Ch. du Lys  : Recueil de plusieurs inscriptions (1613)

Texte : Premier recueil

Recueil de plusieurs inscriptions

IRecueil
de plusieurs inscriptions

proposées pour remplir les Tables d’attente estans sous les statuës du Roy Charles VII. et de la Pucelle d’Orléans, qui font élevées, également armées, et à genoux, aux deux costez d’une Croix, et de l’image de la Vierge Marie estant au pied d’icelle, sur le pont de la ville d’Orleans, dés l’an 1458.

et

de diverses poésies faite à la loüange de la mesme Pucelle de ses frères et leur postérité : dont la Table sera en la huictiesme page suivante.

Vignette en page titre du Recueil de plusieurs inscriptions de Charles du Lys, 1613 et 1628

A Paris, de l’imprimerie de Edme Martin, ruë S. Jacques, au Soleil d’or.

M. DC XXVIII.

Liminaires

IIAu lecteur.

Le Roy Charles VII, sur la fin de ses victoires se voyant en paix, fit mettre une grande Croix sur le pont d’Orleans, nuë sans Crucifix, et au pied d’icelle, l’image de la Vierge Marie assise, qui tient Nostre Seigneur mort entre ses bras ; d’un costé de la Croix est la statuë dudit Sieur Roy armé, et à genoux ; et de l’autre costé de ladite Croix est aussi la statuë de la Pucelle d’Orleans pareillement armée, et à genoux, ainsi seuls posez également, comme il se void en ce pourtrait icy representé. Ce qui n’a esté fait sans cause et grand mystere pour ce que l’on trouve par les histoires de plusieurs autheurs, entre autres de Wasbourg, Archidiacre de Verdun, Rerum Belgicarum, et d’un autre Archidiacre de Rouen, au supplément qu’il a fait de la Chronique de Normandie, que ladite Pucelle arrivant vers le Roy, pour luy faire connoistre qu’elle venoit par inspiration de Dieu, luy dit un secret que Dieu luy avoit revelé : Sçavoir est, que peu auparavant ledit Sieur Roy en son Oratoire seul, avoit prié Dieu que s’il estoit legitime successeur de la Couronne, il luy pleust la luy conserver, sinon qu’il luy donnast consolation, etc. Et qu’il pria par mesme moyen la Vierge Marie d’interceder envers Dieu pour luy sur le mesme subjet. Ce qu’elle fit, et impetra que ce fust aussi par le ministere de ladite Pucelle dont le Roy reconnoissant la verité de cette sienne priere qu’il n’avoit jamais revelée, fut fort encouragé, et affectionné à ladite Pucelle.

En memoire de quoy, sur la fin de son regne, apres avoir employé le Pape pour faire revoir le procès de ladite Pucelle, et purger sa memoire par une Sentence glorieuse donnée, et exécutée a Rouen ; sa Majesté fit aussi mettre ces images et statuës sur le pont d’Orleans en un mesme temps pour monstrer qu’eux deux seuls avoient sceu ce secret, et l’avoient executé par l’intercession de la Vierge, qu’ils en remercient ainsi ensemblément ; ce fut l’an 1458.

Et dautant qu’au dessous de ladite Croix et de la Vierge, est une grande Table d’attente, où l’on peut mettre aisément environ de huict vers Latins hexamètres ; sous la statuë du Roy est une autre petite Table, comme de la moitié ; et sous la statuë de la Pucelle une autre Table pareille à celle qui est sous le Roy.

On desiroit faire remplir lesdites trois Tables d’attente, de prose, ou de vers Latins, ou François, selon ce qu’on trouveroit plus convenable pour le subjet et pour le temps, où l’on peust voir et connoistre la raison de telle disposition de ces images. Ce qui a donné le premier subjet de ce Recueil, qui fut imprimé dés l’an 1613. et depuis augmenté par la curiosité des bons esprits affectionnez à sa louange, et de sa parenté.

Note. — Le préambule au lecteur de l’édition de 1613 présente quelques différences : voir.

Portrait et représentation fidèle du monument représentant Charles VII et Jeanne d’Arc sur le pont d’Orleans (par Léonard Gaultier, Recueil de plusieurs inscriptions de Charles du Lys, 1613 et 1628)
IIIPourtrait et representation au vray du simulacre qui est elevé sur le pont d’Orleans. (Gravure de Léonard Gaultier.)

Dédicace à Louis XIII

IVLudovico XIII.
Henrici Magni filio, Francorum et Navarr. Regi Christianiss. in Aquitaniam, uxoris ducendæ causa, proficiscenti.

Ecce tibi rediit tandem rediviva Puella,

Quæ pro Francigenis victima casta fuit ;

Virginis os habitumque ferens, et simplice cultu,

Virginei Virgo Principis ora subit.

Finibus Hesperiis veniet mox altera Virgo,

Quæ condat terris aurea secla tuis :

Jam Charites veniunt, veniunt pia turba sororum

Cynthius et passu jam præeunte venit :

Aëra per liquidum dulces glomerantur Amores,

Qui jungant nodis fœdera vestra fuis.

I, bone Rex, turmis venientibus obvius esto,

Atque verenda foror sit tibi juncta cornes

Utque sit æternum fœdus quod nectit utrinque,

Da, cape pacifica pignora chara manu.

Jana puella tuæ sequitur vestigia turmæ,

Nec venit armata Virgo pudica coma.

Sed cum virginei fini omnia plena pudoris,

Virgineos artus candida palla tegit.

S. P. Q. Aurel.

Portrait de Jeanne d’Arc en robe (par Léonard Gaultier, Recueil de plusieurs inscriptions de Charles du Lys, 1613, 1628, déjà imprimé dans l’Histoire d’Hordal en 1612)
VTalis inermis erat muliebri veste Puella. — Johanna Darc Aurelianensis Puella vulgo nuncupata — Mollis an hic facies ? an imago tenella puellæ ? Veste puellari Martia virgo latet. (Gravure de Léonard Gaultier.)

Dédicace à Marie de Médicis

VIMariæ Mediceæ
Francorum et Nav. Reginæ.

Dum premit attonitos inimica Britannia Francos,

Et Genabum frendens obsidione quatit,

Hanc Deus extremis Francorum mittit ab oris,

Præsentem Francis quæ cita ferret opem.

Sic cum magnanimi languens in funere Regis

Francia, vel præceps jam ruitura foret :

O Regina, licet perculsa dolore, labantis

Imperii retines in sua fata gradum.

Lilia restituit Francis armata Puella,

Lilia ne pereant, pacis arnica, facis

Hinc vos quod Francos pariter servastis in unum

Pagina picta tenet, pagina scripta refert.

Quin tibi si Virgo crudis se sistat in armis,

Haud mirum, cùm tu Palladis arma geras :

Henricus fuluo talem te excudit in auro

Hic ubi juncta viro fœdera sacra feris.

Filius et simili signans te, Diva, metallo,

Casside fers tectum casta Minerva caput.

Faustior at Regno, melioribus uteris armis :

Nam mage quam Martis, Palladis arma juvant :

Martis enim cessant ; non cessant Palladis artes,

Sic semper Francis altera Pallas eris.

S. P. Q. Aurel.

Portrait de Jeanne d’Arc en armes (par Léonard Gaultier, Recueil de plusieurs inscriptions de Charles du Lys, 1613, 1628, déjà imprimé dans l’Histoire d’Hordal en 1612)
VIITalis in arma ruit bellaci schemate virgo. — Johanna Darc Aurelianensis Puella vulgo nuncupata — Pugnate audentes Galli : si tale tenebat Palladium titubans Troia, perennis erat.

Note. — L’édition de 1613 présentait à cet endroit une table des chapitres : voir.

Recueil de plusieurs inscriptions

1Recueil
de plusieurs inscriptions

composées par diverses personnes, pour estre mises tant sous l’Image de la Croix, et de la Vierge Marie, que sous les statuës du Roy Charles VII. et de la Pucelle de France, qui sont eslevées sur le Pont de la ville d’Orleans dés l’an M. CCCC. LVIII.

Chapitre I.
Des Inscriptions faites en prose Latine.

Charles de La Saussaye, doyen de l’église d’Orléans

Heus Viator1.

Immorare heic aliquantulum, et simul hæc ammirare : Joannam Darciam virgunculam falso Lotharinguam, ditionis enim Franciæ, Puellam Aurelianensem vulgo nuncupatam, Anno ætatis suæ duodevigesimo Dei ope singulari, et B. Virginis confisam suffragiis, hanc civitatem gentis Anglorum obsidione confertissima Regnum Franciæ usurpatione violentissima semel soluisse : Carolum VII. Regem Francorum rebus quamvis desperatissimis, per medios hostium cuneos, hinc Rhemos usque fœlicissime traduxisse, Illic coelesti unguine, veterrimo decessorum suorum more inungendum Anglos denique Regni finibus exegisse. Annis reparatæ salutis. M CCCC XXVIIII. et MCCCCXXX.

In æviternam gratamque rei memoriam.

Cives Aurelianenses festivas Deo supplicationes quotannis, VIII. Eid. Maias decerni curavere, et monimentum hocce, margine pontis hujus ære publico, et jussu Regio conlocari.

Car. Sausseius Dec. Ecc. Aurel.

M. Parent, docteur de Sorbonne

2D. ✝ V.

Aurelia cruci olim dicata ; cruce non ita pridem,

abs Britannorum expugnatione vindicata ;

Johannæ Darciæ crucis religiosæ oraculis, votis,

ductu et armis ; civibus regique suo vendicata :

deiparæ moerore, filii exanime corpus jam refixum

complectentis, moestissima, gallis servitute abdicata,

Christi crucifixi imperio, tota Gallia ab Anglis abjudicata

Carolus VII francorum rex,

Quo numine, qua sospita, quo signo, et qua ministra vicerit.

Æternum hoc posteritati

Volvit stare et extare monimentum.

Anno, a partu virginis,

in Puellæ Aurelian. nomine,

cum ejusdem annis inscripto.

DαρCIαן α נ α ה ו י
IↃ. I. C. C. I. I. IↃCC. I. L. I. VIII. 6. 10.

Nomen Johannæ Darciæ hic exaratum literis Hebraïcis, Græcis, et Latinis ut in titulo crucis Christi (quam ipsa unice coluit) : Cujus nominis unaqueque litera numerum subsignatum prisco more denotat : Et numeri singuli antiquo, seu Romano caractere designati simul juncti, annum a Christo nato CIↃ CCCC LVIII. conficiunt, quo monumentum istud in memoriam ipsius Joannæ Darciæ, Urbis Aureliæ ponti constitutum est : Cæteri numeri vulgari et communi caractere conscripti, annos 21. quos vixit eadem Darcia puella computant.

D. Parent, Doct. Sorbon.

Nicolas Rigault

3Ad Ligerim in ponte Aurelianensi.

In media basi.

Puellæ. virgini. Joannæ. Darciæ.

Domnoremig. in Tullensib. Leucis. natæ.

Quod. ejus. ductu. ac divinitatis. instinctu.

Carolus. VII. Aurelianum. liberaverit.

Et rem Gal. pub. debellato. hoste. perniciosiss. restituerit.

Magistratus. P. Q. Aurel. C. V. F. C.

Sciant. perduelles.

Pro Franciæ. Salicæ Tutela.

Feliciter. armari. etiam. feminas.

N. Rigaltius.

In dextro latere.

Gallia. terribili. multum.

Vexata. Britanno.

Ecce. Puellari. stat.

Reparata manu.

Idem.

In sinistro.

Numen. in. hac. refugas. puppes.

Sensisse. Puella.

Ivraret. tamesis.

Sed. premit. ora pudor.

Idem.

Jacques Goutière

4D. O. M.

Quas. olim. bonas. preces. precatus. est

Karolus. VII. Rex. Christianissim

Easdem. lubens. merito. tu. qui. properas. iterare. propera

Uti. volens. propitiusq. regni. hujus. libertatem. et. salutem

Devictis. æternum. hostibus. tutetur

Gallis. omnibus. erga. principem. det. gloriam obsequii

Aut. maturam. et. sine. mora. pœnitentiam

D. P. V.

Tuq. Regina. Virgo. regni. urbis. orbis. custos. certissima

Quæ. difficillimis temporib. Galliæ præsto. adfuisti

Adsis. ipsa. etiamnunc. precesq. bonas

Tuis. potioribus. iterum. adjuva

Ave. et. fave.

Jac. Gutherius Civis et Patritius Romanus.

Karoli VII.

Francorum. Regis. invictiss.

Qui. hac. transis. vultus. effictos. venerare

Qui. vivos. olim. hostes. terruerunt

Ille. rebellione. civitatum. pene. omnium. et. procerum paterna. domo. ejectus. ab. hac. urbe. fidissima. exceptus

Dei. opt. virtute. et. sua

Queis. solis. gallorum. imperium. continetur

Tam. de. Burgundo. quam. de. Britanno et. omni. eorum. factione

Justis. Galliam. ultus. est. armis

Nullum. hac. in. virtute. fortuna. aut. fatum

Jus. sibi. vendicant

Quæ. adversa. tunc. erant

Vicit. fortunam. prudentia. pietas. fatum

Hæ. Francorum. Reges. utiq. invictos. reddunt

Idem.

5Joannæ Darciæ

Armatam. virginem. quisquis. intueris

Non. sexus. verecundiam

Sed. miraculi. magnitudinem cogita

Hæc. est. Janæ. Darciæ. Aurelianens. Puellæ imago

Quæ. abs. exercitum. domino. militiam. edocta

Anglorum. copias. de. Gallis. triumphantes

Ubique. fudit. fugavit

Et. Karolo. VII. avitum. imperium. restituit.

Hoc. Galliarum. fatum. est

Ut. nostrorum. principum. auspiciis

Labantes. res. aut. afflictæ

Feminarum. illustrium. factis. consultisve

Feliciter. reparentur

Idem.

