Dossier : Accueil critique du roman
Revue de presse
Encart publicitaire publié dans plusieurs journaux (mars-avril 1883) :

Le Gaulois (23 mars 1883)
Annonce diffusée dans nombreux autres journaux : le Petit parisien, l’Intransigeant, le Voltaire…
Lien : Retronews
À ceux qui aiment les émotions violentes, aux curieux qui cherchent les visages sous les masques, nous signalons le très intéressant et très original roman que Marie Colombier vient de publier chez Marpon et Flammarion. Le Pistolet de la petite Baronne nous initie aux mystères, souvent cruels de la vie, mondaine à l’étranger.
La Liberté (24 mars 1883)
Compte-rendu extrait de la rubrique À travers champs, signé X…
.
Lien : Retronews
Les grands seigneurs russes les plus richissimes font souvent de très pauvres maris. Tel est le cas du baron de Fédenberg, grand-chambellan de S. M. Alexandre II, empereur de Russie.
Au reste, ta baronne, en raison du sang tzigane qui coule dans ses veines, comme aussi par suite de l’éducation qu’elle a reçue, semble très peu faite pour remplir un rôle d’épouse recommandable.
Il arrive donc que la petite baronne plante là son grand-chambellan et qu’elle vient à Paris chercher une compensation, rêvée depuis longtemps, à toutes les contraintes et les humiliations que lui a fait essuyer la vie conjugale.
Sa première fantaisie est pour le théâtre ; elle veut entrer au théâtre. Mais elle est laide et n’a pas de talent.
Elle se lance alors dans la vie galante, et, secondée par sa nature, elle tombe bientôt au dernier degré de l’abjection.
Au reste, son succès de ce côté est tout aussi négatif que dans le mariage, en sorte que la petite baronne se prend elle-même en légitime dégoût et se brûle la cervelle.
Le Pistolet de la petite baronne, tel est le titre de ce roman que vient de publier chez Marpon, Mme Marie Colombier. C’est plus qu’un roman, c’est un document qui fait la lumière sur certain côté obscur de notre société contemporaine.
La préface — car il y a une préface — est de notre confrère M. Armand Silvestre. Nous ne saurions mieux faire que de lui emprunter en partie ses appréciations :
Ce n’est pas, [dit-il], que ce livre ait le moindre caractère scandaleux. Vous n’y trouverez aucune de ces descriptions lascives où se complaît l’imagination des maladifs et des impuissants. Il est remarquable, au contraire, par la sobriété du détail. Il ne recule pas devant le fait, puisqu’il est une page d’histoire contemporaine, mais il ne le surcharge pas d’enjolivements aggravants ; au contraire. C’est un mérite d’autant plus réel que c’est un élément de succès facile méprisé de par une volonté hautaine.
Et puis, je veux dire encore une des raisons qui me l’ont rendu sympathique, en dehors de cette rare et toute virile loyauté de moyens. C’est qu’il a pour héroïne une étrangère et ne poursuit pas l’étrange légende de nos vices nationaux.
La France (26 mars 1883)
Autre annonce diffusée dans plusieurs titres : le Mot d’Ordre, le Réveil, le Tintamarre, etc.
Lien : Retronews
Une histoire empruntée à la vie réelle : des personnages appartenant à ce grand monde étranger qui mérite d’être mieux connu. Une série d’événements ultra-parisiens prêtant aux plus poignantes émotions. Un dénouement d’une grandeur et d’une horreur vraiment tragiques, tel est, en peu de mots, le bilan du nouveau livre que Marie Colombier vient de publier chez Marpon et Flammarion, et qui est destiné au plus vif succès. Le Pistolet de la petite baronne commence une série de romans contemporains où se reconnaîtra la plume alerte, incisive, colorée, de l’auteur du Carnet d’une Parisienne. M. Armand Silvestre a écrit pour ce livre une originale préface.
Gil Blas (26 mars 1883)
Extrait des Variétés qui reproduit l’intégralité de la préface d’Armand Silvestre.
Lien : Retronews
Une préface d’Armand Silvestre
Mlle Marie Colombier, qui accompagna Sarah Bernhardt en Amérique, publie un nouveau roman de mœurs chez les éditeurs Marpon et Fammarion. Titre : Le Pistolet de la petite Baronne. L’un des plus puissants éléments de succès de cet ouvrage sera, sans contredit, la préface du roman, qui est due à la plume si brillante de notre éminent collaborateur Armand Silvestre.
Nous sommes heureux d’offrir aux lecteurs de Gil Blas les prémices de cette préface :
Certes voilà un livre qui n’avait besoin de personne pour le présenter au public…
Le Constitutionnel (26 mars 1883)
Extrait de la Chronique des arts et des théâtres de Paul Ginistry.
