P. Doncœur  : Documents et recherches (1952-1961)

T. III : L’enquête de 1450 et le codicille de Guillaume Bouillé

III
La réhabilitation de Jeanne la Pucelle
L’enquête
ordonnée par Charles VII
en 1450
et le codicille de Guillaume Bouillé
Texte latin établi, traduit et annoté par
P. Doncœur S. J., et Y. Lanhers
1956

Nihil obstat : Paris, le 4 Janvier 1956, J. Leclerc, S. J., Doyen de la Faculté de Théologie.

Imprimatur : Paris, le 8 Janvier 1956, Pierre Girard, S. S., Vicaire général.

7Introduction

I
L’enquête ordonnée par Charles VII, le 15 février 1450, sur l’iniquité du procès de 1431

On sait que la Sentence de Réhabilitation de Jeanne, prononcée le 7 juillet 1456 par les délégués du pape Callixte III (l’archevêque de Reims et les évêques de Paris et de Coutances), ainsi que par l’inquisiteur Bréhal, mettait un terme définitif aux longues Enquêtes qui, reprises en 1455, avaient été ouvertes par le cardinal d’Estouteville en 1452. Mais elles avaient été précédées par celle qu’en 1450 avait décrétée Charles VII.

Après un silence mystérieux de vingt années, entré victorieux à Rouen, en novembre 1449, Charles s’émut sans doute de ce qu’il apprit des témoins survivants du premier Procès. Il donna ordre à Guillaume Bouillé, son amé et féal conseiller, de s’informer des nombreuses faultes et abuz qui entachaient le procès inique que les ennemis avaient mené contre Jeanne, par grant hayne, ainsi que des horribles cruautés de sa mise à mort.

Est-ce de lui-même que le Roi parla de venger la mémoire de Jeanne ? Faut-il voir plus qu’une coïncidence entre la date (15 février) du mandement donné à Bouillé et l’arrivée d’Agnès Sorel à Jumièges1 ? Faut-il attribuer à Bouillé lui-même la première pensée d’une réhabilitation de Jeanne, ce pourquoi le roi lui aurait donné commission ?

8En tous cas, l’acte de Charles VII prend place dans le grand sursaut d’énergie qui vient de lui faire reconquérir la Normandie et qui, bientôt, délivrera la Guyenne elle-même de l’occupation anglaise. Il ne cessera plus d’agir qu’il n’ait obtenu, six ans plus tard, la cassation de la sentence de Cauchon.

Quant à Bouillé, il sera jusqu’au bout le zélé protagoniste de la Réhabilitation. Homme de confiance du roi, théologien de renom, chanoine de Noyon, on le voit tour à tour ambassadeur de l’Université vers Charles VII ou ambassadeur de celui-ci à Rome. Il est remarquable que ce sera un professeur de théologie, ancien recteur de l’Université de Paris, qui jouera un des rôles principaux dans la procédure qui cassera la sentence inspirée, vingt ans plus tôt, par cette même Université. Il n’est pas moins piquant de voir le doyen du Chapitre de Noyon agir en faveur de celle que son évêque, Jean de Mailly, homme-lige des Anglais, avait conduite au supplice, contresignant la lettre de garantie accordée à Cauchon et à ses complices par le roi Henry VI. Singulier temps où l’un des théologiens les plus assidus au procès, Jean Le Fèvre, qui déclara Jeanne pertinace, contumace et désobéissante, ne fut nullement gêné de siéger comme juge subdélégué pour la réhabiliter en 1456, et où le même prélat, Jean de Mailly ayant assisté, en 1431, au couronnement du roi Anglais à Paris, recevait processionnellement, en 1443, Charles VII dans sa ville de Noyon !

Tout porte à croire que Bouillé fut choisi par Charles pour son loyalisme, et sans doute parce qu’on le savait, depuis longtemps, pressé de réparer l’iniquité commise par les Maîtres de Paris2. Quoiqu’il en soit, Bouillé allait prendre à cœur la mission dont la confiance royale le chargeait3.

La volonté du roi était fermement exprimée dans la Commission signée à Rouen, le 15 février, à la relation du grant Conseil :

  1. 9ce sont nos anciens adversaires et ennemys les Anglois qui ont fait faire le procès de Jeanne leur captive ;
  2. ils y ont commis plusieurs faultes et abuz ;
  3. enfin, c’est par grant hayne, iniquement,… et contre raison… qu’ils la firent mectre à mort tres cruellement.

Aussi le roi veut-il sçavoir la vérité dudit procès et la manière comme y a été procédé.

Il donne donc ordre formel à Bouillé de s’enquérir diligemment de et sur ce que dist est ; et a tous nos justicers, officiers et subgectz d’obéir à toute requête qui leur sera faite.

Après quoi Bouillé devra envoyer au roi et à son Grand Conseil, féablement close et scellée, l’information recueillie. Y seront joints toutes les escriptures et tous documents que, sous les contraintes qu’il jugera nécessaires, Bouillé aura requis de lui livrer.

Ainsi le roi sera en mesure de voir ce qu’il appartiendra par raison de ce faire.

C’est donc une procédure préliminaire qui a pour but d’éclairer la conscience du roi.

On remarquera :

  1. que Charles ne dit pas un mot de son propre honneur ; intéressé à voir Jeanne disculpée du crime d’hérésie et de sorcellerie, ainsi qu’il apparaîtra dans les Enquêtes postérieures ;
  2. que Charles ne met pas et n’aurait pas pu mettre en branle un tribunal d’inquisition, juridiquement capable de réviser et casser une sentence d’inquisition4.

Informé de ce qui s’est passé en 1431, il saura ce qui lui reste à faire.

Exécution des ordres du roi

Déjà présent, semble-t-il, à Rouen près de Charles, Bouillé entra aussitôt en action. Quinze jours après l’expédition de l’ordre royal, il ouvrit son enquête, en présence de messire Compaing Votes, notaire juré par les autorités apostolique et impériale, et de la cour archiépiscopale de Rouen.

Les 4 et 5 mars, comparurent sept témoins, quatre dominicains 10et trois prêtres séculiers. Et nous voici déjà en plein mystère.

Comment se fait-il qu’annoncée avec tant de fermeté, l’enquête, si nous en croyons le document qui nous la fait connaître, ne se soit pas poursuivie ? Le dossier a-t-il pour toute la suite péri ? Ou, si nous le possédons entier, quelle intervention a subitement interrompu l’enquête ? Il est impossible de résoudre cette énigme.