Nicolas Bergier, de Reims

Α ☧ Ω

Sta, et lege viator :

Plurimum hic pretium moræ.

Carolvs VII apud Bituriges in angusto positus,

Reliqua ditione occupata, Aurelia obsessa

Si ivre, non inivria, pro regno dimicaret,

Ut regno uti frui daretur, Kal. Nov. tacitas ad Deum fundit preces,

Quas Mariæ precibus ratas, Jana Puella divinitus præscivit prædixit ;

Urbem obsidione, gentem internecione liberavit.

In rei bene gestæ memoriam,

Carolus annuas supplicationes instituit :

Se Puellamque, filio, matriaque, supplicantes ex ære statuit :

Ut scires,

In rebus desperatis

Supplicandum, non desperandum.

Nic. Bergier. Remus.

6Perennitati.

Quisquis es, qui statuas fusiles, sed stabiles,

Ligeri fluenti, sed manenti superimpositas ammiraris :

Disce hinc si nescis,

Francorum regno, fatis datam æviternitatem :

Hanc lex salica firmat, instinctu divinitatis lata :

Quæ ut vides,

Rege supplicante, Maria suffragante, Deo annuente,

Ad regni perennitatem,

Pro Maribus, etiam fœminas armat in fœminas

Idem.

D. O. M.1

Et Janæ Arxeæ, Jacobi F. Virgini piiss. castiss. bellicosiss.

Dumnoremigio in Leucis, qua Franci sunt, oriundæ :

Quod ejus ductu Genabum obsidione liberatum,

Urbes captæ aut receptæ, Angli fusi fugatique,

Carolus VII. durocortum remorum perductus,

Ibique fœliciter inunctus sit :

S. P. Q. Aurel.

Jubente Rege, omnium ordinum votis obsecundantib.

In perpetuam rei memoriam.

H. M. P. C.

A. S. CIↃ CCCC LIIX.

Idem.

Nicolas-Claude Fabri de Peiresc, Provence

D. O. M.

Votum.

Joannæ Darciæ Virgini sine exemplo innocentissimæ, cui nemo ausus est maledicere, nisi ille contra quem stetit, Virtute omnibus retro memorabili ; Quæ militans liberavit obsidione Aureliam Anglos subegit, multis victoris feroces coercuit, Galliæ prostratæ difficilimis temporibus subvenit, Et illius æternitati consuluit : Rex Christianissimus sociæ bellorum et victoriarum hanc ex ære statuam habitu militari conlocari voluit Utque S. P. Q. Aurel. Heroinæ nomen ad memoriam æternæ gloriæ annua veneratione celebraret.

I. F. D. de Peyresc. Prov.

Jean-Louis Fabrot, Provence

7D. O. M.

Sacrum.

Vos accenderat ignes Regis Mater, Virgo hæc Regni mater extinxit : Orta lues a fœmina, Parta a Virgine salus. Et quid Britannus ordinem Salicæ æternæ legis invertit, et ex fœmina jus jactat Regium ? Ingeniosi sunt ad pœnas superi : Quem, injustum movere bellum compellit fœmina, Juste profligat puella. Discite Reges non violare jura, Et non tam Naturæ, quam Cœli providentia fatalibus Imperia finibus coërceri.

J. J. Fabrotti Prov.

Antoine Loisel

Istic presta viator.

Hic enim quondam Francorum Anglorumq. dubia fortuna stetit : Verum D. O. M. benignitate, Virginis matris ductu, Virginis Puellæ manu ; sic Francorum virtus rediit atque recruduit, Anglorum abiit atque emarcuit, ut Kar. VII. Rex non modo in Paternum Regnum sed etiam in avitas proauorum sedes tandem sit restitutus. Vale. 1458.

Ant. Oiselius.

Louis Dorléans, Paris

8D. O. M.

Quo ruis tam præceps viator ? quove Ligeri ? instar, quem calcas effluis tam celeriter ? Vorte te ad vexillum Crucis, et procumbe. Viden ad vexilli pedes Virginem matrem ubertim depluentibus lachrumis ah ; Jesum jam suffixum, jam confixum baiulantem ? Specta porro duas in ære statuas ex advorsuo cruci adgeniculantes, unam dextrorsum Caroli VII. incluti Francorum Regis, Alteram sinistrorsum Janæ Arxeæ clarusissimæ heroinæ quam Aurelianensem Puellam volgo dictitant : Ambo Deum laudantes quod eo latenter, sed potenter, rebus humanis præsidente, imperia ineffabiliter gubernante, Burgundis factionibus eradicatis, discordiis civilibus averruncatis, Anglis regno abactis, subactis, fugatis, et profligatis, urbibus receptis et Aurelia, proh fidem longua et acri obsidione liberata, pax Franco orbi data, et recepta est. Et quia tanti, et tam memorabilis facti virgo dux, quæ ex opilione ductrix Principum, ex mollicella Virgine fortis bellatrix cœlimonitis ad Carolum direxit, Regem futurum prædixit, et certussimis signis uni Regi cognitis, asseveravit armata manu Rhemos perventurum, sacro oleo inuncturum, et longe lateque Imperio Francorum potiturum ; ad incredubilis rei incredubilem memoriam ad Dei gloriam incomparabilem, ad Virginis matris commendationem, ad Caroli VII. decus, ad laudem Janæ Arxeas, et tanti operis æternum monumentum S. P. Q. Aurelianensis, matronæque et virgines Aurel. Virgini fortussimæ, viragini cordatunimæ, post annuas decretas supplicationes, hanc crucem hasque statuas pontemque tanti miraculi testem, authoritate Regia, poni curaverunt, Anno salutis 1458.

Lud. Dorleans.

Thomas de Troismonts, conseiller du roi à Caen

9In statuam Janæ puellæ.

Quæ dudum flammis extincta, nusquam exterrita, post fata hic flexis genibus procumbo, sed perenni nominis splendore letales flammas extinguo, et rediviva supersto, Illa ego quondam cœlitus missa bellatrix Jana puella.

Th. Trismontius Reg. Cons. Cadomensis.

Étienne Le Fanu, Caen

In eandem statuam

Carolus VII. Gal. Rex Christianiss. voti rite pieque pro Regni salute concepti compos, consilio auspiclis, armisque Janæ Darciæ Virginis castissimæ, Viraginis fortissimæ Aurelia obsidione liberata Anglis toto orbe Gallico fusis fugatisque, Christo, et B. Virgini Mariæ M. I. D. consciamque voti Darciam, confortem periculorum, in pugna captam, et ab hostibus diro flammarum cruciatu inique affectam, meritorum ergo redivivam in ære, ut supplicem, et gratias agentem D. O. M. secum apparere voluit. S. P. Q. A. P.

Janæ Darciæ vides effigiem, si nescis quæ fuerit, indignus qui scias.

Steph. Fanutius Cadomensis.

10In eandem.

Voti a me pro R. P. Gallica armis Anglicis undique oppressa pie taciteque D. O. M. nuncupati, ream se divinitus factam apud me professa Jana Darcia virgo invidissima labantes meos meorumque animos in spem victoriæ erexit ; cujus auspiciis armisque profligatus hostis, Aureliaque obsidione liberata, eo nomine supplicem me et gratulabundum, ut et ipsam Darciam in ære spectandos præbeo.

Idem Fanutius.

Jacques Cahaignes, Caen

In eandem statuam Aureliæ Ponti superpositam.

Quis crederet viginti annorum puellam exercitus duxisse, vias strage hostium operuisse, captas ab his urbes recepisse obsessas (Aureliam hanc potissimum urbem) obsidione liberasse, Franciæ Regnum Anglis eripuisse, Carolo legitimo hæredi restituisse ? En imaginem Scilicet, hæc sunt admirabilia Dei præpotentis opera, qui voluit infirmissimæ rei ministerio, Anglorum ferociam victoriis aliis super alias partes superbientium retundere, et docere victorias non hominum viribus, sed suo duntaxat beneficio reportari.

Jac. Cahagnesius Cadomensis F.

François Ménard, Paris

Note. — L’inscription qui suit, par François Ménard, ne figuraient pas dans l’édition de 1613.

11Immortalitati Sacrum.

Hospes quisquis es, qui Ligeris undas præterlaberis, paulisper immorare. Audi memorabile, admirabile posteris, ac stupendum nepotibus. Heic est ara Victoriæ, heic reparatæ sospitæque Galliæ monimentum et rostrum. Quid hoc rei quæris ? Augustissimum Gallorum Imperium dire atque atrociter lacerabat Britannorum truculenta natio ; jam mœsta rebus nostris infidebat calamitas ; jamque (proh dolor !) consternata tanquam oblisis faucibus infelicem spiritum ægre trahebat Gallia. Dum tot cladibus et funeribus Imperii, Deus ecce Deus pacem dedit insperatam, sed gratissimam, sed diutinis singulorum lachrymis et gemitibus expostulatam. Qui factum istud fuerit, tu subinde quæris ? Audi memorabile posteris stupendum facinus, quod Mnemosyne commendat æternitati. Hæc illa quam vides adgeniculatam Cruci, puella, tantæ felicitatis caput extitit. Illa illa Joanna Darcia nomine pago Domp-Remigia, rustico orta lare, annum agens duodevigesimum, cælestibus missa auspiciis, arma induit, et ex Villana paupercula, fortis Amazon facta inimicas Anglorum copias debellavit, prostravit, fugavit : Hancce urbem Aureliam, in qua belli nutabat alea, longa obsidione cinctam, unica hebdomada exemit, totique Galliæ redivivæ salutarem digitum admovit. Hoc ob immortales gratias perenne sit et æternum ad posteros Gallici Imperii servatrici Joannæ Darciæ positum felicis memoriæ monimentum.

Franciscus Menard Paris.

12Chapitre II.
D’autres Inscriptions faites en vers Latins et François

Nicolas Bourbon, Paris

In mysterium simulachri Aureliæ ponti superimpositi.

Ante Deum supplex, quas, Carole, rebus in arctis

Fudisli tacitas corde loquente preces,

Audierat nullus per sacra silentia testis,

Conscius oranti nec locus ipse fuit :

Has, factura fidem, tibi concita numine virgo

Rettulit, et faciles in tua vota Deos.

Mox eadem fævum bellatrix terruit hostem

Fœminea quatiens arma tremenda manu.

Nunc vos arcani, fallo miracula regno,

Posteritas voti spectat in ære reos.

Borbonius.

Ursin Durant père

In idem.

Carolus hinc supplex, hinc orat Virgo Mariam,

Hic rector regni, reparatrix ista ruentis :

Hic se legitimum ignorans, Jovis alitis instar

Se probat, ad cælos supplex pia lumina tollens :

Ista monente Deo, Regi simul innuit ortus

Legitimos, justisque illi succurrit in armis,

Victoque, Aureliis dedit aurea secla, Britanno.

Urs. Durant P.

Ursin Durant fils

Note. — La première des trois inscriptions d’Ursin Durant fils ci-dessous figurait dans l’édition de 1613, mais a été supprimée dans celle de 1628.

In idem.

Aspice quisquis ades, pacati insignia Regni,

Carolus hinc orans, hinc Darcia Virgo Mariam,

Par utriusque habitus, par sedis honore virago ;

Scilicet ista Dei monitu, secreta retexi

Arcano quæ Rex concepit pectore vota ;

Hinc ope virginea debellat Carolus Anglos,

Et populos in pace regit, monumentaque jussit

Stare memor meriti, pontique perennia fixit.

13In idem.

Gallorum imperium titubat lancis ad instar ;

Christiparæ a dextris stat Rex, qui pondere firmo

Votorum, regni tentat fulcire ruinas :

Christiparæ a læva Gallis non læva Virago

Erigitur, pariter suppliex, atque utilis armis.

At Maria, et media, et mediatrix orat Alumnum,

Et bona Gallorum librantur lancibus æquis.

Urs. Durant Urs. F.

In idem.

Divinum mireris opus, quicunque moraris :

Hæc olim instantis patriæ monumenta ruinæ,

Hæc eadem æternæ spectans constructa saluti.

Rebus in afflictis ubi defecisse videntur,

Fracti equitum peditumque manu gens Martia, Galli,

Se gerit a superis missam pro milite Virgo

Regis in auxilium, et verbis miracula miscet,

Conscia votorum, tacito quæ corde locutus

Rex erat, armatur, pugnat cælestis Amazon ;

Ecce tremunt hostes, uni dant terga puellæ,

Rex populos, unctusque regit, rerumque potitur,

Quisquis es, ut discas nusquam non fidere divis.

Idem.

Adrien Behotte, archidiacre de Rouen

Note. — Cette inscription d’Adrien Behotte ne figurait pas dans l’édition de 1613.

In idem.

Ante crucem, Matris gremio Christumque jacentem,

Carolus, et posito Jana puella genu,

14Armis induti paribus, de more videntur,

Hostibus exactis, solvere vota Deo.

Scilicet amborum pietas, et conscia virtus,

Gallica cunctantes egit in arma viros ;

Et quod Rex nostris exclusit finibus Anglos,

Contigit auspiciis, casta Virago, tuis.

D. Behotte. Arch. Roth.

(Nicolas) Richelet, Paris

In idem.

Si Princeps tuus, et veri sum sanguinis hæres

Legitimus, da signa tuo Deus ultima cælo :

Attritis rebus propior, sic Carolus imi

Pectoris affatu tacito ; Mediamque vocavit

(Virginei cinctus lumen numenque) Mariam.

Darcia, sed monitu cæli, sit conscia verbi

Illius arcani Virgo, Regique retexit

Attonito, facilemque Deum, mediamque Mariam

Spondet, et aversis ruitura Britannica fatis :

Moxque urbem obsessam (primi certa omina belli)

Aureliam soluit, Regemque in sceptra reponit :

Hinc sacra hæc ævo memori monimenta nepotum,

Rex supplex, flexoque genu Galeata Virago,

Christiparæ, ante crucem, solventes munere grates.

Richelet P.

