Enquête du cardinal d’Estouteville
Âge moyen des témoins : 59 ans.
1. Cauchon haïssait Jeanne car elle avait combattu les Anglais
Véridique [affirme par serment que l’article est véridique] ; car l’a entendu et compris par les actes, et cela est notoire.
Véridique et notoire.
Véridique. Il l’a vit captive aux mains des Anglais.
A vu Jeanne être amenée par les Anglais.
Véridique.
2. Cauchon négocia son rachat en donnant la priorité aux Anglais sur l’Église
Véridique ; a entendu que Jeanne avait été prise par un homme du comte de Ligny, conduite au château de Beaurevoir, détenue trois mois ; puis conduite à Rouen en vertu de lettres de Henri VI et Cauchon.
Jeanne fut détenue au château de Rouen ; la vit en être extraite.
Véridique. Il l’a vit dans la prison du château de Rouen, dans une pièce assez obscure, parfois enchaînée et entravée.
L’a vue deux ou trois fois, dans une pièce du château de Rouen du côté de la porte postérieure.
Véridique ; l’a vit plusieurs fois enchaînée dans la prison.
3. Les Anglais voulaient sa mort car elle les terrorisaient
Croit que si Jeanne avait été du parti des Anglais, ils n’auraient pas procédé aussi rigoureusement.
Le procès montre nettement que les Anglais procédaient par haine plutôt que par justice ; leur principal but était de prouver qu’elle était hérétique, pour ainsi déshonorer le roi de France.
Les Anglais agissaient par haine et cherchaient sa mort.
Il assista à la prédiction de Guillaume Érard sur le thème le sarment ne peut donner de fruit s’il ne reste attaché à la vigne
; déclarant qu’en France il n’y avait jamais eu de monstre pareil, qu’elle était adonnée aux sortilèges, hérétique, schismatique, que le roi en la soutenant était semblable et voulait visiblement recouvrer son royaume grâce à une telle femme hérétique.
Les Anglais cherchaient à déshonorer le roi de France.
Les Anglais ont cherché à la faire mourir par malveillance et déplaisir du bien qu’elle faisait ; et pour déshonorer le roi de France qui avait utilisé une femme hérétique et habile en sortilèges. Elle n’aurait pas été jugée si elle n’avait pas été contre les Anglais.
Véridique ; croit que les Anglais par le procès cherchaient à déshonorer le roi de France, parce qu’il gardait avec lui une sorcière.
4. Cauchon confia Jeanne à la garde des Anglais plutôt qu’à l’Église
Cauchon tenait le parti des Anglais ; lui-même vit Jeanne enchaînée avant le début du procès, puis confiée à quatre gardes anglais désignés par les deux juges (Cauchon et Lemaître). Jeanne était traitée cruellement et les instruments de torture lui furent montrés à la fin du procès.
Elle portaient des vêtements d’homme et disait les garder pour se protéger des gardes ; elle s’est plainte aux juges et à Loiseleur qu’un gardien avait voulu la violer ; Warwick intervint, menaça les gardiens en cas de récidive, et en remplaça deux.
Cauchon tenait le parti Anglais.
Entendit dire que Jeanne était traitée cruellement en prison, ferrée aux pieds comme aux mains.
Les Anglais la craignaient plus qu’une grande armée, et ne l’auraient pas ainsi traitée et condamnée sinon.
Cauchon tenait le parti des Anglais. Croit qu’au début du procès il ordonna de la tenir entravée et désigna lui-même les Anglais pour la garder, interdisant que personne ne pût lui parler sans son autorisation, ou celle du promoteur appelé Benedicite [d’Estivet].
À l’époque du procès, il fréquentait souvent le château grâce à son patron, maître Jean Son, maître d’œuvre en maçonnerie. Avec la permission des gardiens il entra deux fois dans la prison de Jeanne, et il la vit dans des entraves de fer et attachée par une longue chaîne fixée à une poutre ; et dans la propre maison du témoin fut pesée une cage de fer, dans laquelle on disait qu’elle serait enfermée ; il ne la vit cependant pas dans cette cage.