Si nous nous en tenons au document qui nous est parvenu, on ne peut manquer de supposer qu’un événement assez grave est venu suspendre l’action du Commissaire royal. Tout nous fait croire à une brusque interruption de la procédure. Deux journées, les 4 et 5 mars, sont mentionnées qui n’ont pas de suite ; est-ce vraisemblable ? Sept témoins seulement viennent déposer, alors que Rouen connaît encore de nombreux survivants, particulièrement bien informés. Pourquoi ne paraissent-ils pas ? Le couvent de Saint-Jacques envoie quatre religieux. Deux ont quelque chose à dire : Martin Ladvenu et Ysambard de La Pierre, qui ont fréquemment pris part aux séances du Procès et qui ont assisté Jeanne jusqu’au supplice. Deux autres : Jean Toutmouillé dépose n’avoir jamais paru aux sessions ; Guillaume Duval n’y a accompagné qu’une fois Ysambard. Pourquoi le seul qui pouvait apporter un témoignage du plus haut intérêt, Jean Lemaistre, qui a assisté Cauchon comme vice-inquisiteur, ne parut-il pas ? Il vit et prêche toujours à Rouen. Pour le ménager, ne fut-il pas convoqué ? Se refusa-t-il à parler ? Mais pourquoi aucun des nombreux chanoines assesseurs de Cauchon survivants ne figurent-ils pas ici ? Ni André Marguerie, que l’on retrouvera en 1452 et qui prit une part très personnelle au procès ; ni Loiseleur, instrument cynique de Cauchon, qui, disait-on, pleura en voyant Jeanne mourir ; ni Guillaume de Livet ; ni Geoffroy du Crotay ; ni Jean Tiphaine, qui soigna Jeanne malade et qui fit en 1456 une si intéressante déposition ; ni Caval, cité en 1452 et 1456 ?… Pourquoi aucun des témoins laïques, qui déposeront à Rouen plus tard, ne parle-t-il devant le Commissaire Royal : Pierre Cusquel, qui visita Jeanne en prison ; Maugier Leparmentier, qui fut convoqué pour mettre Jeanne à la torture ; ni Laurent Guesdon, qui assista avec le bailli de Rouen au supplice du Vieux-Marché ; ni ce brave lorrain Jean Moreau, qui recueillit les témoignages 11des enquêteurs envoyés en Lorraine par Cauchon, si mal reçus par l’évêque furieux des excellentes informations qu’ils lui rapportèrent ; ni le chaudronnier Husson Lemaistre, compatriote de Jeanne ; ni le lieutenant du bailli Pierre Daron, présent au Vieux-Marché ; ni tant d’autres qui auraient pu parler ? Tels le prieur de Longueville, G. du Désert, R. Grouchet, J. Basset, etc.

Sans doute, Bouillé entendit-il l’appariteur Jean Massieu et le notaire Guillaume Manchon. Mais comment se fait-il que les deux autres notaires Boisguillaume et Taquel ne les accompagnèrent pas ?

Enfin, pourquoi le plus autorisé des survivants, aujourd’hui archevêque de Rouen, Raoul Roussel, qui parut plus de quatorze fois aux séances du procès, qui émit plusieurs fois son avis pour déclarer Jeanne hérétique, ne vint-il pas éclairer la religion de l’enquêteur ? On a supposé que c’est par des motifs de réserve que Bouillé ne fit pas appel à ce prélat. C’est possible. Mais était-il si gêné par son passé, ce personnage, chanoine, puis archevêque par la grâce des Anglais, qui après avoir reçu solennellement en 1444 le duc d’York comme gouverneur de Normandie, ménageait en 1449 au roi Charles victorieux une plus solennelle entrée dans sa cathédrale, après avoir négocié avec lui la reddition de la ville.

On ne peut supposer ni que G. Bouillé ignorât ces personnages, ni que ceux-ci refusèrent d’obtempérer à une réquisition royale.

De plus, Charles VII avait mandé à Bouillé de recueillir aucunes escriptures, procès ou aultres choses touchant la matière. Il lui donnait pouvoir de contraindre par toutes voyes dues à se faire livrer ces documents qu’il devrait lui expédier. Or, Bouillé ayant cité à comparaître le notaire principal de Cauchon, comment se peut-il que Manchon ne lui ait pas remis les dossiers qu’il avait en sa possession5 ?

Tout ceci n’est explicable que par l’hypothèse d’une brusque 12interruption de l’enquête. À moins de recourir à une autre supposition, qui, ne voyant en nos mains qu’un dossier mutilé, laisserait croire que nous ne tenons le compte rendu que des deux premières journées, 4 et 5 mars, la suite ayant disparu.

En faveur de cette hypothèse les vraisemblances ne manquent pas.

Le dossier Bouillé ne nous est parvenu que sous de précaires garanties. Aucun des manuscrits du Procès canonique de Réhabilitation ne contient les dépositions de 1450 et n’en fait même mention. Ce silence s’explique cependant par le fait que la Commission de Charles VII n’avait aucun caractère canonique, émanant de la pure autorité laïque du roi.

Exclu des manuscrits notariés en 1456, on ne connaît aucun Instrument public où soient consignés les actes de Bouillé. Ils ne nous sont connus que par la Relation Sommaire des deux Procès, dont nous transcrivons ici le texte. Où l’auteur de cette Relation l’a-t-il trouvé, il ne nous en dit rien.

Il l’introduit par un simple sequitur rédactionnel, qui relie le document Bouillé aux documents antérieurement transcrits : lettre de Henry VI à l’empereur, et lettres de l’Université de Paris, notifiant au pape et aux cardinaux la sentence portée par Cauchon.

Néanmoins le rédacteur copie un instrument officiel puisque son texte débute par l’intitulé de Guillaume Bouillé, qui se présente à la première personne :

per me Guillermum Bouillé…, vigore commissionis regie michi… facte. [par moi, Guillaume Bouillé, en vertu de la commission royale qui m’a été confiée.]

Il mentionne ensuite la présence du notaire Compaing Votes (Socius Votes), chargé évidemment de rédiger officiellement le compte rendu des séances.

Or, à cette introduction de style ne répond après la dernière déposition aucune des clausules ordinaires, notamment aucune attestation ni signature de notaire, indices d’un document mutilé ou inachevé.

