeanne d’Arc, ou en tout cas en faisant savoir largement que telle était son intention : il se contenterait désormais d’obéir à la Pucelle. De ce point de vue, la mise en commende du royaume doit être replacée dans un contexte plus large, celui d’un effacement temporaire de la figure du roi au profit de Jeanne d’Arc, dûment orchestré par sa propagande, et sensible, comme on l’a vu, dans la scène rapportée par Jean Dupuy, dans la lettre aux Anglais, dans le récit du Greffier de La Rochelle, et dans la lettre du 9 juillet recueillie par Morosini, pour s’en tenir à ces quelques exemples dont on peut penser à bon droit qu’ils reflètent ce que l’entourage de Charles VII voulait faire connaître à l’opinion.

C’est ici qu’on peut faire le lien avec la prophétie mentionnée par Durand Laxart, l’oncle de Jeanne d’Arc, dans le témoignage qu’il livre en 1456. À Vaucouleurs, raconte-t-il, pour le convaincre de la laisser voir Robert de Baudricourt, Jeanne lui aurait demandé : N’a-t-il pas autrefois été dit que la France serait désolée par une femme et ensuite restaurée par une pucelle31 ? L’investiture par Jeanne de Charles VII prend alors tout son sens, puisque dépouillé par sa mère, Isabeau de Bavière, qui avait prêté la main à la conclusion du traité de Troyes, en 1420, Charles était rétabli dans ses droits par une jeune fille : puisqu’il avait été impuissant à empêcher son déshéritement, il devait rester spectateur de sa restauration.

En définitive, voici ce qui peut se dégager de cette brève étude. La scène de la mise en commende fait partie des éléments diffusés par l’entourage de Charles VII auprès des villes du royaume et des cours étrangères ; elle met en valeur la personne et l’action de Jeanne et l’effacement provisoire du roi, appelé à revenir dans la gloire une fois acquis le renversement de la conjoncture militaire. Au printemps 1429, l’entrée dans Reims était peut-être jugée un objectif inatteignable par Charles VII, ce qui expliquerait que ses conseillers aient diffusé la scène, de manière à asseoir sa légitimité ; mais, en tout état cause, après le sacre, la propagande française abandonne brutalement le thème de l’investiture du roi par le moyen de Jeanne. Plus banalement, Charles devient le lieutenant de Dieu, par exemple chez Jean Pasquerel, mais ce n’est plus là qu’un lointain écho de la scène autrement plus forte (et plus dérangeante !) que racontait Jean Dupuy. Seule Jeanne, au cours de son procès, y reste attachée, en affirmant avoir vu un ange apporter une couronne à son roi, avant de reconnaître, si on en croit l’information posthume, qu’elle-même était l’ange. Mais, alors qu’on pense généralement qu’il s’agissait là d’une allégorie, on peut se demander si Jeanne ne renvoyait pas ici à une scène bien réelle au cours de laquelle elle aurait remis une couronne à Charles VII. L’ultime élément qu’on peut souligner est le suivant : traditionnellement, l’historiographie française estime que la légitimité de Charles VII, fondée sur le fait qu’il était le seul fils survivant de Charles VI, ne faisait pas de doute pour ses partisans. Mais si, au printemps 1429, son entourage est bel et bien prêt à faire d’une jeune fille inspirée le truchement par l’intermédiaire duquel la légitimité du sera renouvelée, on peut considérer qu’il faut reprendre cette question sur d’autres bases.

Notes

  1. [1]

    Delisle (Léopold), Nouveau témoignage relatif à la mission de Jeanne d’Arc, Bibliothèque de l’École des chartes, t. 46, 1885, p. 649-668, à la p. 652.

  2. [2]

    Beaune (Colette), Jeanne d’Arc, Paris, Perrin, 2004, p. 247 ; Contamine (Philippe) (dir.), Bouzy (Olivier) et Hélary (Xavier), Jeanne d’Arc. Histoire et dictionnaire, Paris, Robert Laffont, coll. Bouquins, 2012, p. 115-116 et p. 610 (Ph. Contamine).