Antoine Mornac

In idem.

Carolus en supplex hac tendit imagine palmas

Ad cælum, fatis crudeliter actus iniquis :

At sperare jubet pavitantem hæc Martia Virgo,

Quæ tacitum, solus quod noverat, ore susurrans,

15Ocyus inde Dei certissima vates,

Antiquo ut solio pulsum, Christo auspice, Regem

Restituat ; stratis, post funera longa, Britannis.

Anth. Mornac.

C. D.

Note. — Toutes les pièces signées C. D. (Charles Dulis) en 1628, étaient signées Alius (un autre) dans celle de 1613.

In idem.

Rex solus supplex hinc, Cur hinc solaque Virgo

Christi-paræ similes fundit uterque preces ?

Quod Rex concepit secretum solus, et ipsa

(Numine divino) scivit, et admonuit :

Quo fultus victor Rex, regno et pace potitus ;

Hoc signum cunctis, post, memor exposuit.

C. D.

Version Francoise.

Le Roy seul d’un costé ; Mais pourquoy la Pucelle

Seule aussi d’autre part, font leur priere telle

A la Mere de Dieu ? C’est pource qu’elle sceut

De Dieu ce grand secret que le Roy seul conceut,

Par le moyen duquel, apres toute victoire,

Le Roy veut ce signal donner à sa memoire.

Le mesme.

Denis Bouthillier, Angoulême

Note. — Les trois pièces en français qui suivent, dues à Denis Bouthillier, figuraient dans l’édition de 1613, et furent remplacées dans l’édition de 1628 par trois nouvelles pièces du même auteur, en latin, reproduites ci-après.

Sous l’image de la Croés et de la Vierge.

Les portraits de la Croés du fils et de sa mere

Sur ce pont eslevez tesmoignent à nos yeux,

Qu’ayant vaincu la mort il nous appelle aux Cieux

Pour vivre bien-heureux au regne de son Pere.

Et ceux de la Pucelle et du Roé inspirés

Par la mere et le fils nous donnent cognoissance,

Que voyans les Angloés qui ravageoient la France,

Ils les ont tant battus, qu’ils se sont retirés.

Den. Bouthillier.

Sous le portraict de la Pucelle.

Tu m’as donné l’advis, saincte mere de Dieu,

Sur lequel nostre Roé travaillé par les guerres

A chassé les Angloés hors de toutes ses terres :

C’est ce que nos portraits font paroistre en ce lieu.

Le mesme.

Sous celuy du Roé.

Saincte mere de Dieu, moé et ceste pucelle,

Tesmoignons à genoux, que ta grande bonté

A chassé les Angloés pour nostre liberté,

Affin que la memoire en demeure eternelle.

Luy mesme.

Denis Bouthillier, Angoulême

Note. — Les trois pièces en latin de Bouthillier qui suivent ont remplacé, dans l’édition de 1628, ses trois pièces en français de l’édition de 1613 (reproduites ci-dessus).

Sub Crucis imagine.

Hæc Nati* simulachra, Crucis Matrisque, Viator

Aspice, et æternam Nati de sanguine vitam

Humano generi quæsitam hinc disce, fruendam

Cælesti in regno Patris. Quid Regis, et istæ

Virginis armæ effigies ? testantur et ipsæ

Cum regnum premerent, a Rege et Virgine, Nati

16Matrisque auspiciis, victos belloque fugatos

In fedes patrias, trepidos remeasse Britannos.

*Iesu Christi

Dionys. Bouthillier J. C.

Sub statua Regis.

Ecce ego, sancta Dei Genitrix, cum Virgine, testor

Natum sceptra tuum, teipsa intercedente, juvasse

Gallica, et expulsos regno, domuisse Britannos ;

Ut tanti meriti æternum celebremus honorem.

Idem.

Sub statua Virg. Aureliæ.

Hanc mihi, Diva Parens, te Nati ex pectore, pando

Inspirasse viam, qua Rex à faucibus Angli

Eripuis Regnum, Pacemque ex Marte reliquit.

Hæc ut nota sient, nostra hic simulachra loquuntur.

Idem.

Louis de Huz, Reims

Note. — Les trois inscriptions qui suivent, par Louis de Huz, ne figuraient pas dans l’édition de 1613.

In imaginem B. Virginis Mariæ.

Hac qui carpis iter pauxillum siste Viator,

Perlege marmorea qua sunt hæc scripta tabella.

Injustis Anglus dum Lilia proterit armis,

Nititur et Salicam Francorum evertere legem,

Divino Christi auxilio, Matrisque Beatæ

Virgnis obtentu, Leucorum e finibus orta.

Armis Virgo potens Jacobi filia Darci,

Regem adit, occultasque preces, nocturnaque sacre

Virginis intactæ mandata iterata recludit.

Hunc sperare jubet, fatalem postulat ensem,

17Hoc ad Martis opus splendentiaque induit arma :

Irruit, irrumpit, funestat cæde Britannos

Agmina prosternens inimica[æ ?], Urbemque propinquo

Liberat excidio. Dehinc hostibus undique fusis,

Armis sternit iter quo Rhemos Carolus iret

Hac duce, qui sumpto tutus diademate regnet.

Quæ facinus narrent venturis nobile sæclis,

Hæc monumenta tuis Rex fuso condidit ære.

Lud. de Huz, Remus.

In statuam Caroli VII.

Carolus indigne sceptro spoliatus avito,

Christi implorat opem, genibusque et pectore flexus,

Ardentique piam Genitricem mente precatur.

Non tulit illa sui vanescere vota clientis,

Nec passa injustæ sceptrum succumbere prædæ.

Virginis auxilio, quam Virgo armaverat ipsa,

Et Regem Regnique decus, Sceptrumque tuetur.

Idem.

In statuam Janæ Virginis.

Christiparæ monitis, et Virginis omine fausto,

Hæc humilis vultu, sed fortis pectore Virgo,

Supra naturam vires animumque ferocem

Gestans, et grassantes infesto Marte Britannos

Expulit, et fractos longe latéque fugavit,

Integra Francigenæ conservans Lilia Regi.

Idem.

Jacques Dorat, archidiacre de Reims

18Sous l’image de la Vierge.

Vierge Mere du Roy, par qui regnent les Rois,

Charles, et la Pucelle, ayant creu tes oracles,

Et fait par ta faveur mille et mille miracles,

Au bon-heur de la France, et mal-heur des Anglois ;

Dessus ce pont fameux, aux pieds de ton image,

Ont posé leur figure, afin que pour jamais

La France tinst de toy sa victoire et sa paix,

Et comme, les François, t’en rendissent hommage.

Jac. Dorat Archid. de Rheins.

Sous la statuë du Roy.

Le Ciel ayant chassé de ma France, Bellonne,

J’ay voulu ma figure élever en ce lieu,

Pour servir de trophée à la Mere de Dieu,

De qui je tiens la paix, la vie et la Couronne.

Le mesme.

Sous celle de la Pucelle.

Orleans, tu ne dois l’heur de ta delivrance

A l’effort de mon bras, non plus qu’à tes guerriers ;

Ains au Fils de la Vierge, à qui toute la France

Doit sacrer, comme moy, sa gloire et ses lauriers.

Le mesme.

J. Sch., Caen

In imaginem B. Virginis Mariæ.

Virgo, ego præsto adsum afflicto tibi, Carole, per me

Ecce tuos hostes altera Virgo fugat :

Contudit hostiles cuneos, victoria parta est :

Et dubitata diu Gallica sceptra refert.

19Virginta hæc per me texit tibi dextera lauros,

Pignora tutela certa futura meæ.

Virgineum decus, arma mihi : sunt Franciæ regna

Virginis auspiciis, Marte recepta tuo.

I. Sch. Cadomensis.

In statuam Caroli VII.

Quid tibi, Virgo parens ? quid, amica Virago, rependam ?

Per quas sunt Regni sceptra recepta mei.

Hic meriti stabunt monimenta perennia tanti :

Posteritas mecum munera vestra colet.

Idem.

In statuam Janæ Virginis.

Carole, quid trepidas ? victus fugit hinc procul Anglus :

En extorta tibi sceptra reporto Patrum.

Define jam tandem mea temnere Virginis arma :

Me armat in hæc missam prælia Virgo parens.

Idem.

Louis Dorléans, Paris

In statuam Caroli VII.

Hic est insignis fama, et præstantibus armis

Carolus, Imperium superis cui missa Camilla

Restituit, florens animis et corpore Virgo :

Gallia, quis posthac tua regna lacesserit hostis ?

Ecce potens Christus magni dominator Olympi,

Armatas tibi dat, queis stent tua sceptra puellas.

L. Dorleans.

20In statuam Janæ Arxeæ.

Hæc est bellatrix, qua Francia turget Amazon,

Cincta armis, et flexa genu, sparsisque decora

Crinibus, atque animis ardens ad prælia Virgo :

Cujus erit nomen semper memorabile terris,

Quod Christo monstrante vias, atque auspice Christo,

Exegit Francis populantes finibus Anglos.

Idem.

Louis de Sainte-Marthe

In eandem.

Dum Salica oppugnat Francorum jura Britannus,

Fœmineam avertens mascula sceptra domum,

Ecce ferox sistit grassantem Virgo tyrannum,

Et jubet arrepta pontum iterare fuga.

I nunc, et Salicam spera delere, Britanne,

Quæ vel fœminea stat rediviva manu.

Lud. Sammarthanus Jac. F.

Ursin Durant fils

Note. — Ces trois inscriptions d’Ursin Durant fils figuraient dans l’édition de 1613, à la suite de celle de Louis de Sainte-Marthe, et furent supprimées dans l’édition de 1628.

In tabellam Virginis Aurel.

Hactenus audenter tulerant, Gens Martia, Galli,

Nescia fœmineo colla subesse jugo :

Prima Britannorum congressa est Darcia turmis

Prima fuit Galli nomine digna Ducis.

Mirum: Quum Salica pugnat pro lege, puellas

Imperio dignas Martia Virgo docet.

Id. Urs. Durant Urs. F.

In statuam Caroli VII.

Non mihi pacati debetur gloria Regni,

Non est pugna meis gesta sub auspiciis :

Sub vobis superi Gallorum signa secutis,

Sub te pugnatum est, Darcia plena Deo.

Liligeros etenim divorum pignus honores,

Non nisi diuina Gallia servat ope.

Idem.

In Imaginem B. Virg. Mariæ.

I celer attritis virgo succurere rebus,

Quæ sola es patriæ digna salute tua.

Impia perdiderat quod iniquo fœmina morsu,

Humanum potui ceu reparare genus :

Sic que fœminea nuper prope corruit arte

Gallia, Virginea restituetur ope.

Idem.

Antoine Leclerc de la Forest, Bourgogne

Sous la statuë de ladite Pucelle.

Dieu s’est servy de moy, qui n’estois que Bergere,

Pour restablir l’estat de la France abbatu,

Plustost que d’une main furieuse et guerriere,

Pour monstrer que par moy luy seul a combatu.

Le Clerc Sieur de la Forest.

Jessé Hermier, conseiller à Caen

Sous la mesme statuë.

Grand Roy, qui commandes aux Roys,

Prestant l’oreille à ta creance,

J’ay chassé le Roy des Anglois,

Et remis Charles dans la France.

21Je t’en presente les lauriers,

Et le trophée et la victoire :

Icy bas les plus forts guerriers

Ne sont qu’instrumens de ta gloire.

Jessé Hermier Cons. à Caën.

François de Féal, Orléans

Sous la mesme.

Ceste ville de l’autre part

Est forte en murs et en rempart,

Mais pardeça elle est plus forte,

Puis que tu en defends la porte.

F. de Feal. Sieur Dall. G. Or.

M. de Gal., Orléans

Sous la mesme.

Le Loire qui de loing d’une vive et claire onde,

Pucelle, par respect te vient les pieds laver,

Va sans cesse portant ton los dedans la mer,

Afin que l’Ocean l’annonce à tout le monde.

M. de Gal. Dam. Orl.

Jacques de Cailly, Orléans

Sous la mesme.

En vain de toy je fay memoire,

Chasse Amazone, par mes vers,

Puis que ce Pont vante ta gloire

Par la France, et par l’Univers.

J. de Cailly Gent. Orl.

En loor de la Virgen Aureliana.

Parate aqui, ô hermano passagero ;

Porque passas de priessa y tan ligero ?

22Mira à estè lugar, honrra y gloria

D’esta ciudad, y de tierras de Lirios :

Mira a nuestra Virgen, y a nuestros rios ;

Y por siempre quedem en tu memoria.

Por el segnor Diego de Cally Gent. Aur.

M. du Halley, avocat-général en la Cour des aides, Paris

Sous la mesme statuë de la Pucelle.

Une femme eust jadis perdu l’humain lignage

En seduisant Adam son Chef et sa moitié,

Si Dieu par une Vierge aussi saincte que sage,

N’eust estendu sur nous de son Fils la pitié.

Catherine eust planté nos Lis en Angleterre,

Nostre Salique loy par armes s’abbatant,

Si Janne la Pucelle en protegeant sa terre,

N’eust l’ennemy vainqueur défait en combatant.

M. Halley Adv. Gen. du Roy en la Cour des Aydes.

Adam Campigny, Orléans

Sous la mesme.

J’ay rendu maints combats, j’ay chassé les Anglois,

J’ay coronné le Roy, j’ay mis la paix en France :

L’Anglois m’a fait mourir à Rouen par vengeance,

Martyr apres ma mort m’ont tenu les François.

Le Roy vangeant ma mort, me fit ce monument,

Et revoir mon procez, pour punir l’arrogance

Des Anglois, qui bruslans la Camille de France,

Luy ont acquis l’honneur pour prix de son tourment.

Adam Campigny Orleanois.

23Chapitre III.
Qu’il n’est besoin d’Inscription.

Étienne Pasquier

Nihil inscribendum.

Muta tabella filet : Janæ nam gesta Puellæ

Nemo referre potest, quo mervere modo.