Signification et valeur du dossier Bouillé

Quoiqu’il en soit des problèmes qu’il pose, le dossier que nous possédons est de très grand prix.

Son authenticité tout d’abord est certaine.

Lorsque, sur la fin de sa carrière, vers 1630, Edmond Richer, 14syndic de la Faculté de théologie de Paris, consulta, pour écrire son Histoire de la Pucelle d’Orléans, les bibliothèques et les dépôts de manuscrits, il découvrit notamment6 le mandement original de Charles VII

scellé de cire jaune sur simple queue. Et sur ledit seau couvert de parchemin est écrit : Mandatum regis ad Guillelmum Bouillé, decanum Noviomensem, super informatione facienda de processu alias facto contra Johannam dictam la Pucelle7. [Mandement du roi à Guillaume Bouillé, doyen de Noyon, concernant l’enquête à mener sur le procès autrefois fait contre Jeanne dite la Pucelle.]

Par ailleurs, le manuscrit que nous possédons de la Relation Sommaire des deux Procès, remontant au XVe siècle, même s’il est incomplet, nous offre un texte fort autorisé, dont il nous faut marquer le caractère et l’intérêt.

Et tout d’abord sur quoi devait porter l’enquête ?

Le mandement de Charles VII précise qu’il veut être informé :

  • sur le rôle des Anglais dans le procès de 1431 ;
  • sur les faultes et abuz par eux commis ;
  • sur la haine qui les inspira ;
  • sur la cruauté de la mise à mort de Jeanne.

Bouillé en rédigea-t-il des articles ou un questionnaire ? Il apparaît seulement que le mandement de Charles VII dit que l’enquête portera super nonnullis articulis [sur un certain nombre d’articles] et que Martin Ladvenu fut interrogé super certis punctis [sur certains points]. Mais, tandis que, dans les interrogatoires de 1452 et 1456, les réponses des témoins se réfèrent nettement à un questionnaire de XII, XXVII ou XXIX articles, on ne voit ici rien de semblable.

Autant qu’on le peut inférer des dépositions exprimées, les témoins furent interrogés sur les dispositions des juges. Martin Ladvenu estima que beaucoup agirent potius amore Anglicorum 15et eorum favore… quam zelo justitiae et fidei [plutôt par amour des Anglais et par faveur envers eux… que par zèle pour la justice et la foi]. Tout particulièrement Cauchon. Quant à eux, les Anglais poursuivaient Jeanne de leur haine, dans un désir de vengeance (Toutmouillé). Massieu et Manchon dénoncent, leur volonté de déshonorer le roi de France8. Quant aux faultes et abuz de la procédure, ce que tous sauf Beaupère relèvent, c’est le fait que Jeanne, malgré ses protestations, fut maintenue en prison anglaise ; — ou elle fut sujette aux violences des Anglais ; — ce qui l’obligea à reprendre ses habits d’homme ; d’où l’accusation de relapse. La mauvaise foi des juges apparaît en ce qu’ils cherchaient à embarrasser Jeanne par des questions difficiles ; en ce qu’ils refusèrent d’accepter son appel au pape et sa soumission à l’Église ; en ce que nul compte ne fut tenu des avis de Me Lohier et de l’évêque Jean de Saint-Avit sur les irrégularités de la procédure ; en ce que Jeanne fut enfin mise à mort sans qu’aucune sentence ait été prononcée par le juge séculier ; et que, devant l’admirable piété de Jeanne, il n’est pas jusqu’au bourreau qui n’ait pleuré sur cette cruauté.

On voit que, suivant la Commission royale, ce n’est pas sur Jeanne que l’on enquête, mais sur la conduite du procès.

Une seule voix, inattendue celle-là, mit Jeanne en question. On vit, en effet, se présenter devant le Commissaire royal, Me Jean Beaupère, arrivé soudainement de Besançon, l’un des plus compromis anglophiles, acharné contre Jeanne. Il venait maintenant faire valoir ses titres de bon Français, afin de revendiquer le canonicat de Rouen, qu’il avait reçu de la grâce de Henri VI, le 2 avril 1431, au plein milieu du procès de Jeanne ! Avait-il été convoqué par Bouillé ?

Il semble probable que, très convaincu de son importance, Jean Beaupère tint à opposer à des témoignages trop émus un jugement doctoral. Il dédaigna de répondre aux questions posées sur la procédure. C’est à Jeanne que, froidement, il s’en prit. Celle qu’il avait naguère déclarée impie, idolâtre, schismatique, hérétique (12 avril 1431), il la tenait toujours pour singulièrement subtile, de subtilité appartenant a femme, et voyait dans ses apparitions plus des effets de cause naturelle et invention humaine, que de cause surnature. Il ajoutait, — et cette 16importante déposition a été ignorée de Quicherat9 — que,

a son avis, se ladicte Jehanne eust eu saiges et frans directeurs, elle eust dit moult de parolles servant a sa justification, et taeu plusieurs qui faisoient a sa condempnation.

Sans omettre de se vanter qu’en deux circonstances, lui du moins, la conseilla sagement, Beaupère esquiva les questions relatives aux juges et aux Anglais, et fut heureux d’invoquer un décisif alibi, ayant quitté Rouen trois jours avant le supplice de Jeanne, et ne pouvant ainsi parler de sa pénitance final10.

Si déplaisante que soit la déposition de Beaupère, elle n’encourt pas le reproche qui pèse sur les dominicains Ladvenu et Ysambard, de se montrer vraiment trop complaisants au pouvoir.

Maintenant que triomphe le roi de Jeanne, ils s’étendent sur l’éloge de la victime de Cauchon et des Anglais (qu’ils chargent aujourd’hui sans danger), et ne manquent pas d’insister sur le rôle charitable (et courageux, pensent-ils), qu’ils tinrent durant les dernières heures de Jeanne. Ils oublient trop qu’au moment décisif du procès, ils souscrivirent aux abominables délibérations du 12 avril, des docteurs de Rouen, et du 19 mai, de la faculté de théologie de Paris, qui, sur le vu des XII articles mensongers, déclaraient Jeanne : menteuse, inspirée du diable, errant dans la foi, sorcière, idolâtre, blasphématrice de Dieu et des saints, schismatique, apostate et hérétique. Quant à Ysambard, le 29 mai, il la déclara relapse et qu’il faut l’abandonner au juge séculier11.