    Sans que je le précise explicitement par la suite, je renvoie à ce dernier volume, notamment aux notices du dictionnaire, pour tous les personnages mentionnés. L’étude qu’on va lire s’inscrit dans une série de réflexions menées sur Jeanne d’Arc et la légitimité de Charles VII, dont deux sont déjà parues, auxquelles je me permets de renvoyer : Jeanne d’Arc et la guerre, dans le procès de condamnation, Les Femmes et la guerre de l’Antiquité à Actes du colloque d’Amiens (15-16 novembre 2007), Trévisi (Marion) et Niver (Philippe), Paris, Economica, Bibliothèque stratégique, 2011, p. 109-130 ; Charles VII et les Français dans le procès de condamnation de Jeanne d’Arc, Universitas scolarium. Mélanges offerts à Jacques Verger par ses anciens étudiants, Giraud (Cédric) et Morard (Martin) (dir.), Genève, Droz, 2011 (École pratique des Hautes Études. Sciences historiques et philologiques, V. Hautes études médiévales et modernes, 102), p. 597-613.

  3. [3]

    Sur le terme latin commenda, voir la notice du Glossarium mediæ et infimæ latinitatis, de Du Cange, mis en ligne sur le site de l’École nationale des chartes (http://ducange.enc.sorbonne.fr) ; Larrar (R.), Commende, Dictionnaire de droit canonique, Paris, Letouzey, t. III, col. 1029-1085 ; Marié (dom G.), Commende, Catholicisme. Hier. aujourd’hui, demain, Paris, Letouzey et Ané, t. 2, 1949, col. 1340-1342 ; Lemaire (Jean-Loup), Commende, Dictionnaire encyclopédique du Moyen Âge, Vaucuz (André) (dir.), Paris, Éditions du Cerf, 1997, t. I p. 359-360.

  4. [4]

    Durarc (Pierre), Procès en nullité de la condamnation de Jeanne d’Arc, Paris, Klincksieck, t. III, 1983, p. 292-293 (par erreur, la traduction donne commande) ; voici le texte latin :

    etenim dicebat ipsa Johanna quod regnum non spectabat dalphino, sed Domino suo ; attamen Dominus suus volebat quod efficeretur rex ipse dalphinus, et quod haberet in commendam illud regnum, dicendo quod invitis inimicis ejusdam dalphini fieret rex, et ipsa duceret eum ad consecrandum. — (Durarc (Pierre), Procès en nullité, Paris, t. II, 1977, p. 305).

  5. [5]

    Durarc (Pierre), Procès en nullité, Paris, t. IV, 1986, p. 64.

  6. [6]

    Lefèvre-Pontalis (Germain), Les sources allemandes de l’histoire de Jeanne d’Arc. Eberhard Windecke, Paris, Fontemoing, 1903, p. 152-155 ; le texte se trouvait déjà chez Quicherat (Jules), Procès de condamnation et de réhabilitation de Jeanne d’Arc, dite la Pucelle, Paris, Crapelet, t. IV, 1847, p. 485-501, à la p. 486.

  7. [7]

    Lefèvre-Pontalis (Germain) et Dorez (Léon), Chronique d’Antonio Morosini. Extraits relatifs à l’histoire de France, Paris, Renouard, t. III, 1901, p. 83-84 (lettre de Giovanni da Molino, d’Avignon, le 30 juin 1429).

  8. [8]

    Contamine (Philippe), Windecke, Eberhard, dans Jeanne d’Arc. Histoire et dictionnaire, p. 1048-1049 (la citation se trouve à la p. 1048).

  9. [9]

    Cf. Valois (Noël), Un nouveau témoignage sur Jeanne d’Arc. Réponse d’un clerc parisien à l’apologie de la Pucelle par Gerson (1429), Annuaire-Bulletin de la Société de l’histoire de France, 1906, p. 161-179.

  10. [10]

    Dondaine (Antoine), o. p., Le témoignage de frère Jean Dupuy, évêque de Cahors, sur Jeanne d’Arc, Archivum Fratrum Prædicatorum, t. 12, 1942, p. 167-184 ; à compléter par, du même, Le témoignage de Jean Dupuy, o. p., sur Jeanne d’Arc. Note additionnelle à AFP, t. 12, 1942, p. 167-184, Archivum Fratrum Prædicatorum, t. 38, 1968, p. 31-41.