Steph. Paschasius.

Traduction en François.

Ce tableau porte en blanc de Jeanne la memoire,

Car nul ne peut au vif representer sa gloire.

Est. Pasquier.

Sur le mesme sujet.

Sous un tableau voilé d’un rideau peint, Timante

Representa jadis le dueil dy Roy transi :

D’un plus grand art, Celuy que vous voyez icy :

Sans peinture, l’honneur des François represente :

L’art caché du rideau, vend Timanre ennobly,

L’art du tableau non peint, le fait mettre en oubly.

Le mesme Pasquier.

Abel de Sainte-Marthe

Nihil inscribendum.

Quæ Pater omnipotens alta caligine pressit,

Carolus et Virgo quæ tacuere suis ;

Ardua secreti mysteria pandere facti

Non licet, Hæc veteri relligione latent.

Abell. Sammarthanus Scævolæ fil.

Malherbe

24Qu’il ne faut point d’inscription.

Passans, vous trouvez à redire

Qu’on ne void icy rien gravé

De l’acte le plus relevé

Que jamais l’histoire ayt fait lire :

La raison qui vous doit suffire,

C’est qu’en un miracle si haut,

Il est meilleur de ne rien dire,

Que ne dire pas ce qu’il faut.

M. Malherbe.

C. D.

Pourquoy l’on n’a point mis d’inscription pour la Pucelle.

Cette place estoit trop petite

Pour dédier à son merite

Un Eloge en prose, ou en vers :

La renommée aux bords de Loire

Promit d’en publier l’histoire

Par tous les coins de l’Univers.

C. D.

Simon Marié, vicaire de Chécy

De mesme.

Cette table muette enseigne à tout le monde

La prudence et valeur de ces deux Chefs guerriers,

Plus que par un escrit, où peu de grace abonde,

Au pris de ce pourtraict, qui vaut mille cayers.

Sim. Marié Vic. de Checy.

25Chapitre IV.
Diverses Poësies sur le pourtrait de la Pucelle en habit de fille, tenant une espée en la main.

Charles de La Saussaye, doyen de l’église d’Orléans

Note. — Le chapitre IV de l’édition de 1613 correspond au chapitre V de celle de 1628, et réciproquement.

Virginis os habitumque gerens, sed mascula Virgo,

Virgo, quæ patrium vix pascere norat ovile,

Exigit ense sacro Gallorum et finibus Anglos :

Humana hac potuere manu miracula fingi ?

Idem Car. Sauss.

Ursin Durant fils

Villanæ effigiem Genabi ne crede Puellæ,

Mars, mentito habitu, vel soror ejus erat.

Urs. Dur. Urs. F.

Ursin Durant père

Version.

Vous pensez voir quelque fille mignonne

Aux blanches mains, au poil blond et frizé :

Vous vous trompez, C’est un Mars déguisé,

Ou le pourtrait d’une fiere Bellonne.

Urs. Dur. P.

Ursin Durant père

Note. — Les deux distiques suivants de Durant père ont été supprimés de l’édition de 1628.

Telle en armes estoit, ceste Vierge guerriere :

Telle estoit desarmee, en habit de Bergere.

Le mesme.

Obsidione urbem quam Rex non liberat armis,

Liberat hanc armis una Puella suis.

Idem.

Charles du Lys

Note. — Le distique suivant de Charles du Lys a été supprimé de l’édition de 1628.

Qua Virgo ? sed virgo tamen : Romana ? togata est,

Sed mage Romanam mens animosa facit.

Alius.

Claude Colin, Caen

Barbare, Francorum Regalia Lilia quæris ?

Si capi, eripit hæc ense Puella tibi.

Cl. Colin.

Jacques Favereau, Saintonge

26Ad Proceres Galliæ.

Vos Patriæ, quibus est animo reparare caduca

Lilia, nutantemque armis firmare Coronam,

Magnanimi Proceres, Mavortia pectora, Franci,

Non opus id vestrum est, curam hanc dimittite, gaudent

Virginea tantum tractari Lilia dextra.

Jac. Faverellus cogn. Santo.

J.-L. Fabrot, Provence

Immortalitati ejusdem Virginis.

Cura Deum quondam, infœlix quid Gallia mœret ?

Quid capitis tristi est pulvere fœdus honor ?

Prælia quidve inter, Virgo, media emicat ardens ?

Ah ! fine magnanimis Martia tela viris ?

Gallia parce magis sortem vexare querelis,

Et modo præsentes sollicitare Deos.

Casta placent Cœlo, advenit tibi casta puella,

Virginea, ut reparet Lilia casta, manu.

I. L. Fabrotus Provinc.

Note. — Les quatre derniers vers de cette pièce, présente uniquement dans l’édition de 1628, reprennent un quatrain signé de Peyresse dans l’édition de 1613 : voir.

Charles-Annibal Fabrot, Aix-en-Provence

De eadem Virgine.

Fœmineæ proli Gallorum Sceptra negari

Ignoras, Orbem qui colis, Angle novum ?

Aureliæ quando cœpit te Dextra Puellæ

Vincere, lis cecidit judice victa suo.

Car. Hannibal Fabrottus J. C. Regius Aquensis Prof.

Jacques de Cailly, Orléans

Incedit simplex, armata sed ense, puella ;

Virginis effigies, Martis imago tamen.

Jac. de Cailly.

Antoine Loisel

27O quam te memorem Virgo ? Namque aut tibi virtus

Mortalis, nec mens hominem sapit : O Dea certe.

A. Oisel. ex Virgilio.

Nicolas Bergier, Reims

Francia quod Gallos, quod non regat Anglia Francos,

Utraque virtuti debet utrumque meæ.

Bergier Remus.

Regali auspicio, teneræ ductuque puellæ,

Gallia servata est Francis, erepta Britanni.

Idem.

Jean-Louis Fabrot, Provence

Notes. — Distique de Jean-Louis Fabrot supprimé de l’édition de 1628.

Quanta Deus pro Franco edit miracula Regno,

Ecce insperatam parit illi virgo salutem.

Idem J. L. Fabrotti.

C. D.

Hæc Amaryllis erat Franci per pascua ruris,

Hasta pedum, Gallus grex, lupus Anglus erat.

Id. C. D.

Quum pendet natura, virum faciatne Puellam ?

Ambiguo Genio, pene Puella vir est,

Idem.

Louis de Sainte-Marthe

Notes. — Sizain de Louis de Sainte-Marthe supprimé de l’édition de 1628.

Sequanus hinc tua regna, hinc occupat illa Britannus,

Durus uterque hostis, sed mage durus Amor :

Heu Carle, ut positus langues ad colla puellæ,

Nequitiæque jaces maxima præda tuæ !

Sic pudor, et cum ipso cecidissent arma pudore,

Ni pudor armatæ virginis arma daret.

Id. Lud. Sammarthanus.

Nicolas-Claude Fabri de Peiresc, Provence

Notes. — Quatrain de Peiresc supprimé de l’édition de 1628, mais qui forment les quatre derniers vers d’un huitain signé Fabrotus : voir.

Gallia, parce vagis sortem vexare querelis,

Et modo præsentes sollicitare Deos :

Casta placent Cœlo, tibi missa est casta Puella ;

Virginea ut reparet Lilia casta manu.

Id. de Peyresse.

Jean Hordal, Lorraine

Notes. — Huitain de Jean Hordal supprimé de l’édition de 1628.

Credidit Anglorum quondam tumefacta propago

Vallesium Franco tollere ab orbe genus :

Sed Deus attriti miserans incommoda Regni,

Fortia virgineas misit ad arma manus.

Et qui vix alias cessere virilibus armis,

Fœmineo victi colla dedere jugo.

Ergo puella viro vel Gallica fortior Anglo est.

Ast hæc divina fœmina sortis erat.

Id. J. Hordal.

Mlle de Gournay

Pourquoy portes-tu, je te prie,

L’œil doux, et le bras foudroyant ?

Cet œil mignarde ma patrie,

Ce bras chasse l’Anglois fuyant.

La Dam. de Gournay.

Jacques de Cailly, Orléans

Cartel de dessi,
Pour maintenir les perfections de la Pucelle.

Je suis errant, Cavalier, par le monde,

Tantost sur terre, et tantost dessus l’onde ;

Et en un mot, pour le faire plus court,

28Je suis exprés venu en ceste Court,

Pour publier à tous que la Pucelle

Estoit pour vray la plus sage, et plus belle

De ceste Cour : Je le veux maintenir,

Et ce cartel contre tous soustenir.

Paroisse donc qui dira le contraire ;

Me voicy prest, et trop, pour luy déplaire,

En luy donnant un honteux démentir,

Et par la mort l’en faire repentir.

J. de Cailly.

Bergere, Pucelle guerriere,

J’ay nourry, dompté, terrassé,

Mon troupeau, l’orgueil, et chassé,

D’herbes, des Anglois, la gent fiere.

Le mesme.

Quando su tratta giu nel fiume.

Se tu vuoi far cosa molto grata

Agl’ Aurelianesi, e prima a Dio,

Restituicci il nostro Palladio,

Lasciandol’ sempre in sua, Citta amata.

Il medes. Giac. de Cagly.

Sobre su retratto dado a un amigo fuyo.

Esta Virgen y donzella

Os offresco, io y ella :

No es chica la dadiva,

De quien os da una Diva.

29Es presente comedido,

Y tambien es prometido.

Por el mesmo Señor.

Philippe Lours, curé de Chécy

Sur ce que la Pucelle arriva au bourg de Checy, avant que d’entrer à Orleans.

Par ton abord tu as cette terre ennoblie,

Jehanne, nous visitant comme amis des premiers :

Qu’il ne soit jamais eu qu’en ce lieu l’on t’oublie,

Et qu’à chanter ton nom nous soyons des derniers.

Ph. Lours Curé de Checy.

Note. — Le chapitre dédié aux œuvres sur le portrait de Jeanne en robe (chapitre V de l’édition de 1613) se clôturait par deux pièces numérologiques de Claude Christophorin. Dans l’édition de 1628, la première a été déplacée dans le second volume, la seconde supprimée, et une nouvelle pièce ajoutée après la première. : voir.

Chapitre V.
Autres Poësies sur le pourtrait de ladite Pucelle armée, et à cheval

Charles de La Saussaye, doyen de l’église d’Orléans

Darcia perdomitos talem se extollit in Anglos,

Spumantemque insignis equum media agmina rumpit

Insiliens, audensque viris concurrere Virgo.

Quicquid id est, versam Gallerum hæc restituit rem.

Idem Car. Sausseius.

Antoine Loisel

In equestres Clœliæ Romanæ, et Darciæ Francæ virginum statuas.

Martia dicatur potius cui Darcia nomen,

Ac Francæ Thuscum Clœlia cedat equum

30Clœlia fraude suos servat, vi Darcia dextræ ;

Hostiles turmas hæc fugat, illa fugit.

Idem Ant. Oisel.

Antoine Mornac

In idem.

Clœlia prisca tibi cedat, divina Virago,

Quæ mucrone minax velut altera surgis Amazon :

Illa hostes, Tybrim tantem tranando, fefellit ;

Sed fuit incolumis tandem, te vindice, Gallus.

Idem Ant. Mornac.

Louis Quatrehommes

Johannæ Darciæ cum Quintio collatio.

Vintius a curvo per te revocatus aratro

Hostes exegit, Roma superba, tuos :

Darcia Franciadum depellit finibus Anglos,

A pastorali dum capit arma pedo :

Sed longe superat te, Quinti, Darcia Virgo :

Namque vocatus ades, sponte sed illa venit.

L. Quatr’hommes F.

Ursin Durant fils

Note. — Le quatrain qui suit figure sous la forme de deux distiques dans l’édition de 1613.

Martis an effigies hostile ruentis in agmen ?

Virgineos habitus Martis imago tegit.

Ne rigidum pingi credas hoc schemate Martem,

Villana hæc Genabi dicta Puella fuit.

Idem Urs. Durant F.

Ursin Durant père

Version.

Non, ce n’est point l’image naturelle

Ou de Bellonne, ou de son frere Mars,

Ces Gantelets, ce Casque et ces Brassars,

Sont le portrait de Jeanne la Pucelle.

Urs. Dur. P.

Pierre Patrix, Caen

31Lors que cette jeune Pucelle,

Pour nous remettre en liberté,

Avec tant de facilité

Vous chassoit ainsi devant elle ;

Ses armes cachoient ses habits,

Ce n’estoit rien q’une Bergere :

Anglois, qu’eussiez-vous peu moins faire,

Si vous eussiez esté brebis ?

P. Patris Gent. de Caën.

Mlle de Gournay

Ja cent peuples lointains de gloire ambitieux,

Accouroient au secours de la France opprimée ;

Soudain comme un tonnerre on oyt ce cry des Cieux :

Peuples, reposez-vous, la Pucelle est armée.

La Dam. de Gournay.

Annibal de Lortigue

Qui void cette Pucelle armée,

Qui fut de courage animée,

Quoy qu’elle ayt un aspect benin,

(S’il entend le mestier des armes)

Juge que le Dieu des allarmes

S’est mis en un corps feminin.

Ann. de Lortigue.

Jacques Favereau, Saintonge

Notes. — Les deux premières pièces de Jacques Favereau ont été supprimées de l’édition de 1628.

Quod sexum mentita fui, quod castra sequuta,

Non ideo rebar vivere casta minus.

Cessit in invidiam pietas, damnosaque virtus

Traxit in exitium sontia jura meum.

Quod si turpe adeo nobis minimeque decorum

Imbelli braccas præposuisse peplo.

Dedecus hoc natura ferat cum crimine, quæ me

Magnanimam, non me jusserat esse virum.

Nam quid agant reliquæ, qua incedant veste, quid ad me

Plus est, quam sexus, patria terra mihi.

Idem Jac. Faverellus.

De eadem.