Dans sa déposition de 1452, Ysambard déposera que, parmi les assesseurs de Cauchon, les uns agissaient par esprit partisan ; d’autres, les docteurs anglais, par passion de vengeance ; d’autres, les docteurs de Paris, par cupidité d’argent : alii vero, timore ducti, ut praefatus Subinquisitor, etnonnulli alii, dequibus non recolit12 [quant aux autres, certains étaient mus par la crainte, comme ledit sous-inquisiteur et quelques autres dont il ne se souvient plus]. Accordons à Ysambard que, lorsqu’il émit son avis 17sur les crimes de Jeanne en 1431, ce fut timore ductus [mu par la crainte]. Il ne s’en souvenait déjà plus en 1450…

Il était humain, trop humain, que, redevenus Français, les acteurs ou les témoins du drame de 1431, se donnent aujourd’hui un rôle plus beau qu’il ne convenait. Il faudra lire leurs déclarations avec, en surimpression, ce que nous apprennent les actes de la condamnation. Mais en vérité que nous importe leur personne ! Jeanne seule nous intéresse. Si leur silence a trahi sous la menace anglaise, ce qu’ils disent d’elle aujourd’hui est recevable. Charles savait à quoi s’en tenir sur leurs sincérités opportunistes.

Si l’enquête de Bouillé n’alla pas plus loin pour le moment, la révision suivrait son cours. On peut croire que la volonté royale était décidée à vaincre les résistances ou les hésitations. Il fallut six années pour qu’elle triomphât.

Établissement de notre texte

En tête du second volume de son édition des Procès, Jules Quicherat avait publié une : Informatio praevia super iniquitate prioris processus [Information préliminaire sur l’iniquité du premier procès]. C’est l’Enquête prescrite par Charles VII, le 15 février 145013. En raison des documents trouvés depuis, le texte ainsi publié n’est plus recevable.

Il reproduit en effet une copie défectueuse extraite d’un manuscrit du XVIe siècle, dit de Soubise, insérée par L’Averdy au tome III des Notices et extraits…

Or, ce manuscrit de Soubise, n’est que la copie d’un manuscrit dit d’Armagnac.

Et ce manuscrit, dit d’Armagnac, n’est lui-même qu’une très mauvaise traduction et transcription, faite vers 1540, pour Diane de Poitiers, d’une Relation Sommaire des deux Procès, dont nous possédons aujourd’hui un texte primitif, rédigé vers la fin du XVe siècle.

Faute de pouvoir atteindre le document original dont procède cette transcription, c’est à elle que l’on doit aujourd’hui recourir.

C’est la raison d’être de la présente édition.

18Deux faits sont à rappeler au préalable :

  1. non seulement nous ne possédons pas l’instrument original (ni une copie authentique) du dossier de Bouillé, mais aucun des mss. officiellement notariés du procès de Réhabilitation ne l’a inséré parmi les documents transcrits dans les actes.
  2. seule la Relation Sommaire des deux Procès fait état de ce dossier dans tous les mss. que nous en connaissons.

Le premier fait n’a rien de surprenant. Que ni le cardinal d’Estouteville en 1452, ni les délégués du Pape, auprès des quels se trouvait G. Bouillé en 1455 et 1456, n’aient fait reproduire les dépositions de 1450, ne fait difficulté. Nous avons dit que l’enquête prescrite par Charles VII, de caractère purement séculière, n’avait pas qualité pour réviser un procès canonique d’inquisition. Charles VII n’avait pas d’ailleurs eu ce propos. Les délégués pontificaux ne firent pas état des dépositions reçues par Bouillé, que celui-ci d’ailleurs ne versa pas lors des enquêtes canoniques. Aussi durent-ils citer à nouveau ces témoins, lorsqu’ils engagèrent leur procédure.

Le second fait est remarquable. Nous ignorons les circonstances dans lesquelles un compilateur inconnu rédigea cette Relation Sommaire des deux Procès, destinée à une singulière fortune. C’est certainement à l’intention de quelque grand personnage qu’il réunit, intelligemment, les pièces les plus capables de donner l’essentiel des écritures très compliquées de la Condamnation et de la Réhabilitation. Il semble qu’il fit son travail peu de temps après la conclusion de l’affaire, soit dans la seconde moitié du XVe siècle.

Nous avons précédemment décrit les mss. qui contiennent cette Relation14. Nous avons montré que tous les mss. (de Paulmy, de Soubise, de Bologne), qui dérivent du ms. de Diane de Poitiers, n’ont aucune autorité. Mais de plus que le ms. de Diane est une traduction d’un texte antérieur latin, lequel se trouve dans un ms. provenant de la bibliothèque du vicomte de Monteil. 19Ce ms. est le seul témoin auquel on puisse aujourd’hui se référer15.

Après l’Instrument des Sentences (que nous avons déjà publié), il contient : (fol. 11 v°) le Summarium de Bréhal ; puis, revenant en arrière, les Lettres envoyées, en 1431, par Henry VI à l’empereur et par l’Université de Paris au pape et aux cardinaux (fol. 17-20) ; au fol. 20 v°, il introduit par l’intitulé Sequitur nomina, etc., le dossier de Bouillé, tel que nous le présentons plus loin (fol. 20 v°-32). Suivent les consultations de Pontanus, de Th. de Lelli et de Pierre Lhermite16. Et enfin, la Sentence de Réhabilitation de 1456.

Le dossier de Bouillé se trouve ici dans une forme particulièrement valable, puisqu’il présente les quatre dépositions des dominicains sous leur forme latine primitive, les trois dépositions des séculiers étant en français. Il est clair que le rédacteur de la Relation Sommaire n’a pas traduit en latin des textes qu’il aurait trouvés en français. Ces rédactions latines sont donc primitives. Quant aux trois dépositions en français, il semble qu’elles se trouvent ici dans leur teneur originale.

C’est donc le texte de notre ms. de la Relation Sommaire (RS) que nous suivrons, sauf pour le Mandement de Charles que nous corrigeons d’après le ms. de Richer (R) ci-dessus mentionné.

Il restera à corriger quelque fautes évidentes du copiste, et, dans un cas d’omission par homoioteleuton (saut du copiste entre deux fins semblables entraînant la perte d’un passage), à restituer les mots omis en recourant, cette fois, à la traduction de Diane (D), si elle nous présente des garanties17.