Lien : Retronews
Mlle Marie Colombier ambitionne, décidément, les lauriers du romancier.
Elle vient de publier un roman, le Pistolet de la petite baronne. C’est M. Armand Silvestre qui s’est chargé de présenter le livre au public.
Des romans comme celui-ci, [dit-il,] sont un repos dans cette fatigue des inutiles attentes. Le drame n’y est pas perdu un seul moment de vue ; il se déroule impétueux et serré comme un torrent dans un lit trop étroit. Juste ce qu’il faut de paysage pour que les personnages s’y meuvent dans la réalité. Ne croyez pas cependant à une débauche d’imagination rappelant la grande manière des Sue, des Gozlan et des Soulié. Non. Rien que de vu, au contraire, rien que de vécu de près, rien que de rigoureusement pris sur nature, une aventure dont les invraisemblances mêmes ont dû être amorties. De là un livre ayant ce double caractère d’intéresser comme la plus heureuse des fictions, tout en s’associant à l’œuvre de vérité que nos romanciers ont tentée.
M. Silvestre n’est pas, comme on voit, un de ces préfaciers qui sèment quelques épines au milieu des fleurs qu’ils jettent sur l’œuvre qu’ils sont censés recommander.
L’Événement (27 mars 1883)
Extrait du Carnet bibliographique de Firmin Javel.
Ce livre est bon à lire pour les observateurs, pour les psychologues… Mais nous estimons que les
jeunes personnesferont bien de lire autre chose !
Lien : Retronews
Armand Silvestre a écrit pour le nouveau roman de Mlle Marie Colombier, le Pistolet de la petite baronne, une préface toute vibrante de patriotisme.
Et puis, je veux dire encore une des raisons qui me l’ont rendu sympathique en dehors de cette rare et toute virile loyauté de moyens. C’est qu’il a pour héroïne une étrangère et ne poursuit pas l’étrange légende de nos vices nationaux.
À la bonne heure ! Voici donc la revanche, enfin ! Et,certes, l’auteur du Pistolet de la petite baronne n’y va pas par quatre chemins. Comme elle s’acharne sur son héroïne exotique ! Mais aussi comme on comprend que tout cela est vrai, cruellement vrai ! En deux mots, voici l’histoire : une grande dame russe, fille d’un seigneur et d’une mère qui a été bohémienne, écœurée de la vie qu’on lui a faite en la mariant à un gentilhomme immonde, vient chercher en France l’amour quelle elle ignore… Alors commence une course folle a travers nos platitudes et nos vices… Il y a là un tableau de Paris, à la manière noire, d’un effet saisissant. Mais laissons la parole Mlle Marie Colombier, qui va nous présenter elle-même, mieux que nous ne saurions le faire, son infortunée petite baronne.
Deux heures après le souper, … [Long extrait du chapitre III, jusqu’à :] C’était un ouvrage français, contenant des gravures, pleines d’hommes et de femmes nus.
Ces livres, c’étaient les œuvres du marquis de Sade ! Quelque temps après, la jeune fille tombe malade (il y avait de quoi). On l’envoie au couvent, à Paris. À son retour on la marie, et voici ce qui l’attendait à cette attirante épreuve de la nuit de noces :
J’entrai chaste et troublée, le sein gonflé par l’émotion mystique des vierges, dans la chambre de l’épousée… Des bras de l’homme auquel on m’avait livrée, je sortis souillée, avilie, prostituée… vierge !… Ce bel Adonis dont j’aurais cru les déesses jalouses, n’avait pas même songé à me faire l’honneur d’être mon mari…
Telle est la situation morale de la jeune femme lorsqu’elle est jetée dans ce qu’on appelait autrefois le tourbillon
de Paris.
Et maintenant, il nous reste à ajouter que ce livre est bon à lire pour les observateurs, pour les psychologues… Mais nous estimons que les jeunes personnes
feront bien de lire autre chose !
Gil Blas (28 mars 1883)
Compte-rendu de Paul Ginistry, qui tenait à compléter son article du 26 mars dans le Constitutionnel (ci-dessus).
Lien : Retronews
Je ne suis pas précisément de l’avis de M. Armand Silvestre qui, dans la très spirituelle et très originale préface qu’il vient d’écrire pour le roman de Mme Marie Colombier, le Pistolet de la petite baronne, jure ses grands dieux que le livre dont il fait l’éloge n’a aucun caractère scandaleux
. Qu’est-ce donc que le scandale, en fait de littérature, alors, si ce n’est raconter, sous des voiles transparents qui permettent de reconnaître aisément les personnages, les récentes aventures qui ont défrayé la chronique et émoustillé les blasés ?