Huc Jovis e cerebro Jana est nova missa Minerva

Faustum Palladii numen et omen habens.

Trojugenæ servate Deam, ne incendia rurfus

Hostica cum vestro numine cuncta crement.

Idem.

Jacques Favereau, Saintonge

In duplicem Janæ Virginis effigiem.

Pinxerit hic Janam sub amictu Martis, an ipsum

Sub Janæ peplo pictor Enyalium,

Quæritis : haud nostro res est dirimenda lapillo,

Judicium hoc vobis Anglia sola feret.

Idem Jac. Faverellus.

32De Janæ Virginis habitu.

Quærebat princeps cum Jana subiret in hostem,

Virginis an speciem ferret, an illa viri ?

Hac ego veste domi, dixit, comes ibo puellis,

Tecum cuncta lubens Mars mihi ferre jubet.

Idem.

Charles de La Lande, Orléans

Notes. — L’unique pièce de Charles de La Lande a été supprimée de l’édition de 1628.

Quæ sexus leges virgo superavit adulta,

Hæc Regni leges flectere sola potest.

Regni lege, viri tantum; ipsa puella parentes

Cujusuis sexus, nobilitare potest.

Car. de la Lande Aurel.

Claude Boitet, Orléans

Notes. — L’unique pièce de Claude Boitet a été supprimée de l’édition de 1628.

Virgo potens Anglis, naturam fallit, in hostem

Dum ruit, hæc sexu fœmina, virque animo.

Fallit naturam, cum ipsam quæ fronte puella est,

Fallaci genio quis putat esse marem.

In bello non lenta coma, non anxia laudis

Ornandi crines quærit ab arte modos.

Sed diffusa levi sparsim coma fluctuat Austro,

Quam galeæ, in pugnam dum ruit, instar habet.

Non mirum : Potuit naturam fallere, et hostem ;

Nutu, quum pugnat Virgoque Virque, Dei.

Cl. Boitet Aurel.

Jacques Dorat, archidiacre de Reims

Notes. — Sonnet de Jacques Dorat supprimée de l’édition de 1628.

A la pucelle d’Orleans, Sonnet.

Amazone du Ciel, qui sur le bord de Loyre,

Pour accomplir de Dieu l’expres commandement,

Au bon-heur des François donnas commancement,

Et fis de leur costé retourner la victoire.

Malgré du fier Anglois la mensongere histoire,

Qui ton nom et tes faits à tort va diffamant,

La verité partout ira les renommant,

Et les siecles suivants celebreront ta gloire.

Vivant au camp de Mars tu fis mourir Cypris,

Mourant dedans le feu ton Cœur n’en fut espris,

Ta mort donna la mort aux ennemis de France.

Et d’un injuste arrest, les traits injurieux

Rendirent ton renom beaucoup plus glorieux,

Et plus que le Soleil claire ton innocence.

Le mesme Dorat.

Claude Colin, professeur de grec au Collège du Mont, Caen

Barbare, quid tentas Francorum invadere regnum,

Quod Deus et sancta cum Cruce Virgo regit ?

Non armis unquam, non ense subegeris illud,

Viribus invictum efstl perpetuumque suis.

Si temere accedas, propriis non indiget armis,

Intrepide quamvis monstra domare queat.

Prosiliet Pallas telis armata trisulcis,

Nata Jovis cerebro totaque plena Jove :

Pallas et hæc Jana est, que quondam e faucibus hostis

Eripuit Gallos casta puella viros.

Cl. Colin. Græc. lit. Profess. Reg. Cadomi.

C. D.

Note. — Aux côtés des deux distiques de Charles du Lys en figuraient trois autres dans l’édition de 1613.

Talis erat vultus victricis virginis, annos,

Armaque non animum, picta tabella refert.

Alius.

Picta tabella refert vultum victricis et arma,

Virtutem referunt Virginis acta Deo.

Idem.

Hæc Jovis a cerebro est, hæc est armata Virago,

Aureliæ si sint Attica, Pallas erit.

C. D.

Mars Pallasque olim se perdit uterque, sed ecce

Unde suum numen quærere, uterque potest.

Alius.

Mars corde et vultu, Mars est pedibusque manuque,

Sed ne Mars toto pectore, sexus obest.

Idem.

Louis Quatrehommes

De Janæ Darciæ statua.

Cæsar Alexandri spectans de marmore vultus,

Fletibus et lachrymis parcere vix potuit :

33Ast aliud facient Janæ monimenta puellæ,

His visis, certe fleret uterque simul.

I. L. Quatr’hommes F.

Version.

Le grand Cesar voyant d’Alexandre l’image,

Jaloux de son bon-heur se mit à souspirer :

Mais ce grave pourtrait avoit cet avantage

Sur tous deux, sçavoir est, de les faire plorer.

I. L. Quatr.

Mlle de Gournay

De la mesme Janne Darc Pucelle d’Orleans.

Le souverain par une auguste loy

Releve l’humble, et l’orgueilleux terrace :

Humble et vaincu Jeanne releve un Roy,

Et du Vainqueur elle atterre l’audace.

Lad. Dam. de Gournay.

Annibal de Lortigue

De la mesme.

Pallas sage et forte Deesse

Voyant nostre France en destresse,

Et Charles septiesme abbatu,

Arma ainsi cette Bergere

D’une tant celeste vertu,

Pour vaincre une gent effrangere.

I. Hannibal de Lortigue.

34Chapitre VI.
Autres Poësies pour servir d’Epitaphes à la Pucelle d’Orleans

Thomas de Troismonts, conseiller du roi à Caen

Epitaphium Janæ Darciæ.

Francia bellaci frontem circumdata lauro,

Quæ victrix toties, dudum quæ nescia vinci,

Strata jacebat humi, diris et saucia telis,

Cæde madescentem plangebat pectore terram :

For scelus intulerant violento Marte Britanni.

Strenua cum Virgo divino numine missa.

Adstitit, et mœsto retulit læta omina Regi :

Protinus æde sacra, regali flore decorum

Eduxit gladium, inque adversos irruit hostes ;

Oppresum Genabum longa obsidione resoluit,

Castraque diripuit, captas urbesque recepit

Innumeras, Patriam ferro flammisque cadentem

Restituit, Regemque suum diademate cinxit.

Vota Deo soluit domitis Rex Carolus Anglis,

Ac dedit armigeræ virtutum flemmata Janæ :

Gallia discinxit Lauros, Capitique comantes

Virginis adjunxit : jam perstant omnia læta.

At pia Virgo jacet flammis lethalibus ustat

Non jacet ! in tenues corpus convertitur auras,

Ac repetit cœlum, que terras Diva reliquit :

En ! restant Genabi claræ monumenta puellæ.

Th. Trismontius Reg. Cons. Cadom.

Étienne Le Fanu, Caen

35Pro tumulo Janæ Darciæ, Virginis Aurelianensis merito dictæ, Prosopopœia.

Falleris, Angle, (Scytha quovis crudelior) armis

Si invictam, flammis occubuisse putas :

Numinis afflatu, victricia cœpimus arma,

Hoc duce flagrantes vicimus igne rogos.

Phœnicem ut propria redivivam cerne favilla,

In caput ista tuum victima procubuit.

Virginis auspiciis Regalia Lilia florent,

Gallorum e spoliis jam tibi nil superest.

Darcia te indomitum sudit generosa Virago,

Cuique nega tumulum, Gallia tota dedit :

Hic ubi me flammis torsit crudelibus hostis,

Exiliunt latices limpidioris aquæ :

Salicet uberibus lacrymis me Naïades ipsæ

Deflent, et lethi tristia fata mei.

At Genabum nostris dura obsidione solutum

Armis, me armatam vivere in ære facit.

Annua quæ Aureliæ celebrant soteria cives,

Me licet extinctam posse perire negant.

Delete gentis prisci cognomina fumant,

Servatæ Aureliæ nomen habere juvat.

Idem. Steph. Fanutius Cadom.

Abel de Sainte-Marthe

Pro tumulo ejusdem.

Quisquis es, armatam intrepida qui fronte puellam

Conspicis, et sacro solemnes ordine pompas ;

Ne mirare, sero si Virgo accingitur ense,

Pectore si forti prime crudelia pugnæ

Funera committit, si mœnia diruit, hostes

36Fundit augustum victricibus asserit armis

Imperium ; fatis fuit olim debita Virgo

Et Regi et Patriæ, dum publicus irruit hostis,

In sua convertit dum Gallia viscera ferrum :

Ac licet insonti tot crimina finxerit Anglus,

Et rapidæ teneros flammæ subjecerit artus

Virginis, et cinerem in tenues disperserit auras ;

Non tamen absumpta est, vivo sed ab igne resurgens,

Ætherias Virgo fœlicior incolit arces.

Fortunate cinis, te, dum per inania pendes,

Leniter excipiunt, et amico flamine, sensum

Aurarum suaves anima super aëra tollunt.

Sancta anima a cœlo divinitus acta, beatis

Concipis æternum dum casta sub offibus ignem,

Despicis humana peritura incendia flammæ.

Abel. Sammarth. Scæv. F.

Jacques Favereau, Saintonge

Janæ Virginis, et Mutii Scævolæ comparatio.

Communi, Jana et Mutius, pietate feruntur

Pro Patria jussum sponte subisse focum.

O fortes : verum tanto plus laudis in illa est,

Quanto Virgo minus creditur esse viro.

Idem Jac. Faverellus.

De eadem.

Non ego clam Regem, non castra inimica petiui,

Cedat ut in pœnam flamma repente mihi.

Sed quod mutata Patriam defendere veste

Quæratur capiti maxima noxa meo.

37Debuerat nobit judex Porsenna fuisse,

Si Mutio, certe parceret ille mihi.

Idem.

Le pièce est introduite par De eodem dans l’édition de 1613.

Phœnicis avis, et Janæ Virginis collatio.

Huc veniat, quicumque meo super arida busta

Exemplo Assyriam cernere possit avem.

Illa ego sum Phœnix et mas et fœmina, possunt

Cui dare non aliam sæcula multa parem :

In qua tota meæ constat reparatio gentis,

Quæque mihi ætates mollior innumeras,

Tempus adest quo vita mihi moriendo paranda est,

Et cogor proprium scandere viva rogum.

Vos flammæ, quod restat adhuc mortale per artus

Urite, mox cineri sum rediviva meo.

Idem.

Jean Hordal

Note. — Huitain latin de Jean Hordal, supprimé de l’édition de 1628.

Consilio firmata dei Lotharinga virago,

Quæ Regi et Gallis attulit auxilium,

Quæ priscos hostes Gallorum finibus Anglos

Ejecit, Regi Regnaque restituit.

Tandem quum superis morem gessisset, ab Anglis

Ignivomo periit tradita virgo rogo :

Fallor non periit, nec enim periisse putetur,

Quæ victura polo, vivere cessat humi.

Id. J. Hordal.

Note. — Suivait un autre poème du même, Aliud ejusdem, déplacé dans le second volume, parmi les poètes lorrains, voir.

Jean-Louis Fabrot

Note. — Distique de Fabrot, supprimé de l’édition de 1628.

Vertitur in cineres Virgo, quod mente Deorum

Instaurat Patriam, que fuit ante cinis.

Id. J. L. Fabrotti.

Louis Quatrehommes

Janæ Darciæ Epitaphium.

Haud secus ac purum Phœnix se mittit in ignem,

Ut propriis iterum pullulet exequiis.

Vivat ut æternum sic uritur Arcia Virgo :

Nec mirum, Phœnix gentis et illa suæ est.

J. L. Quatr’hommes F.

Aliud.

Quæ fuerim quæris ? Mars, non mas, Virgo, Virago,

Arma ego pro Gallis casta puella tuli.

Pro Patria perii, sed mors mihi dulcis habetur,

Cum sim funeribus mox recidiva meis.

I. L. Quatr’h.

Jacques de Cailly, Orléans

38Aliud.

Virgo, Dux, Mater, Divis, virtute, periclis,

Igni, Hosti, Patriæ, sacra, cruenta, pia.

Idem J. de Cailly.

C. D.

Aliud.

Nec magis obscure nasci, nec clarior armis

Vivere, nec poterat claris ipsa mori.

Idem C. D.

Thomas Billon, Provence

Immortali memoriæ
illustrissimæ Virginis Heroinæ
Johannæ Darc.

Anagrammatice.

IOANNA DARC VIRGO.
DIGNA CORONA AVRI.

Digna corona auri duplici : Quarum altera jure

In terris danda est, altera danda polo.

Illa quod bello victrici dimicat ense,

Ista quod intacta virginitate micat.

Tho. Billoni Provinc.

Jessé Hermier, conseiller du roi à Caen

Note. — Poème de Jessé Hermier, supprimé de l’édition de 1628.

Manibus Virginis Aurelianensis.

Huc quicunque manum profers oculumque viator,

Funde oculo lacrymas,Lilia sparge manu.

Non liber est, quod cernis opus, non munera Phœbo

Sacra, nec auspiciis fama secunda tuis.

Urna est, quæ sanctos manes complectitur, atque

Quod reliquum virgo nomen habere potest.

Heu nomen! quod edax etiam consumpserat annus,

Tantæ immortalis ni foret umbra Deæ.

Si vis hanc urnam fer tecum, aperique, viator,

Et dic, quod voluit jam Deus illa fuit.

D. Hermier Reg. Cons. Cadomensis.

Claude Colin, Caen

Note. — Poème de Claude Colin, supprimé de l’édition de 1628.

Jana ego sum, cujus ductu Rex Carolus olim

Restituit Gallis Lilia rapta fuis :

Auspicibus tamen his, Christo Cruce, virgine matre,

Est procul hostilis fusa fugata manus.

Nec sine Diis fieri quidquam arbitrare viator,

Insperata Deus singula quæque levat.

Id. Cl. Colin.

Ursin Durant père

Ejusdem Darciæ Epitaphium :

Hanc Deus, antiquos patriæ labentis in hostes

Armavit : sagam dixere ; hoc nomine victi,

Prætexuntque fugas, injustaque busta Puellæ.