Tel qu’il s’offre ainsi établi, le dossier de Bouillé a cet intérêt que, si les dépositions de Martin Ladvenu, d’Ysambard, de Massieu et de Manchon sont reprises18 en 1452 ou 1456, celles de Jean Beaupère, si caractéristique, ainsi que celles de Duval 20et de Toutmouillé ne sont consignées que dans ce dossier. Canoniquement sans valeur, tous ces documents gardent au point de vue de notre information tout leur prix.

Il est curieux de constater que, dès le XVe siècle, ce sont les dépositions de 1450 que l’on recueillit dans les Sommaires destinés aux princes ou princesses qui s’intéressaient à Jeanne, tandis que l’on ne semble pas prêter attention aux copieuses enquêtes de 1452 et 1456, restées enfouies dans le chaos des énormes copies du procès de Réhabilitation.

Nous remercions vivement M. le Docteur W. S. Scott et M. Varin, Conseiller Culturel à l’Ambassade de France à Londres, qui se sont aimablement employés à faire filmer le manuscrit de Diane de Poitiers, conservé dans les réserves du libraire W. Robinson.

II
Le codicille de Guillaume Bouillé

Inséparable du dossier de l’Enquête royale menée à Rouen en 1450, nous possédons le Mémoire historico-théologique dans lequel Guillaume Bouillé dénonça l’iniquité du procès de 1431, établit l’innocence de la Pucelle et adjura Charles VII de pour voir à sa réhabilitation. C’est ce Mémoire que nous présentons ci-après.

Composition et date

Bouillé ne dit pas si ce Mémoire lui a été demandé par Charles VII. Tout indique plutôt qu’il l’a rédigé de sa propre initiative, croyant de son devoir d’adjurer le roi d’agir en faveur de Jeanne. Les expressions qu’il ne craint pas d’employer sont une vraie mise en demeure :

Serenissima Majestas magnificare tenetur innocentiam… Puellae, facereque examinari processum adversus illam minus juste conjectura per doctissimos viros theologos et juristas, quatenus, si dictas processus ab eis inveniatur vitiosus seu dejectuosus in forma seu materia, quod omnia procurentur 21reparari et tandem, retractetur sententia contra dictam Puellam lata… (p. 69).

[Votre Sérénissime Majesté est tenue de proclamer l’innocence de la Pucelle, et de faire examiner par les plus savants théologiens et juristes l’injuste procès instruit contre elle, afin que s’ils jugeaient ce procès vicié ou défectueux, tant sur la forme que sur le fond, toutes les mesures soient prises pour réparer les torts et qu’enfin la sentence prononcée contre la Pucelle soit annulée.]

L’exorde en était solennel :

Ad honorem et gloriam Regis regum, qui causas defendit innocentum, hunc codicillum summarie, licet rudi et indigesto modo, ego Guillelmus Bouillé, decanus Noviomensis, theologorum minimus, exhibere dignum duxi… ut… aliqualis prebeatur occasio utriusque juris divini pariter et humani peritissimis doctoribus, lacius ac amplius inquirendi veritatem super iniquo judicio… facto contra prefatam Johannam Puellam.

[Pour l’honneur et la gloire du Roi des rois, défenseur des innocents, moi, Guillaume Bouillé, doyen de Noyon, le moindre d’entre les théologiens, ai estimé devoir présenter ce modeste codicille, quoique simple et peu travaillé, afin d’offrir aux plus éminents docteurs tant en droit divin qu’humain, l’occasion d’examiner plus amplement et en profondeur la vérité touchant le jugement inique rendu contre Jeanne la Pucelle.]

D’où il ressort :

  1. que pour Bouillé la condamnation a été inique ;
  2. que les savants doivent en faire la révision ;
  3. et que l’honneur du roi est engagé à ne plus garder le silence sur la sentence inique, scandaleuse qui attente à sa couronne.

Il insiste :

Quelle tache sur le trône royal, si dans l’avenir nos adversaires pouvaient redire que le roi de France a entretenu dans son armée une femme hérétique et invocatrice des démons.

Tout ceci marque que c’est Bouillé, et non le roi, qui prend les initiatives19 :

hunc… codicillum regie celsitudini exhibere dignum duxi20.

[j’ai jugé digne de présenter ce codicille à votre altesse royale…]

De ces déclarations on peut déduire :

  1. que les juristes et les théologiens n’ont pas encore ouvert d’enquête sur le procès ;
  2. que Charles VII s’est jusqu’ici tenu dans le silence sur une condamnation qui infâme sa couronne.

D’où il ressort que Bouillé se place au premier rang des docteurs qui ont étudié le procès et protesté contre son iniquité.

Nous ne serons plus étonnés du rôle que nous le verrons tenir, depuis la présidence de la commission d’enquête de 1450, jusqu’au jour des solennelles réparations, puisqu’on le dit chargé du grand sermon qui magnifiera Jeanne au lieu même de son supplice21.

22De 1450 à 1456, Bouillé jouera un rôle de premier plan, après les délégués pontificaux et l’inquisiteur. Le fait que c’est lui que le cardinal d’Estouteville enverra avec Jean Bréhal pour annoncer à Charles le résultat des enquêtes menées en 1452 depuis le 2 mai jusqu’au 22, signifie bien que personnellement il est qualifié entre tous pour cette mission, et que c’est à lui qu’on veut faire honneur des heureux résultats de l’enquête. Il sera reçu avec vin d’honneur par la municipalité d’Orléans. Aussi quand en 1455 sur l’ordre du pape le procès entrera dans sa phase définitive, le retrouverons-nous présent, les 17 et 18 novembre, à Paris, à l’ouverture de la procédure ; puis à Rouen, le 20 décembre, et toujours aux côtés de l’archevêque de Reims pour recevoir à Orléans les dépositions de Dunois, de G. de Ricarville et de J. Luillier (22 février, 8 et 16 mars 1456). Enfin quand il accompagnera à Rome l’inquisiteur Bréhal, la volonté royale qui le désigne pour porter au pape la relation du procès, témoigne qu’on veut rendre hommage à la science et au dévouement dont Bouillé a fait preuve, depuis le jour où il avait généreusement pris en mains la cause de Jeanne22.

Il convenait que Guillaume Bouillé fût le premier à l’honneur, ayant été le premier à la peine.