  11. [11]

    Fraioli (Deborah A.), Joan of Arc. The Early Debate, Woodbridge, The Boydell Press, 2000 ; Contamine, Bouzy et Hélary, Jeanne d’Arc. Histoire et dictionnaire, ouvr. cit., p. 113-116 et 1055-1071, Observations sur les sources de l’histoire de Jeanne d’Arc écrites jusqu’à sa capture (23 mai 1430) (Ph. Contamine et O. Bouzy) ; sur la notion de propagande, dans le contexte de la guerre de Cent Ans, Contamine (Philippe), Aperçus sur la propagande de guerre de la fin du XIIe au début du XVe siècle : les croisades, la guerre de Cent Ans, Le forme della propaganda politica nel due et nel trecento, Cammarosano (Paolo) (dir.), Rome, École française de Rome, Collection de l’École française de Rome, 201, 1994, p. 5-27 ; repris dans Pages d’histoire militaire médiévale (XIVe/XVe siècles), Paris, Diffusion De Boccard, 2005, p. 141-160 ; cf. également Pons (Nicole), La propagande de guerre française avant l’apparition de Jeanne d’Arc, Journal des savants, 1982, p. 191-214.

  12. [12]

    Chronique d’Antonio Morosini, p. 57 (lettre de Pancrazio Giustiniani à son père Marco, Bruges, 4 juin 1429).

  13. [13]

    Sur l’usage de l’exemplum, Berlioz (Jacques), Le récit efficace : l’exemplum au service de la prédication (XIIIe-XIVe siècle), Mélanges de l’École française de Rome. Moyen Âge, t. 92, 1980, p. 113-146.

  14. [14]

    Le Brun (Jacques), Le pouvoir d’abdiquer : essai sur la déchéance volontaire, Paris, Gallimard, 2009 ; je n’ai pas pu consulter le volume récemment publié sous la direction d’Alain Boureau et de Corinne Péneau, Le deuil du pouvoir. Essais sur l’abdication, Paris, Les Belles Lettres, 2013, qui s’inscrit explicitement dans la lignée de l’ouvrage précédemment cité de J. Le Brun.

  15. [15]

    L’anecdote serait à vérifier ; elle est signalée par Saint-Priest (Alexis de), Histoire de la conquête de Naples par Charles d’Anjou, frère de Saint Louis, Paris, Amyot, t. IV, 1849, p. 136, sans indication de source ; il faut signaler que Pierre III d’Aragon, dans toutes les pièces que publie Saint-Priest dans les annexes de son ouvrage, se dit toujours par la grâce de Dieu roi d’Aragon (voir particulièrement aux p. 239-240 l’acte par lequel, près de la mort, donc à l’automne 1285, Pierre III restitue la Sicile à l’Église : il porte toujours son titre, et non pas celui de chevalier d’Aragon).

  16. [16]

    Paris, Tessier (Georges), Le Baptême de Clovis (25 décembre…), Gallimard, 1963 (Les Trente Journées qui ont fait la France) ; Rouche (Michel), Clovis, Paris, Fayard, 1996 ; Rouche (Michel) (dir), Clovis, Histoire et mémoire, 2 t., Paris, Presses de l’Université Paris-Sorbonne, 1997.

  17. [17]

    Dumas (Auguste), Cloud (saint), Clodoaldus, Dictionnaire d’histoire et de géographie ecclésiastiques, Paris, t. XIII, Letouzey et Ané, 1956, col. 22 ; la source est chez Grégoire de Tours, Histoires, t. III, 18. Je remercie l’abbé Jestin de m’avoir suggéré plusieurs pistes de recherche à l’issue de la conférence, et notamment d’avoir porté à ma connaissance le cas de saint Cloud.

  18. [18]

    Contamine, Bouzy, Hélary, Jeanne d’Arc. Histoire et dictionnaire, ouvr. cit., p. 608 (Ph. Contamine).

  19. [19]

    Épître aux Éphésiens, 4, 20-24, dans la traduction de La Bible de Jérusalem, traduite en français sous la direction de l’École biblique de Jérusalem, Paris, Les Éditions du Cerf, 1998, p. 2014.