Cauchon tenait le parti des Anglais et était l’un des conseillers de ce roi.
Ignore si c’est Cauchon qui leur avait accordé la garde de Jeanne ; croit cependant que c’est lui qui avait envoyé des gardiens.
5. Cauchon avait été récusé par Jeanne
S’en rapporte au droit ; on disait qu’elle avait été prise hors de son diocèse et donc de sa juridiction. Il procéda jusqu’à la sentence définitive, comme cela est contenu dans le procès.
S’en rapporte au droit ; Jeanne n’était pas du diocèse de Beauvais.
Entendit dire que Jeanne fut prise dans le diocèse de Cauchon ; s’en rapporte au droit.
A entendu que Jeanne avait été prise dans le diocèse de Beauvais.
S’en rapporte au droit ; mais croit qu’ils agirent par haine plus que par charité ; et qu’elle n’aurait pas été jugée ainsi si elle n’avait été contre les Anglais.
6. Jeanne était bonne et catholique, allant à la messe et se confessant souvent
Déclare n’avoir jamais rien vu d’hérétique chez Jeanne ; au contraire elle demandait à entendre la messe et à se confesser.
Sur la question du vêtement d’homme et des visions, il s’en rapporte aux gens savants.
Elle fut jugée avec haine et hostilité et non pas selon la vérité ; c’est pourquoi il vit plusieurs personnes pleurer après sa condamnation.
À la fin de sa vie elle s’abandonna avec grand dévotion à Dieu, à la bienheureuse Vierge Marie et aux saints.
Ne lui vit rien de contraire à la foi.
La majorité de ceux qui virent son exécution la plaignirent, disant qu’on procédait injustement et par haine.
Jeanne était bonne et vraie catholique. Elle n’était ni hérétique, ni schismatique, comme on le lui reprochait dans un libelle qui lui avait été remis.
Il était avec elle sur le bûcher : dans les flammes elle avait toujours à la bouche Jésus ; et elle le supplia au moment où le feu serait allumé, de venir avec la croix et de la lui présenter ; ce qu’il fit. Et ensuite elle cria Jésus ; aussi les assistants furent portés aux larmes.
Jeanne était bonne catholique, de bonne et honnête vie ; la renommée en jugeait ainsi et tous avaient pitié d’elle.
Déclare avoir entendu en confession Jeanne, à sa demande et requête, et la trouva dans ses derniers jours fidèle et pieuse. De même la renommée la tenait pour bonne catholique.
7. Elle s’était plusieurs fois soumise à l’Église ; ce qu’elle disait paraissait procéder d’un esprit plutôt bon que mauvais
S’en rapporte au procès.
S’en rapporte au procès.
Quand elle parlait du royaume et de la guerre, elle paraissait mue par le Saint Esprit ; mais, quand elle parlait de sa personne, elle imaginait parfois. En tout cas, ses dits ne pouvaient la condamner comme hérétique ; s’en rapporte au procès.
S’en rapporte au procès et au droit.
S’en rapporte au procès.
8. Elle comprenait la soumission à l’Église comme la soumission aux ecclésiastiques du tribunal, partisans des Anglais
S’en rapporte aux réponses de Jeanne contenues au procès.
Six semaines avant la sentence, Jean de la Fontaine et deux dominicains allèrent la persuader de se soumettre à l’Église, car elle ne paraissait pas comprendre la nature de l’Église. La Fontaine dut s’enfuir, les deux autres furent longtemps tourmentés. — Jean Lohier, voyant par les autres qu’on ne pouvait juger en sûreté, dit qu’on ne procédait pas bien et quitta le procès.
Toutes ses réponses étaient catholiques, si l’on excepte les révélations, qu’elle disait avoir eues de saints. Elle voulait obéir à Dieu et à l’Église.