La date, il est vrai, de la rédaction du Mémoire qui nous occupe est difficile à déterminer. Le texte n’en porte aucune. Étant donné tout ce que nous venons de voir, on le situerait volontiers avant 1450, mais après l’entrée de Charles VII à Rouen, en novembre 1449, puisque Bouillé utilise le Procès sous la forme de minute et de procès-verbal. On se souvient que Bouillé écrit pour décider le roi à rompre enfin le silence et à agir. Cette adjuration se comprend mal après que Charles a solennellement confié à Bouillé une enquête officielle. Les termes employés dans le mandement royal sont trop vigoureux pour que Charles mérite encore d’être taxé de défaillance.

Par ailleurs, on comprend pourquoi Bouillé fut choisi pour 23ouvrir la première enquête… Il s’est désigné23. Aussi les historiens, Quicherat, Ayroles, Belon et Balme, n’hésitent pas à reconnaître dans notre Mémoire le premier en date des traités écrits en vue de la Réhabilitation24. Quicherat le disait25 : le premier écrit contre la validité du jugement… On verra qu’il a dû être composé avant la délivrance des pouvoirs, donnés par Charles VII, le 15 février 1450. Belon et Balme, dans leur édition de Bréhal26, estiment que c’est après l’enquête de 1450 que le roi et son conseil firent rédiger un mémoire… Nous croyons que (ce) mémoire eut pour auteur G. Bouillé. (Nous avons dit pourquoi il semble au contraire que Bouillé a écrit spontanément et non par ordre.) Ils ne pensent pas qu’il ait pu être rédigé après 1452, et déclarent partager complètement la manière de voir de Quicherat, assignant à cet écrit la date de 1450, mais après l’enquête de mars.

La difficulté d’assigner au Mémoire la date de 1449-1450 vient de ce que le texte que nous possédons allègue à plusieurs reprises les dépositions des témoins en faveur de Jeanne27.

Quelles sont ces informations et quels sont ces témoins ? Bouillé ne le dit pas. L’examen des Enquêtes de 1450, 1452, et 1456, ne nous éclaire pas davantage. Il ne peut invoquer les dépositions de 1456, postérieures de toute évidence à la rédaction de son Mémoire28. Quant aux informations de 1450 et 1452, on n’y trouve, ni textuellement ni équivalemment, les allégations de Bouillé29.

Une autre difficulté vient de ce que Bouillé constate que les 24prédictions de Jeanne se sont réalisées. Ce sont la délivrance d’Orléans et le Sacre (1429) ; la paix avec le duc de Bourgogne (1435) ; la reddition de Paris (1436) et enfin les Anglais chassés du Royaume. Quae omnia evenerunt [Tout cela s’est produit], dit-il. Or, si en 1449, Charles est en voie de recouvrer toute la Normandie, il ne reconquit la Guyenne qu’en 1453. Faut-il donc reculer jusqu’à cette date la rédaction du Mémoire ? Nous ne le croyons pas ; car, d’une part, Bouillé a pu ajouter ce dernier trait, lorsqu’il remit son Mémoire remanié aux délégués apostoliques ; et d’autre part on peut parler du Royaume délivré des Anglais, sans y inclure la Guyenne, qui depuis trois cents ans relevait des rois d’Angleterre.

Nous croyons donc que ces difficultés n’infirment pas les propres paroles de Bouillé dans sa préface, qui désignent le Mémoire comme le premier composé en vue de la Réhabilitation. Nous estimons vraisemblable qu’il a été écrit très peu avant 1450, dans une rédaction dont les manuscrits témoignent qu’elle a été plus tard remaniée en quelques expressions.

Plan et Méthode

Bouillé dénomme Codicillum son rapport. Ce qui signifie Mémoire ou Requête. Le mot est très exact.

Son but est, nous l’avons vu, de provoquer Charles VII à défendre à la fois l’honneur de Jeanne et celui de sa couronne30.

Bouillé s’excuse de procéder stylo rudi et indigesto modo [dans un style rudimentaire et de manière désordonnée] ; mais s’il l’a fait summarie [de manière concise], c’est pour lui assurer plus d’efficacité. Il estime que la brièveté sera sa force : in paucioribus via magis [faire plus avec moins de mots]31. Aussi s’en tiendra-t-il à trois points principaux. Et en effet 27son Mémoire sera plus probant que les traités diffus et sur chargés, non sans pédanterie, qui le suivront.

Sobre et sommaire, son travail n’en sera pas moins scrupuleusement documenté. Il s’est procuré le procès de Cauchon. Non seulement il précise qu’il l’a eu in originali [dans sa version originale], mais il a recouru à la Minute des notaires primam minutam seu notulam processus [la première rédaction ou brouillon du procès] (p. 117)32 ; et a soin de noter qu’il a travaillé sur deux manuscrits du dossier, l’un sur parchemin et l’autre sur papier. Il ne s’est pas contenté de le citer au passage ; il l’a examiné de près33. Tellement qu’il ose avancer que nusquam in toto processu reperitur quod dictas sanctas venerata fuerit ibidem [on ne trouve nulle part, dans l’ensemble du procès, qu’elle y ait vénéré lesdites saintes], c’est-à-dire à l’arbre des Fées (p. 99). Par contre, il relèvera que telle affirmation de Jeanne se trouve souvent, multotiens, dans le procès (p. 105).

Nous l’avons vu invoquer des informations de témoins dignes de foi. Il a donc été aux sources les plus authentiques.

Par ailleurs, il ne se réfère à aucun rapport de théologien ou de juriste l’ayant devancé dans l’examen du procès. Ce qui marque encore son antériorité. Du seul rapport de Gerson, envoyé à Charles, en 1429, il transcrit quelques lignes, sans le nommer, il est vrai34.

Au contraire des docteurs de son temps, Bouillé sera très sobre en fait de citations théologiques. Il invoquera parfois saint Paul, une ou deux fois saint Jérôme ou saint Augustin. Plus souvent il citera le Décret ou les Décrétales de Grégoire IX. Trop candidement, il rappellera des faits légendaires, narrés par Vincent de Beauvais. Saint Thomas lui-même ne sera invoqué que rarement. Sobriété tout à l’honneur de celui qui se nommait, comme tous les autres d’ailleurs, minimus theologorum [le moindre d’entre les théologiens].