  20. [20]

    Contamine (Philippe), La France anglaise au XVe siècle. Mythe ou réalité ?, La France anglaise au Moyen Âge. Actes du IIIe congrès national des sociétés savantes (Poitiers, 1986), Paris, 1988, t. I, p. 17-29 ; Curry (Anne), Le traité de Troyes (1420). Un triomphe pour les Anglais ou pour les Français ?, Images de la guerre de Cent Ans, Cour (Daniel), Maurice Guéret-Laferté (Jean et Michèle) (dir.), Actes du colloque de Rouen, 21-22-23 mai 2000, Paris, Presses universitaires de France, 2002, p. 13-26.

  21. [21]

    Barsey (Jean), La fonction royale. Essence et légitimité d’après les Tractatus de Jean de Terrevermeille, Paris, Nouvelles Éditions Latines, 1983.

  22. [22]

    Duparc (Pierre), Procès en nullité, t. IV, p. 72.

  23. [23]

    Je rejoins les conclusions auxquelles aboutissent, par deux chemins différents, Olivier Bouzy, Jeanne d’Arc, les signes au roi et les entrevues de Chinon, dans Guerre, pouvoir et noblesse au Moyen Âge. Mélanges en l’honneur de Philippe Contamine, Pavior (Jacques) et Verger (Jacques) (dir), Paris, Presses de l’Université Paris-Sorbonne, 2000 (Cultures et civilisations médiévales, XXII), p. 131-138 ; et Colette Beaune, L’entrevue de Chinon, Bulletin de la Société archéologique de Touraine, t. 56, 2010, p. 59-70 (aux p. 68-69).

  24. [24]

    Contamine, Bouzy, Hélary, Jeanne d’Arc. Histoire et dictionnaire, ouvr. cit., p. 814-816 (Ph. Contamine) ; le texte a été maintes fois publié ; on peut voir par exemple Quicherat (Jules), Procès de condamnation, t. IV, p. 95-98.

  25. [25]

    Sur ce point, Hélary (Xavier), Charles VII et les Français dans le procès de condamnation de Jeanne d’Arc, art. cit. plus haut note 2.

  26. [26]

    Pour une mise au point sur l’information posthume, je me permets de renvoyer à ma contribution à paraître dans les actes du colloque d’Orléans de mai 2012, aux Presses universitaires de Rennes, sous la direction de Jean-Patrice Boudet, avec ma collaboration.

  27. [27]

    Contamine (Philippe), Mythe et histoire : Jeanne 1429, Razo, t. 12, 1992, p. 41-54 ; repris dans De Jeanne d’Arc aux guerres d’Italie. Figures, images et problèmes du XVe siècle, Orléans, Paradigme, 1994, p. 63-76.

  28. [28]

    Quicherat (Jules), Une relation inédite sur Jeanne d’Arc, Revue historique, 2e année, t. 4, 1877, p. 329-344, à la p. 337.

  29. [29]

    Lefèvre-Pontalis (Eugène) et Dorez (Léon), Chronique d’Antonio Morosini, ouvr. cit., t. III, 1901, p. 95-96 et 105 (lettre du 9 juillet, reçue le 2 août).

  30. [30]

    Quicherat (Jules), Procès de condamnation, Paris, t. V, 1849, p. 114-121 ; cf. Bougenot (Étienne), Notes et extraits de manuscrits intéressant l’histoire de France conservés à la Bibliothèque impériale de Vienne (XIIIe-XIVe siècles), dont : Épisodes de Jeanne l’histoire de France (1422-1428) ; lettres relatives à d’Arc [lettres de Perceval de Boulainvilliers de Jacques de Bourbon] ; deux documents relatifs à frère Richard et à et ; Jeanne d’Arc, Bulletin philologique et historique du Comité des travaux historiques et scientifiques, 1892, p. 4-69, aux p. 4969 Sepet (Marius), La lettre de Perceval de Boulainvilliers, le 21 juin 1429 au duc de Milan, Bibliothèque de l’École des chartes, t. 67, 1916, p. 439-447.

  31. [31]

    Duparc (Pierre), Cf. Contamine, Bouzy et Hélary, Jeanne d’Arc. Histoire et dictionnaire, ouvr. cit., p. 934.

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