Avec la meilleure volonté du monde, je ne puis accepter comme un roman moral cette perverse étude féminine. Je ne ferai, au reste, aucune difficulté pour reconnaître que, grâce à sa sincérité pimentée, elle a un singulier intérêt.
La Petite Baronne
de Mme Marie Colombier, est une étrange et maladive créature, une Russe, la baronne Julia de Fédemberg. Assoiffée d’amour, toutes les ardeurs de son sang slave le torturant, n’ayant jamais rencontré un amour véritable qui l’aurait sauvée, mariée à un misérable, elle se précipite, avec une sorte de folie hystérique, dans tous les bas-fonds parisiens, emportée par ses curiosités dépravées, lassata sed non satiata. Un jour, à la suite d’une dernière orgie où elle n’a trouvé que du dégoût, elle appuie sur son front le canon d’un revolver et elle se tue.
Cette intrigue sert de cadre à des tableaux d’un parisianisme outré, à des peintures d’une audace presque sans limite. Oh ! le livre aura assurément des lecteurs !
Au milieu de ces scènes le plus souvent presque érotiques, je fais une exception pour une page réellement émouvante et forte : celle de l’agonie d’une vieille courtisane (il faudrait être aveugle ou prodigieusement provincial pour ne pas lui donner son vrai nom) qui, usée, devenue laide, horrible, repoussante, meurt au milieu de suprêmes désirs inassouvis.
En résumé, un livre terriblement moderne.
Trop moderne !
La Réforme (28 mars 1883)
Extrait de la rubrique des Livres signée Faria
.
Ceci n’est point une œuvre vulgaire : elle est d’une violence maladive qui n’est pas sans receler un charme. Ce livre est attirant.
Lien : Retronews
Avec le Pistolet de la petite baronne, l’odeur de scandale devient plus intense et plus âcre. Mme Marie Colombier, comme toutes les femmes qui n’écrivent pas des romans pour les jeunes pensionnaires, a été tout de suite aux passions extrêmes. La petite baronne est une hystérique qui, ayant été mariée à un homme ignoble, quitte son pays — elle est russe — et vient en France dans l’espoir d’y trouver l’amour. C’est une belle aspiration en somme ; mais la malheureuse retrouva à Paris les mêmes dégoûts qui l’écœuraient dans sa patrie. Il faut dire aussi qu’elle a l’esprit passablement détraqué, ce qui n’est au reste pas extraordinaire, car elle est d’un sang étrange : elle est la fille d’un grand seigneur slave et d’une bohémienne. Dès son extrême jeunesse, son tempérament a été troublé par la solitude à laquelle on la condamnait et par des lectures obscènes. À douze ans, elle lisait les œuvres du marquis de Sade (on ne m’ôtera pas de l’idée que le marquis de Sade a été un grand moraliste), et ces lectures ont désorganisé son cerveau d’enfant. Plus tard on la marie. Elle décrit elle-même ainsi ses noces :
J’entrai chaste et troublée, le sein gonflé par l’émotion mystique des vierges, dans la chambre de l’épousée… Des bras de l’homme auquel on m’avait livrée, je sortis souillée, avilie, prostituée… vierge !… Ce bel Adonis dont j’aurais cru les déesses jalouses, n’avait pas même songé à me faire l’honneur d’être mon mari…
Je m’arrête, assuré que je suis que cette petite citation suffit pour allécher la curiosité de mes contemporains. Je dois ajouter cependant que la baronne, désespérée de ne jamais trouver l’amour, se suicide.
Ceci n’est point une œuvre vulgaire : elle est d’une violence maladive qui n’est pas sans receler un charme. Ce livre est attirant. Armand Silvestre l’a orné d’une préface patriotique (pourquoi patriotique ?) où il félicite Mme Colombier d’avoir prêté des vices aux étrangers plutôt qu’aux Parisiens. Mon Dieu, la vertu et le vice sont des choses internationales et je ne me sens pas plus fier d’être français après avoir lu le Pistolet de la petite baronne.
Le Voltaire (15 avril 1883)
Brève sur le succès énorme
du livre et de la mode des œuvres peignant les vices parisiens.
On la retrouve dans le Gaulois, du 19 avril : serait-ce une annonce publicitaire cachée ?
Lien : Retronews
Le goût est aux livres étranges qui peignent les passions violentes et les vices parisiens, racontent les aventures, les misères cachées du high life, et dont le lecteur perce facilement les masques.
Aussi le Pistolet de la petite Baronne, publié par Marie Colombier, chez Marpon et Flammarion, obtient-il un succès énorme dû à ses audaces féminines et à ses tableaux ultra-parisiens.