Idem Urs. Durant P.

Virgo, viris fractis armatur, vicit : et hostes

Flammis, quam bello non potuere, necant.

Idem.

Ursin Durant père

Notes. — Deux autres distiques de Durant père ont disparu de l’édition de 1628.

Regem, hostesque suos geminæ vicere Puellæ,

Una procax oculis, hæc generosa manu.

Idem.

Disparibus telis geminæ vicere Puellæ,

Illa oculis regem, fortes hæc ense Britannos.

Idem.

Jacques Favereau, Cognac, Saintonge

Notes. — Distique de Jacques Favereau supprimé dans l’édition de 1628.

Una puella mihi quantas averterat urbes,

Restituit tantas una puella mihi.

Jac. Faverellus cogn. Santo.

Malherbe

39Sur la Pucelle d’Orleans bruslée par les Anglois.

L’Ennemy tous droits violant,

Belle Amazone en vous bruslans,

Témoigna son ame perfide :

Mais le destin n’eut point de tort ;

Celle qui vivoit comme Alcide

Devoit mourir comme il est mort.

M. Malherbe.

Ursin Durant père

Version Latine.

Perfidia hostili formosa cremaris Amazon,

Sed nec id injusta sors ratione tulit.

Que velut Alcides exegerat omnia vitæ

Munia, debuerat sicut et ille mori.

Idem Urs. Durant P.

Thomas Billon, Provence

Autre version Latine.

Gens inimica tibi quod te damnaverit igne,

Perfidias testes reddidit illa suas.

Mortis iniqua equidem causa, at genus illius æquum.

Sic error fato nullus inesse potest,

Quas velut Alcides medios invicta per hostes

Vixit, ut Alcides debuit illa mori.

Idem Th. Billoni.

François de Cauvigny, sieur de Colomby, Caen

Prosopopée de ladite Pucelle.

Vivant comme un Hercule aux combats indonté,

Des mains du fier Anglois j’ay la France ravie :

Je suis morte innocente, en ma virginité ;

Est-il plus belle mort, ou plus heureuse vie ?

Fr. de Cauvigny Sieur de Coulomby.

Jacques Dorat, archidiacre de Reims

40Pour Epitaphe de ladite Pucelle, Sonnet.

L’Amazone Scythique, aux bords fameux de Xanthe,

Tant d’armes ne fit pas, combattant les Gregeois,

Que celle de la France, abbattant des Anglois,

En cent combats divers, la fortune insolente.

La Scythienne aussi n’estoit pas si vaillante,

N’alloit pour sa patrie aux belliqueux exploits,

N’avoit pour compagnons ces genereux François,

Qui méprisent de Mars l’ire plus violente.

Pentasilée en vain se perdit, et les siens,

Pour soustenir le rapt des trompeurs Phrygiens,

Que les Grecs fous Pallas à la fin surmonterent.

Mais Jeanne sous Jesus son pays garentit ;

Et quand l’injuste effort des feux elle sentit,

Les flammes comme Hercule au Ciel la transporterent.

Jac. Dorat Arch. de Rh.

Jacques Dorat, archidiacre de Reims

Note. — Quatrain du même Dorat, supprimé de l’édition de 1628.

Si dedans la flamme homicide

Tu reçois une injufte mort,

Tu as aussi d’un sainct effort

Dompté plus de monstres qu’Alcide.

Luy mesme.

Alexandre Bouterouë, Paris

Sur la mort de la Pucelle.

Ta valeur, ta candeur, ô guerriere Pucelle,

Elevoient vers le Ciel ton cœur devotieux :

Tu devois donc mourir dans la flamme cruelle,

Le plus pur element, et le plus prés des Cieux.

Le mesme Bouterouë.

J. Legrand, sieur de Briocourt, avocat du roi au présidial de Chaumont

Pour le tombeau de la mesme Pucelle, Sonnet.

La France n’estoit plus que l’ombre de la France,

Son cœur estoit failly, ses membres presque morts,

Et ne nous restoit plus que le nom de ce corps

Que l’Anglois estranger avoit en sa puissance.

41Jeanne de Domp-Remy, la seule delivrance

Des François asservis, qui dompta les efforts

Des Bretons impiteux, qui regnoient les plus forts,

Fait revivre ce corps, et luy donne allegeance.

Mais helas ! comme elle eust ranimé cet Estat,

Elle ressent l’effet d’un meschant attentat,

Innocente au milieu d’une cruelle flamme.

Ah ? Anglois, tu te trompe, Elle n’en mourra pas ;

Il faudroit que la France eust souffert son trespas :

Car la France est son corps, comme Jeanne est son ame.

J. le Grand Sieur de Briocourt Adv. du Roy au Pres. de Chaumont.

Isaac Habert, Paris

La Pucelle d’Orleans.

Les Anglois de regner et piller allechez,

La France ravageoient : mais si tost que par grace

Dieu ma dextre choisit pour punir leur audace,

De paniques fureurs leurs cœurs furent touchez.

Ces loups de forme humaine, ennemis conjurez

Des François, me voyant en armes, s’enfuyrent,

Leurs Chefs espouvantez, en desordre se mirent,

Ainsi que perdreaux par la crainte égarez.

Eux qui s’attribuoient le Royaume François,

Sentant dessus leur dos la divine vengeance,

Bornerent dans Calais leur debile puissance,

Quittant ce qu’ils tenoient injustement, aux Roys.

Desesperez, contraints aux ruses recourir,

Usant de trahison qui leur est coustumiere,

Ils me firent surprendre, et me nommant sorciere,

Laissant vivre leur honte, ils me firent mourir.

42Mais malgré leur mensonge et fiere cruauté,

Mes exploits, ma vertu, ma valeur redoutable

Seront eternisez dans l’Histoire durable,

Autant que les effets de leur deloyauté.

Toy qui va recueillant les renaissans fleurons

Dedans la verité des actes de ma vie,

Malgré mes ennemis, et leur mortelle envie,

Un renom immortel toy et moy nous aurons.

Habert P.

J. Roussel, avocat au parlement

Sur le cœur de la Pucelle qui ne peut estre consommé par le feu.

Ce corps si merveilleux qu’aux flammes l’on expose,

Se void en peu de temps fierement ravagé,

Tant seulement son cœur n’en est endommagé ;

Est ce point qu’un grand cœur surmonte toute chose ?

Son cœur est si brulant de l’amour qu’elle porte

A Dieu, son cher Espoux, qu’il ne faut s’ébahir

Si déja possedé d’une flamme si forte,

Celle d’un moinde [moindre] feu ne le peut envahir.

Il est vray que l’effort du charbon allumé

Ne donne à l’or bien pur si peu que soit de tare :

Ne vous estonnez donc si ce cœur que rempare

Le pur or des vertus, n’est au feu consommé.

Que ce feu soit ardent, qu’il petille, et embrasse

De tous endroits ce corps, et l’aille consommant,

Si est ce que son cœur ne le craint nullement :

Car il est trop avant dans les eaux de la grace.

Le feu devovera ce beau corps en peu d’heure :

Mais il ne touchera toutesfois à son cœur ;

43Demandez-vous pourquoy ? C’est qu’à son Createur

Il porte ce respect d’épargner sa demeure.

Des charbons allumez jadis l’attouchement

L’espreuve estoit du crime, ou bien de l’innocence ;

Il paroist en ce cœur que le feu point n’offense,

Pourquoy ? sinon qu’il est condamné faussement ?

J. Roussel Adv. au Parl.

Jacques Dorat, archidiacre de Reims

Qu’il ne faut point de tombeau pour la Pucelle, Ode.

Icy bas ne gist la Pucelle,

Qui conserva le champ des Lis :

La terre n’est digne de celle

Qui meurt pour sauver son pays.

Aussi comme du fort Alcide,

Ayant maints Tyrans surmonté,

Par la flamme, son homicide,

L’esprit fut dans les Cieux porté.

Ainsi son innocente cendre

Les Zephyrs porterent en l’air,

Où Junon la daigna bien prendre,

Et sur tous les Cieux l’estaller.

Son cœur genereux et pudique,

Qui des feux brava le pouvoir,

Comme une offrande magnifique

Neptune voulut recevoir.

Son renom seul reste en la terre,

Et ses lauriers victorieux,

Autant honteux à l’Angleterre :

Qu’ils font aux François glorieux.

44Puis donc que de ce petit monde

Les parts (miracle bien nouveau)

Sont au Ciel, en l’air, et sur l’onde,

Qu’a-elle affaire de tombeau ?

Le mesme Jacq. Dorat.

Chapitre VII.
Autres Poësies sur le nom, la noblesse, et armoiries que le Roy donna à la Pucelle, et à ses freres

Étienne Le Fanu, Caen

De nomine, genere et insigniis Janæ Darciæ, Lilietum.

Falleris, Angle, meam falso si judice famam

Criminibus falsis succubuisse putas :

Carolus ecce nova voluit me luce potiri,

Cum genus instituit nobilitare meum :

Quodque negatum aliis, nostra de gente nepotes

Materna jussit nobilitate frui.

Ense coronato fulgent insignia nostra,

Junctaque stemmatibus Lilia bina meis :

Lilia quæ nostræ nunc sunt cognomina genti,

Lilia, quæ famæ sunt monumenta meæ.

Idem Steph. Fanutius.

Étienne Pasquier

De insigniis dictæ Janæ Darciæ.

Quæ fuerint nobis insignia, quæritis ? Ensem

Jana coronatum, Lilia bina tuli :

45Vos violis ornate comas, myrtisque puellæ,

Lilia sola placent, ensis et arma mihi.

Steph. Pasquasius.

Version.

Charles mon bon Roy, pour mes armes j’ay pris

Le glaive couronné avec la fleur de Lis.

Est. Pasquier.

Nicolas Bergier, de Reims

Pourquoy la Pucelle nommée Du Lis.

Lilia servavi, mihi dant hinc Lilia nomen :

Lilia nobilitant meque meamque domum.

Idem N. Bergier.

Ursin Durant fils

Note. — Le quatrain qui suit figure sous la forme de deux distiques dans l’édition de 1613.

De mesme.

Villica sorte fuit, cœlestis numine Regis

Regia, fert Regi fortis Amazon opem.

Stemmata Francorum, nutantia Lilia, bello

Erigit, inque suum, Lilia, nomen habet.

Idem Urs. Durant F.

Ursin Durant père

Version.

Elle estoit villageoise, et par l’Esprit de Dieu

Royale elle devint, envoyée en ce lieu

Pour redresser les Lis, les Lis armes de France,

Que son vieil ennemy avoit presque abbatu :

En fin apres avoir vaillamment combatu,

Prendre le nom Dulis, ce fut sa recompenfe.

Idem Urs. Durant P.

Thomas de Troismonts, conseiller du roi à Caen

46Des Armoiries de la Pucelle.

Pucelle, dont le bras sauva toute la France,

En domtant les efforts des superbes Anglois,

Pouvois-tu esperer plus belle recompense

Que la Couronne d’or, ex les Lis de nos Roys ?

Ta lame vengeresse aux ennemis fatale,

Qui releva l’honneur et le sceptre François,

Portera desormais la Couronne Royale

Au milieu de deux Lis ; Les Roys n’en ont que trois.

Le mesme Th. de Trois-mont.

Jacques Dorat, archidiacre de Reims

De mesme.

La Couronne et les Lis, dont se parent nos Roys,

Sont deux, à ton espée, ô Pucelle admirable :

Car le Ciel par tes coups, les rendit aux François,

Et chassa d’Albion l’orgueil intollerable.

Le mesme J. Dorat.

Jacques de Cailly, Orléans

De mesme.

Camille a le renom, entre les grands guerriers,

D’avoir pour elle seule acquis mille Lauriers ;

Mais pour elle et les siens, cette chaste Bellonne

A remporté les Lis, l’Espée et la Couronne.

Le mesme J. de Cailly.

J. Roussel, avocat au parlement

Sonnet
Sur le nom Du Lis donne à la Pucelle.

A Domp-Remy nasquit cette Pucelle,

Dont les vertus plus soüefves que fleurs,

Trouvant la France en tristesse et en pleurs,

En joye et heur la rendit immortelle.

47Son nom fut Darc, certain presage qu’elle

À coups de traits chasseroit les malheurs

Qui sous l’Anglois la couvroient de douleurs,

Et ravageoient sa campagne si belle.

Mais quand apres tant de vaillans exploits,

Elle eut remis son sceptre sous les loix

De la maison qui juste la possede,

Quel nom pouvoit couronner ses beaux faits,

Que d’un beau Lis, qui convient à la paix,

Et en beauté à nulle fleur ne cede.

Id. Roussel J. C.

Annibal de Lortigue

Sur le mesme nom Du Lis, donné aux freres de la Pucelle.

Jehanne Darc comme un arc celeste

Dardant ses traits six les Anglois,

Tira de la tombe funeste

Le glorieux nom des François.

Et ses freres conduits par elle,

Releverent la fleur tant belle

Des Lis François ensevelis.

Le Roy cherissant ces gens-darmes,

Changea leur Arc en un beau Lis,

Et les grava dedans leurs armes.

Id. Hannibal de Lortigue.

J. Thaumas, Paris

Comme la Pucelle merita le nom Du Lis.

Arcia que fuerat, fit Martia Lilia servans,

Nobiliore nota, Lilia facta fuit.

J. Thaumasius Paris.

Louis Quatrehommes

48In divinum Janæ Darciæ nomen : Acrostichon.

Dum dubitat natura Marem faceretne Puellam,

Anxia Mars, non mas Darcia facta fuit.

Regna cui Francum numen dedit arte tueri

Cœlesti, ac Anglos pellere belligeros.

Illam Rex Lili (servata ob Lilia) nomen

Accipere, expulsis hostibus, inde jubet.

I. L. Quatr. F.

De nomine Janæ Darciæ.