28Loin, de vouloir dépasser sa compétence, il avertit que son Mémoire ne prétend qu’à fournir aliqualis occasio [quelque occasion] aux éminents docteurs en l’un et l’autre droit divin et humain, qui plus amplement et plus à fond scruteront le dit procès inique de Cauchon (p. 67). Aussi ne dira-t-il sa pensée que salvo peritiorum judicio [sous réserve du jugement de plus savants.] (p. 71).

D’ailleurs, il s’en remettra aux juristes de la forme du procès ; ce qu’il montrera, c’est que la sentence est mal fondée en fait, puisqu’elle invoque de fausses accusations, et tait les circonstances justifiantes ; en sorte qu’il apparaîtra qu’elle est totalement dénuée de valeur et d’effet ; et qu’ainsi tout le procès doit s’écrouler (p. 70).

Le Mémoire se construit très simplement sur le plan suivant :

  • La Préface : Intention du Mémoire.
  • Première partie : Réfutation des trois principaux chefs d’accusation :
    1. Jeanne est accusée d’avoir menti en inventant les apparitions.

      Bouillé établit la sincérité de Jeanne dont les signes sont certains : son humilité ; — son bon sens (discretio) ; — son courage moral (patientia) ; — sa franchise (veritas) ; — sa charité (caritas). Enfin, par ce signe authentique du Bon Esprit, dont le propre est d’abord d’inspirer la crainte, mais finalement de laisser l’âme dans la joie.

    2. Elle est accusée d’avoir violé la loi de Dieu en portant des habits d’homme.

      Tous les théologiens admettent qu’en certains cas la chose est légitime et vertueuse.

    3. Elle a refusé de se soumettre à l’Église.

      C’est faux, puisque maintes fois Jeanne en a appelé au pape.

  • Seconde partie : Réfutation des XII articles de l’acte d’accusation.

    Bouillé montre pour chacun qu’ils ont été rédigés non veraciter, mendaciter, imperfecte et calumpniose [de manière non véridique, mensongère, imparfaite et calomnieuse]. Il l’établit en les confrontant avec les déclarations formelles de Jeanne, consignées dans les actes mêmes du procès.

  • Enfin dans sa conclusion Bouillé établit que, n’ayant pas été hérétique, Jeanne ne peut en aucune façon être traitée en relapse.

29
Effets obtenus par le Mémoire

L’incertitude où nous sommes de la date du Mémoire rend difficile de préciser les résultats qu’il obtint.

Si le Mémoire fut présenté à Charles VII en 1449, il faut lui faire honneur de la décision prise par le roi de commencer la procédure de la Réhabilitation. En ce cas, le mandement du 15 février 1450, qui instituait la commission d’enquête, fut la réponse royale à la mise en demeure de Bouillé. Son plaidoyer avait porté.

S’il faut retarder le Mémoire après l’enquête de 1450, on lui assigne plus difficilement une suite. Deux ans s’écoulèrent sans que rien ne se produisît apparemment.

L’enquête elle-même conduite par Bouillé en mars, tourna-t-elle court ? Fut-elle interrompue ou suspendue ? et par quelle autorité ? Nous avons montré que le dossier que nous possédons est brusquement arrêté après la déposition de Beaupère, le lendemain même de l’ouverture des informations. Le roi avait prescrit à Bouillé de lui apporter, ou à la rigueur de lui envoyer, mais féablement close et scellée, l’information recueillie, ainsi que aucunes escriptures, procéz, ou autres choses touchant la matière qu’il aurait pu rassembler35. De tout cela nous ne trouvons aucune trace36.

Il est invraisemblable que le roi se soit tout à coup désintéressé de l’affaire et que Bouillé ait renoncé à la poursuivre. Nous connaissons mal ce qui s’est passé durant deux ans37. Mais la suite montre que Bouillé s’était imposé à l’attention et que son Mémoire n’avait pas été oublié.

Lorsqu’en 1452, le cardinal normand Guillaume d’Estouteville avait été envoyé en France comme légat pour négocier la paix 30entre les princes chrétiens, à peine avait-il rencontré le roi à Tours, en février 1452, qu’il reprit à nouveaux frais et, cette fois en sa qualité de légat, les informations de 1450. Fut-ce à la requête du roi ? Fut-ce à l’instigation de Bouillé ? Nous le voyons dès le mois d’avril s’adjoindre l’inquisiteur Jean Bréhal, et citer à comparaître, devant lui et Bréhal à Rouen, dix-sept personnages, qui auraient à répondre à 12 articles relatifs à la conduite du procès de 143138. Le 2 mai, comparaissait le notaire de Cauchon, Guillaume Manchon ; suivi de plusieurs autres ; mais le 6, d’Estouteville, appelé hors de Rouen, déléguait pour le remplacer un chanoine de Rouen, assez en vue, maître Philippe de la Rose, qui entendit les dernières dépositions, les 8 et 9 mai. Le 10, les notaires signaient le dossier. Douze jours plus tard, de Paris, le cardinal légat désignait Guillaume Bouillé pour accompagner l’inquisiteur auprès de Charles VII pour lui rendre compte des informations recueillies. Ce seul fait témoigne que Bouillé était considéré comme l’homme le plus au courant de l’affaire. Nous verrons qu’en 1455 et 1456 il reprit une place de premier plan dans la poursuite et la conclusion du procès. C’est bien la marque que ses interventions dans la première enquête et dans celle de 1452 avaient été appréciées. Le Mémoire, qui avait réclamé la révision et en avait jeté les bases, obtenait enfin gain de cause. Il n’est pas douteux que c’est à Guillaume Bouillé que l’honneur de Jeanne doit d’avoir été vengé des infâmes accusations et de l’inique sentence de Cauchon. L’histoire retient son nom comme celui du premier ouvrier, de l’initiateur de la Réhabilitation de la Pucelle.

Manuscrits et éditions

Le Mémoire de Bouillé a été inséré dans les copies du Procès de Réhabilitation. Ce sont :

  • B. N. lat. 8838, dit de d’Urfé

    Décrit par Quicherat (V, 397, 398 et 438-447) et par Champion, Notices des manuscrits du Procès de Réhabilitation, p. 29. Voir notre édition de La Minute…, p. 23-25. Le Mémoire se trouve dans la partie que Quicherat estime d’une écriture du XVe siècle ; 31folio 113 v° : Tenor certi codicis… à 119 v° expl. …rediisse invenitur.