Lorsqu’on demanda à Jeanne si elle voulait se soumettre à l’Église ; elle répondit : Qu’est-ce que l’Église ? Quant à vous, je ne veux pas me soumettre à votre jugement, car vous être mon ennemi mortel.
Lorsque lui-même lui parla du concile [de Bâle], elle répondit s’y soumettre, aussitôt Cauchon dit au témoin de se taire, au nom du diable.
Jeanne se plaignit à Cauchon qu’on enregistrait pas ce qu’elle disait pour sa défense, et uniquement ce qu’on faisait contre elle.
Interrogée si elle se soumettait au pape elle demanda à ce qu’on la conduisît à lui.
S’en rapporte au procès.
Interrogée plusieurs fois sur sa soumission à l’Église, Jeanne demandait ce qu’était l’Église ; lorsqu’on lui eut expliqué elle demanda à être conduite au pape.
Le témoin ajouta qu’il avait entendu Jeanne en confession, avec l’autorisation des juges, avant le prononcé de la sentence, et lui avait administré le corps du Christ ; elle le reçut avec tant de dévotion et tant de larmes abondantes, qu’il ne saurait le raconter.
9. Elle fut jugée relapse malgré sa soumission à l’Église
S’en rapporte au procès.
La reprise de l’habit d’homme fut le prétexte de la condamner comme relapse.
Elle fut jugée relapse pour avoir repris l’habit d’homme.
Le peuple disait n’y avoir aucune raison de la condamner, si ce n’est la reprise des vêtements d’homme ; mais elle n’avait porté et ne porta ce vêtement que pour ne pas plaire aux hommes d’armes avec lesquels elle vivait, comme elle lui répondit elle-même, dans la prison.
Le jour de sa mort, il entendit Jean Tressart, secrétaire du roi d’Angleterre, dire qu’elle était morte en fidèle chrétienne, et qu’il croyait son âme être dans les mains de Dieu, et tous les fauteurs de la condamnation damnés.
La reprise de l’habit d’homme fut une des causes de la condamnation.
10. Elle fut forcée de remettre un habit d’homme et pour cela fut jugée relaspe
S’en rapporte au droit. Dit qu’après la première sentence, Jeanne reprit volontiers ses habits de femme et demanda son transfert en prison d’Église. Elle remit ensuite ses habits d’homme, disant pour s’excuser qu’elle ne l’aurait pas fait si elle avait été mise dans une prison d’Église, mais qu’elle n’avait pas osé rester en vêtements féminins avec les gardiens anglais.
N’est pas hérétique la femme qui porte un habit d’homme ; au contraire celui qui pour cette seule raison la déclarerait hérétique devrait être puni de la peine du talion.
Déclare qu’il ne jugerait pas hérétique une femme parce qu’elle aurait revêtu un habit d’homme.
Après avoir repris l’habit de femme elle demanda à être transférée en prison d’Église ; cela ne lui fut pas accordé. Bien plus, comme il l’apprit de Jeanne même, un personnage ayant grande autorité essaya de la violer ; aussi reprit-elle un vêtement d’homme, déposé avec préméditation près d’elle.
Lorsqu’elle eût repris le vêtement d’homme il vit et entendit l’évêque, transporté de joie, avec d’autres Anglais, dire devant tous, devant le sire de Warwick et les autres : Elle est prise
.
S’en rapporte au droit.
Véridique.
11. Ses juges la condamnèrent au feu par complaisance ou crainte des Anglais
S’en rapporte au droit.
Le croit véridique.
Le croit.
S’en rapporte au droit.
Véridique.
12. Tous ces points sont notoires et admis, tant à Rouen que dans le royaume de France
N’en sait pas plus que la rumeur publique.
S’en rapporte à la voix publique et la renommée.
Capture, prédication, condamnation, exécution et invocation du nom de Jésus étaient et sont de renommée publique.
Capture, incarcération, condamnation et exécution étaient et sont de renommée publique.
Voix publique et renommée.
Toutes les enquêtes :
L'enquête de 1452 :
Les 4 enquêtes de 1456 :