Arcus bella notat, sed pacem Lilia, Jana hinc

Arcia quæ belli, Lilia facta domi est.

Id. L. Quatr. F.

Chapitre VIII.
Autres Poësies en faveur de celuy qui a fait le recueil de ces Inscriptions et Poësies.

Jean-Louis Fabrot, Provence

Incomparabili Puellæ,
Quæ vulgo Aurelianensis Virgo dicta,
Et V. C. Carolo Du-Lis ejusdem Heroïnæ ex fratre Gentili.

Languida crudeli squallebant Lilia bello,

Concideratque ingens altis immersa ruinis

Gallia ; Regnator quatiebat sceptra Britannus

Immerita, et sedem Regnanti fixerat urbe.

49Tandem exoravit pacatos Gallia Divos,

Queis accensa Deum soboles, Virgo inclyta belli,

Clade triumphatum nec opima conficit hostem,

Urbemque Aureliam, Regni qua voluitur omnis

Spes trepidi, late cingentibus eripit armis.

Prospera sors Angli inde ruit, jactataque Marte,

Effluit incerto, atque ægre trans æquora mittit

Belli reliquias, duri ludibria fati :

Hinc etiam solio æterno sublimis Auorum

Karolus, imperium inconcussa pace gubernat.

Cætera Regna manent fortuna ; At Gallia (præceps

Audiat ambitio) servatur numine Divum,

Orbis et hanc frustra tentent convellere vires.

At pia posteritas Divæ alto sanguine creta,

Cui Rex ferre dedit, servata ob Lilia, nomen

LiLii, et Augusto decorari insignia flore,

Quam accepta Gallis Regalem laude puellam

Commemoras, Patriæ stimulata et Gentis amore ?

Quippe novam a tumulo per te accipit eruta lucem

Virgo, quæ Gallos donavit luce, sepultos.

Id. J. L. Fabrotti.

Abel de Sainte-Marthe

De eodem Car. Lilio.

Quæ prius horrenti squallebant marcida cultu

Numine fœlici Lilia Virgo fovet.

Cernis ut extinctam cognata e gente puellam

Lilius a tenebris victor ad astra vehit ?

Hinc merito simili signatur honore puella,

Pro patrio insigni Lilia bina gerens.

Id. Abell. Sammarthanus.

Pierre Patrix, Caen

50La France à la Pucelle.

Pucelle, à qui je dois l’heur de ma delivrance,

Et ma tranquillité ;

Pour ne t’oublier pas, j’ay trop de souvenance

De ma captivité :

J’estoy preste de voir fouller aux pieds ma gloire,

Et mon peuple soubz-mis,

Quand le Ciel par ton bras me donna la victoire

Contre mes ennemis :

De mille autres dangers par miracle eschappée,

Je voy mes Roys heureux ;

Mais mon Sceptre pourtant doit plus à ton espée,

Qu’à leurs faits valeureux.

Mes beaux Lis, dont la fleur tous les ans renouvelle ;

Heureusement sauvez,

Flestriroient, si ta main et valeureuse et belle

Ne les eult conservez.

Mais las ! de quels Lauriers triomphans de l’Envie,

Te doy-je couronner,

Puis qu’en fin prisonniere il te couste la vie,

Pour me la redonner ?

Charles par ton secours, contre son esperance,

Remis en dignité,

Donna de tes beaux faits la juste recompense

A ta posterité :

Mais en t’anoblissant, et ceux de ton lignage,

Plustost il leur rendit

Ce que peut-estre en fin la rigueur de quelque âg

Leur avoit interdit :

51Car tu fis, me sauvant, tant de valeur paroistre

Pour ta condition,

Qu’un cœur si genereux et si haut n’eust peu estre

De basse extraction.

Ainsi sans tes efforts, dont ont repris naissance

Et ma gloire et ma paix,

Je serois miserable aux prisons du silence

Enfermée à jamais :

On pour le plus, helas ! quelque chetive histoire

En feroit mention,

Je vivrois seulement par la triste memoire

De ma destruction.

Afin qu’aussi ton los par le temps ne perisse,

Du Lis te rend pour moy,

Te tirant de l’oubly, le mesme benefice

Que j’ay receu de toy.

Je me suis an secours de sa plume addressée,

Sçachant bien puis quib est

De ton illustre sang, qui elle y seroit poussée

D’un plus grand interest.

Mais pourtant son ouvrage et me plaist, et m’afflige,

Car taschant aujourd’huy

De macquiter à toy, je voy bien qu’il m’oblige

Encores plus à luy.

P. Patris Gent. de Caën.

Jacques Dorat, archidiacre de Reims

Au mesme Sieur Du-Lis, parent de la Pucelle, nommée Du-Lis.

Du-Lis parent du Lis, qui nos Lis conserva,

De qui portez, le nom du Roy vaillant et sage,

52Du Roy, qui le conseil du haut Ciel approuva,

Bien qu’une simple fille en portast le message :

Du-Lis digne du nom et des faveurs des Roys,

Digne des saincts Lauriers des filles de memoire,

Tu n’as uny ces fleurs pour fascher les Anglois,

Mais pour plaire à la France, et celebrer sa gloire.

Jac. Dorat.

Jacques Dorat, archidiacre de Reims

Note. — Suivait un sizain du même, supprimé dans l’édition de 1628.

Du-Lis, l’onde les cieux, et l’air

Ont pris le tout de la Pucelle,

Sinon le los que fait voler

Par ce Tout, ta plume immortelle

Dont la docte prose et les vers

Vivront autant que l’univers.

Le mesme J. Dorat.

Ursin Durant fils

Ad Dom. Lilium ex Virg. Aurel. Gentilem.

Pelleus veluti dupplex, satus ille Philippo,

Ipse est eximii nobile Apellis opus :

Inclytus ille armis, picto ipse renidet in auro,

Illum non Mars, hunc ars vincere nulla potest :

Non aliter dupplex celebratur Darcia, dono

Altera nota Dei est, altera nota tuo.

Id. Urs. Durant F.

J. Legrand, sieur de Briocourt

Sur le Recueil fait par Monsieur Du-Lis ; Conseiller du Roy en ses Conseils d’Estat et Privé, et son Advocat General en la Cour des Aydes, des Poësies composées au subjet de Jeanne la Pucelle de France, du frere de laquelle il est issu.

Sonnet.

Le Phœnix en valeur que Du-Lis fait renaistre :

En ses doctes escrits, avoit ja ramassé

La France dans la France, et l’Anglois dechassé,

Ne recognoissoit plus que Charles pour son maistre.

53Mais comme on void la mort arrogante soubsmettre

Toutes choses à ses loix : ce Phœnix enlassé

Aux rets des ennemis qu’il avoit terrassé,

Fut bruslé dans le feu pour reprendre son eftre.

Estre, qui ne sçauroit se reprendre d’autruy,

Ains il faut qu’il foit pris de sa cendre et de luy ;

Et c’est pourquoy Du-Lis seul pouvoit entreprendre

De le faire renaistre, estant asseurément

Et sa cendre et son sang : car jamais autrement

Le Phœnix ne renaist, si ce n’est de sa cendre.

Id. J. de Grand Sieur de Briocourt, Adv. du Roy au Presid. de Chaumont en Bassigny.

Chapitre IX et dernier.
Des Poësies faites en l’honneur tant du Roy et de la Royne, que de la Pucelle, et de la ville d’Orleans.

Jean Dorat, Auratus, poète royal

Ludovico XIII. Henrici Magni Filio, Francorum et Navar. Regi Christianiss.Trad.

In statuam Virginis Aurel. Regi oblatam.

Virgo redit Francis, muta vel imagine, fœlix,

Quam numen quondam patriæ, non machina misit

Subsidio : Augurium, bone Rex Lodoice, saluta.

De cœlis excita tuis Virgo altera votis.

54Fortunet Regni auspicium, lancemque retratctet,

Utraque ut antiquum tua secla recludat in aurum.

Auratus Poëta Regius faciebat pro Rege Henrico III.

Ursin Durant fils

In eandem statuam.

Darcia, Mars non mas, Gallos protexit ab Anglis,

Fortior innumeris una puella viris :

Sic, Lodoice, tuo juvenili pectore, Martis

Gloria fulminei, mox oritura latet.

Per cinerem quia Jana suum generosa revixit,

Æmula Phœnicis dicitur Assyriæ :

An non Borbonii (quem Gallia luget ademptum)

Tu noster Phœnix Patris imago tui es ?

Disparibus natura studens, in dispare sexu,

Admovit doctas arte juvante manus.

J. Urs. Dur. Urs. F.

Ursin Durant père

Mariæ Mediceæ Francorum et Nav. Regina.

Vicinas certare acies, et bella moveri,

Quodque hostis victo victor ab hoste redit,

Et quod in extremis quærens prudentia rebus

Consilium, sanctæ fœdera pacis amat,

An dolus, an virtus, an que plerumque futuris

Casibus incertas sors dat iniqua vices,

Non quæ miremur sunt hæc miracula, vinci

Artibus his Reges, his superare solent.

Portentum est, quod in arma ruit, duce Virgine, Gallus,

Vincit, et e nostris finibus, Angle, fugis :

55Quod Regina, tuis sub legibus otia carpit

Gallia, fœmineas nescia ferre prius.

Quid maius Gallis præflet lex Salica, quam quod

Armorum et pacis tempus utrumque regat.

Id. Urs. Durant P.

Version en François.

Qu’une armée ennemie en bataille se range,

Qu’on voye du vaincu triompher le vainqueur,

Mesnager une paix pour temperer l’aigreur

D’un Prince redouté, et luy donner le change,

Voir les effets divers que produit le meslange

De ruse où de vertu, ou si de ce bon-heur

Qui flatte nos desseins, le fort en est l’autheur :

On ne peut admirer en cela rien d’estrange.

Mais voir une Bergere endosser le harnois,

O prodige ! et chasser l’ennemy des François :

Madame, et de nous voir dessous l’obeïssance

De vos loix en repos, qui le croira jamais ?

Ny que la loy Salique ayt tant fait pour la France

Qu’une Bergere en guerre, et vous en temps de paix.

Le mesme.

Alexandre Bouterouë, Paris

A la Reyne Regente.

La France languissoit sous le joug et l’orgueil

De l’Anglois son vainqueur, quand aux rives de Loire

Cette fille arresta le cours de sa victoire,

Le vainquit, le chassa d’un effort nompareil.

56Quand l’Orage du Ciel couvrit nostre Soleil,

Ce Soleil des guerriers, des Monarques la gloire,

La France en desespoir vestit sa robe noire,

Pensant voir sa fortune et son sceptre au cercueil.

Mais comme la valeur d’une Reyne aguerrie

Par neuf lustres entiers gouverna l’Assyrie

Sous le nom et l’habit de Ninus son mary :

Ainsi grande Princesse, ornement de nostre âge,

Pour maintenir la France et son Sceptre fleury,

Vous avez du feu Roy l’esprit et le courage.

Alex. Bouteroüe J. C. Paris.

Ursin Durant fils

De Regina Franciæ, et Virgine Aurelian.

Mars erat impavidus, sub imagine Jana puellæ,

Aut si quæ belli dicitur esse Dea :

At tu mortali sub imagine, diva Minerna es.

Aut si quis pacis dicitur esse Deus :

Rebus in angustis præsto fuit Arxia Regi,

Rex juvenis Gallos te moderante regit :

Virgineo monitu Rhemis Rex Carolus unctus,

Te tua progenies uncta juvante fuit.

Lilia Jana armis, tu servas Lilia pace,

Est eadem variis gloria parta modis.

Id. Urs. Durant Urs. F.

In Janam Darciam cum Achille comparatam.

Virgineos habitus latuit mentitus Achilles,

Decretæ fugiens ominda certa necis :

Qui licet invitus (postquam detexit Ulysses

Arte dolum) pugnat, pro patriaque cadit.

57Seu vir, seu virgo, vel in uno sexus uterque,

Sine quid humano Darcia maius habet :

Vera puella dolos mendacis vincit Achivi,

Que pro Francigenis victima sponte fuit.

Quidni ? ne pugnet, speciem vir virginis optat

Ut pugnet, virgo gestit habere viri.

Idem.

Ursin Durant père

Traduction en François.

On dit que le vaillant Achille

Vestit les habits d’une fille,

Afin qu’on ne le conneust pas ;

Et qu’il usa de cette feinte,

Prevenu qu’il estoit de crainte

D’un inevitable trespas :

Aussi tost le subtil Ulysse,

Ayant reconneu l’artifice,

Le fit enrooler des premiers :

Pour la gloire de sa patrie

Il combat, il perd la vie,

Mais ce ne fut pas volontiers.

Soit que ce fut une bergere,

Ou bien une malle guerriere,

Qu’en elle les deux ne soient qu’un,

Fille, mais d’un brave courage

Cette Darc eut de l’avantage

Beaucoup par dessus le commun.

Elle a surpassé la finesse

De ce vaillant Prince de Grece,

Et a bien fait plus bravement ;

58Aymant le lieu de sa naissance,

Elle s’immola pour la France,

Et mourut volontairement.

Ce qu’on ne luy sçauroit debattre ;

Car le Grec de peur de combattre

Desira cacher sa valeur

Dessous les atours d’une fille :

Cette-cy en homme s’habille

Pour combattre avec plus d’honneur.

Le mesme Urs. Durant P.

Louis Quatrehommes

De Janæ Darciæ, et Davidis Regis inter se collatione.

Davidem quisquis similem putat esse puellæ

Janæ, quam longa fallitur ille via :

Hic decus eximium peperit sibi ; Darcia Virgo.

Tum sibi, tumque suis stemmata clara parat.

Hic spolia arma tulit cæso memoranda Gigante,

Ast hæc de multis clara trophœa refert.

Hic Sceptrum capit, illa dedit : sic maior habetur ;

Cum multo maius sit dare, quam capere.

Tantum igitur superat Davidem Darcia victrix,

Quantum concedit virgo tenella viro.

J. L. Quatr’hommes F.

Alexandre d’Anglure, seigneur de Bazemont, Lorraine

Sur le pourtrait de la Pucelle d’Orleans.
Sonnet.

Celle qu’icy tu vois, ce n’est une Amazone,

Encores qu’en valeur au milieu des combas,

59Ny en chaste courage elle ne cede pas

A celles que plus haut l’Antiquité nous sonne.

Celle qu’icy tu vois, ce n’est une Bellonne,

Encores qu’a la la guerre elle marche d’un pas

Non moins delibere, faisant tomber à bas

Un million de gens que son glaive moissonne.

Celle qu’icy tu vois, ce n’est pas de Juppin

La fille qui sortit de son cerveau divin,

Encores qu’elle soit en pareil équipage :

C’est une pastourelle, à qui la France doit

Sa franchise, et sans qui languiroit en servage

Le François, qui son Roy trop foible defendoit.

Alexandre d’Anglure, Seigneur de Bazemont, Lorrain.

Jean de Poursais, seigneur d’Adomp, Lorraine

A la Pucelle d’Orleans,
Sonnet.

Ny l’exploit courageux de la Bethulienne,

Qui sauva par un coup sa ville et ses amis :

Ny celle qui vaillante à la mort s’est sousmis,

Pour defendre aux combats la Cité Phrygienne :

Ny celles qui n’agueres en l’Isle Cyprienne,

Et dedans Scutari en armes se sont mis,

Pour chasser de leurs murs les plus grands ennemis

D’elles, de leurs pays, et de la foy Chrestienne :

Ne sont à comparer à tes braves exploits,

Pucelle, qui as par tant et tant de fois

Vaillamment combattu l’ennemy de la France.

60Qui as fait couronner son legitime Roy,

Son Royaume remis sous le joug de sa loy,

Ses subjets delivré de l’Angloise puissance.

J. de Poursais, Sieur d’Adomp, Gent. Lorr.

Jules Scaliger

In commendationem urbis Aureliæ.

Non potuit magni caput esse Aurelia Regni :

Ergo quod reliquum est, corque animusque fuit.

Dat Bellona manum, facundam Curia linguam,

Ars potuit nullis ulla latere modis.

Tam come ingenium,tanta est prudentia rerum :

Hæc quod non novit Gallia muta filet.

Ipse pater choreas agitans in vertice Nisæ,

Olim aut hinc, aut huc munera læta tulit.

Nil humile aut vulgare sonat, magna omnia magni,

Quin animum vulgus principis ipse gerat.

Que tibi non cessit, toti non cesserat orbi,

Cedere nec debes tu nisi sola tibi.

Jull. Scaliger.

Jacques de Cailly, Orléans

Vers escrits et empreints sur la grosse cloche qui sert d’horloge à la ville d’Orleans.

Orleans suis du Roy chambre premiere,

Et est mon nom propre, le Cœur de Lis ;

Ainsi nommée en l’assemblée planiere

Des trois Estats, où estoient maints d’eslis :

Le Connestable m’a ce nom icy mis,

Et plusieurs autres Princes pleins de science,

61Pour bien commun appellez et commis,

Et maintenir la bonne paix en France.

Pour ce monstrer je porte en ma Banniere

Les Fleurs de France, dont est mon chef Jolis,

Et an dessous, par moult belle maniere,

Trois Cœurs de Lis, sur champ de gueulle sis :

Le noble Roy porter le ma permis.

A qui Dieu doint tousjours bonne alliance,

Et maintenir la bonne paix en France.

Plus de huict mille poisant saine et entiere,

Mil quatre cens cinquante et huict, fus mis

Au mois de Juin, et de bonne matiere

Faite je fus par maistres bien appris.

Mes habitans, toy Prince qui tout fis,

Vueille garder de guerre et pestilence,

Et de ne cheoir és mains des ennemis,

Et maintenir la bonne paix en France.

Ce fut en la mesme année que le Roy fit faire la slatuë de la Pucelle sur le Pont d’Orleans, pour decorer ladite ville, 1458.

A Monsieur d’Escures Maire d’Orleans, Gouverneur d’Amboise, etc.

Quand d’un injuste droit, et raison mensongere

L’Angleterre usurpoit le throsne de nos Roys,

Pour sauver Orleans de ses iniques loix,

Qu’elle alloit menaçant d’arrogance estrangere,

Une fille changea son habit de bergere,

Se coëffa d’un armet, endossa le harnois,

62Comme Penthasilée assaillant les Gregeois,

Ou la fiere Camille à courir si legere.

D’un fort bien different, ô genereux guerrier,

Apres avoir gaigné maint reply de laurier,

Aussi fidelle au Roy, que vaillant à la guerre ;

Tu ne desdaignes pas, honorant ta Cité,

Son estat populaire : as-tu pas imité.

Ces Dictateurs Romains qui cultivoient la terre ?

J. de Cailly Gent. Orl.

A luy-mesme : vers Acrostiche.

Dans ce lieu où vous estes né,

Embellissement de la France,

Soyez tousjours bien fortuné,

Comble de biens, et de vaillance :

Vieillissez-y plus que Nestor,

Remettez-y tout en nature,

Et ramenez le siecle d’or,

Serez ainsi en bon augure.

J. D. Cailly G. Orl.

Catherine de Cailly, Orléans

Pour la conclusion de ce Recueil
Sonnet.

Ce frere de la mort, ce sommeil oublieux

En un profond repos me tenoit paresseuse,

Quand me dit mon Genie : Hé n’es-tu point honteuse

De dormir, quand chacun escrit à qui mieux mieux ?

63Tu laisse ta Pucelle, et son los pretieux,

Toy qui plus que nul autre en dois estre amoureuse ;

Pour avoir delivré ta Cité tant fameuse,

Et avoir de l’oubly tiré tes peres vieux.

Lors une grand rougeur me monta sur la face,

Et luy dis : Il est vray ; que veux-tu que je fasse ?

C’est trop tard, et en vain que tu romps mon sommeil ;

Car tant de beaux esprits ont desja pris la plume,

Et descrit ses hauts faits en un juste volume ;

Qu’il ne reste apres eux que clorre ce Recueil.

K D. Cailly Dam. Orl.

Étienne Pasquier

Note. — Le poème français de Pasquier qui conclut l’édition de 1613, était précédé d’un distique latin du même.

Arxio es orta pago, Francorum Arx, Virgo, virago

Martia, quæ patriam restituis patriæ.

Steph. Pasquasius.

Étienne Pasquier

La Pucelle au peuple François.

Sçache, Lecteur, qui ce poëme lis,

Que pour avoir bien defendu le Lis,

Roy du Lis ce grand surnom me laisse,

Et l’un des miens ce beau Recueil a fait :

Or sus ; François, puis que l’œuvre est parfait,

Frappe des mains, pour monstrer ta liesse.

Le mesme Est. Pasquier.

Fin

64Vœu

Vœu de celuy qui a fait le Recueil de ces Inscriptions et Poësies, descendu d’un des freres de la Pucelle d’Orleans.

Au Roy,
Et à la memoire de defunct Henry le Grand, son bien-faicteur.

Grand Roy, digne tout seul de plus grandes loüanges

Que tous les Roys François, et Monarques estranges ;

Qui non pour la faveur, ny pour estre flatté,

As ce tiltre de Grand sur eux tous merité ;

Mais par les grands exploits de ta trenchante espée,

T’es fait beaucoup plus grand qu’Alexandre et Pompée :

Par ta clemence aussi, qui nous tient tous ravis,

Tu surpasses encor Charlemagne et Clovis.

Pour vanter ta valeur à jamais memorable,

Pour te chanter Grand Roy, à toy seul comparable,

Er laisser icy bas aux peuples à venir

De tes faits glorieux l’eternel souvenir,

Il faudroit surpasser l’admirable Virgile,

Et celuy qui chanta le belliqueux Achille.

Mais ne s’en retrouvant aucun tant merité,

Pour te faire revivre à la postérite ;

Un seul ne pouvant pas ce service te rendre,

65Tes subjets à l’envy le doivent entreprendre :

Et chacun se mettant de soy-mesme en devoir,

Y doit contribuer son art et son pouvoir :

Sur tous autres ceux-la que ton œil accessible

Charmoit comme de Dieu vraye image visible ;

Et outre les bienfaits qu’ils recevoient de toy,

Avoient encor l’honneur d’estre aymez d’un grand Roy.

L’un dira que tu viens de Royale semence,

Que comme ton ayeul, tu aymes la clemence,

L’honneur, la pieté, la justice et les loix ;

Et bref qu’à Charlemagne en tout tu ressemblois :

L’autre d’un air plus haut escrivant tes victoires,

De tes faits Martiaux remplira les histoires.

Et moy, qui plus qu’aucun me sens ton obligé,

Qui tiens de ta faveur grand’part du bien que j’ay ;

Qui pour t’avoir servy, comme Dieu me l’ordonne,

Quand tu mis sur ton chef ta seconde Couronne,

Et suivis ta fortune à ton advenement,

Ay receu de ta main beaucoup d’advancement :

De ta main qui m’a fait de grands benefices,

Que j’ay honte de voir qu’ils passent mes services ;

Moy, dis-je, que ton choix, non mon ambition,

A voulu relever en ma condition ;

Laissant les tons plus hauts de tes vertus insignes

A ceux qui d’en parler s’en rendront les plus dignes,

En mon particulier je diray seulement,

Que tu me fus autant liberal, que clement

A quiconque porté de devoir et de zele,

T’offroit pour l’advenir son service fidele.

Il me souvient encor, et souviendra tousjours,

66Que pour t’avoir servy an Parlement de Tours,

Ayant part aux secrets de tes plus grands affaires,

Au parquet de tes gens à l’Estat necessaires,

(Je diray tout cecy sans m’en glorifier)

Tu voulus, ô Grand Roy, pour me gratifier,

Par un Edit exprés, qui me fut favorable,

Créer à mon sujet un Office honorable,

Dont je me vis pourveu quasi sans y penser,

Sans briguer, sans courir, et sans rien financer ;

Voire mesme en un temps, où l’argent assez rare

Eust excusé de voir un Tresorier avare.

Et comme on void un bien d’un autre reüssir,

Ta Majesté voulut encore me choisir,

Entre les contendans qui poursuivoient l’office

D’Advocat General, dont je fay l’exercice,

Pour maintenir tes droits, et me donner moyen

De garder l’interest du public, et le tien,

En la Cour souveraine, où la Justice saincte

Entretient ta grandeur, et tes subjets en crainte,

Faisant esgalement sans fraude et sans abus

Rendre par les subjets à Cæsar ses tribus :

Puis m’ayant en cela ta faveur departie,

Tu me remis encor la meilleure partie

Du prix de cet Offices ; et ainsi m’obligeant,

Tu voulus preferer mon service à l’argent.

Outre le mal commun, voila ce qui m’incite

A regretter ta mort : Mais ce qui plus m’irrite,

Est de ne t’avoir peü rendre compte, mon Roy,

De ces riches talens que j’ay receus de toy,

Et de ne t’avoir peü servir durant ta vie,

67Autant que tes bienfaits m’en avoient fait d’envie,

Et si je l’avois peü autant que souhaitté,

Je me tiendrois heureux, et beucoup acquitté :

Tu m’as fait trop de bien, grand Prince, pour m’en taire,

Et ne te pouvant plus autrement satisfaire

Que par la volonté, j’auray toufjours au moins

De mon Zele envers toy les hommes pour tesmoins.

Or vous, sur qui l’espoir de la France se fonde,

Heritier des vertus du plus grand Roy du monde,

Vous, à qui les Destins en naissant ont promis

Les hommes pour subjets, et les Dieux pour amis :

Sire, à qui l’Univers doit un jour faire hommage,

Fils de Henry le Grand, et sa vivante image,

Qui naissant avez peu nostre France calmer,

Ainsi que l’Alcion l’orage de la mer :

Monarque (à qui le Ciel donne un regne prospere)

Puis qu’on doit rendre au fils ce qu’on devoit au pere,

Recevez en son lieu un cœur aussi entier

A vous servir, qu’il fut à vostre devancier :

Un cœur qui desormais autre bien ne respire

Que de servir le fils du Prince qu’il souspire :

Qui borne là ses vœux, sa gloire et son pouvoir,

De rendre à son Seigneur tout service et devoir.

A vous doncques, mon Roy, tout entier je me vouë :

A vous je me dédie, et de vous je madvouë :

Non comme le commun de vos autres subjets,

Mais bien pour en avoir de plus rares objets :

Tesmoin le nom Du-Lis, dont ma race s’honore,

Et tant d’autres bienfaits qui renaissent encore

68De vos predecesseurs, qui nous furent parains :

Car le Roy Charles sept, à son retour de Reins,

En faveur d’une saincte et vaillante Amazone,

Qui luy fit par son Sacre asseurer sa Courone,

(Pucelle que Dieu seul envoyoit aux François,

Pour sauver leur pays, et chasser les Anglois,

Qui faisoient à la France une si rude guerre,

Qu’elle sembloit desja subjette à l’Angleterre :)

Permit à ses parens avec elle ennoblis,

De porter en leurs noms et leurs armes le Lis :

Nom que mon trisayeul, et propre frere d’elle,

M’a laissé, pour garder sa memoire eternelle :

Beau nom qu’elle tenoit et que nous tenons tous

De vos predecesseurs, Grand Monarque, et de vous,

Qui nous rend à nos Roys tellement redevables,

Qu’en devoir de subjets nous n’avons nos semblables :

Et moy, qui plus qu’aucun, outre ce beau nom, tiens

Du Roy Henry le Grand et l’honneur, et les biens.

C’est, mon Roy, ce qui fait que mon ame affligée

De la mort de celuy qui l’a tant obligée,

V’eut honorer (pour voir mes desirs accomplis)

La memoire du pere, en bien servant le fils.

Fin

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