  • B. N. lat. 5970

    Copie authentique signée par les deux notaires, Le Comte et Ferrebouc. Quicherat estime que c’est la copie déposée par Louis XI au Trésor des Chartes (Q, V, 447-449 ; — Champion, Notices…, p. 9-13. Le Mémoire se trouve aux folios 160-164.

  • British Museum, Ms. Stowe 84

    Décrit par Champion, Notices…, p. 13-23. C’est une copie signée des deux notaires, que Champion croit être la copie déposée par Louis XI au Trésor des Chartes. Le Mémoire se trouve au folio 164 : Tractatus venerabilis…, jusqu’à 171.

Éditions

Le Mémoire a été publié en extraits par Quicherat (III, 322, 326) et plus abondamment, en traduction, par Ayroles, La Pucelle devant l’Église de son temps, p. 214-232.

Lanéry d’Arc en publia en 1889 le texte intégral dans son volume Mémoires et consultations en faveur de Jeanne d’Arc, p. 323-351. Mais cette édition est un tissu de si mauvaises leçons qu’elles en rendent la lecture souvent inintelligible.

La présente édition a été établie sur le meilleur manuscrit, B. N. lat. 8838 (U) collationné avec les mss. B. N. lat. 5970 (N) et Stowe (St). En deux ou trois passages, certainement fautifs, le texte n’a pu être rétabli par ces collations.

Nous remercions vivement M. Pierre Tisset, Professeur à l’Université de Montpellier, qui a bien voulu suivre de près et conseiller cette édition, ainsi que M. Jean-Paul Trabut-Cussac qui a pris soin de collationner le Codicille dans le manuscrit du British Museum.

32
Sigles employés

  • Q (Quicherat)

    Procès de condamnation et de Réhabilitation de Jeanne d’Arc dite la Pucelle, 5 vol.

  • Ch (Champion)

    Pierre Champion, Procès de condamnation, 2 vol.

  • M (Minute)

    Paul Doncœur, La Minute française des interrogatoires de Jeanne la Pucelle.

  • RS (Relation Sommaire)

    Ms. dit de la Relation sommaires des deux Procès (Bibliothèque privée).

  • D (Diane)

    Ms. dit de Diane de Poitiers (Bibliothèque privée).

  • U (Urfé)

    B. N. lat. 8838. Ms. dit d’Urfé.

  • N

    B. N. lat. 5970.

  • St (Stowe)

    British Museum, Ms. Stowe 84.

Notes

  1. [1]

    N’était-ce pas elle qui, un an plus tôt, avait obtenu du Roi la sentence d’acquittement de Brézé ? (Voir Vallet, Histoire de Charles VII, t. III, p. 142 ; et de Beaucourt, Histoire de Charles VII, t. IV, p. 215-216.

  2. [2]

    Nous verrons qu’il est possible que le Traité ou Codicille de Bouillé en faveur de Jeanne ait précédé la Commission dont il fut investi par le roi.

  3. [3]

    Nous trouvons dans un fragment de compte royal qu’il faudrait dater avec précision, mais qui se situe certainement vers 1451, la mention suivante :

    A Maistre Guillaume Bouillé, maistre en théologie et doien de Noion, la somme de 100 livres à lui ordonné par ledit roole et que le Roy nostre sire lui a donné pour vacquer et besoiongner en aucunes choses touchant le fait de feue Jehanne la Pucelle que les Anglais firent pieça ardoir a Rouen. Pour ce par la quictance dudit doien sur ce faite et cy rendue …… C l. t. — (A. N. 108 Mi 8.)

  4. [4]

    Les cas sont nombreux où le roi ordonne à l’évêque assisté d’inquisiteur de procéder contre des hérétiques dans son royaume. Charles VI avait ainsi agi, en 1413, contre les hérésies de Jean Petit, et Henry VI en ordonnant à Cauchon de procéder contre Jeanne.

  5. [5]

    Richer (éd. Dunand, II, 163) affirme, sans en donner de preuve, que

    en vertu des lettres [de commission de Charles VII], maistre Guillaume Bouillé, ayant eu plusieurs advis et cognoissance de tous les actes du procez contre la Pucelle, en fit faire plusieurs copies, qui furent envoiées à plusieurs prélats et docteurs, tant en théologie qu’en droit civil et canon ; et mesme à deux auditeurs de rote, sçavoir Paulus Pontanus et un nommé Theodoricus, et autres personnes versées en telles matières, pour en avoir leur advis.

  6. [6]

    Probablement au Trésor des Chartes, pense J. Quicherat (Procès, V, p. 420). P. H. Dunand, dans sa précieuse édition de l’ouvrage de Richer demeuré manuscrit (B. N. fr. 10448), affirme que c’est en effet au Trésor des Chartes que Richer trouva cette pièce. Il n’apporte aucune preuve de ce que Quicherat donnait comme une probabilité. En tous cas, le document vu par Richer n’a pas été retrouvé. La copie qu’en donne Dunand (II, 161 et note) n’est pas très exacte. Nous reprenons le texte sur le ms. de la B. N.

  7. [7]

    Parmi les documents trouvés alors par lui, Richer signale

    un sermon que Me Guillaume Erard, docteur en théologie de Paris, fit à Rouen au cimetière de Saint Ouen, lorsque les Anglois contraignirent la Pucelle de se retracter, sous peine d’estre brusiée toute vive.

    Il est infiniment regrettable que Richer n’ait pas transcrit ce sermon, qui, lui non plus, n’a pas été retrouvé. (Histoire de la Pucelle, éd. Dunand, I, p. 40). Il n’a pas davantage copié les dépositions des sept témoins reçues les 4 et 5 mars ; et ne nous dit pas s’il les lisait dans un instrument original, ni si celui-ci se poursuivait au delà de ce que nous connaissons.

  8. [8]

    Massieu et Manchon attestent que Jeanne protesta contre les injures faites au roi de France à Saint-Ouen le 24 mai.

  9. [9]

    Quicherat, nous l’avons dit, copiait le texte de L’Averdy, qui en transcrivant le ms. de Soubise, avait omis ce paragraphe. Mais, si Quicherat avait lu le ms. de Paulmy, conservé à l’Arsenal, il l’y aurait lue. Ce paragraphe inédit se retrouve dans tous les mss. qui dérivent de celui de Diane de Poitiers, et indirectement du texte de la Relation sommaire que nous publions. Le ms. de Bologne, lui aussi, l’a transcrite exactement.

  10. [10]

    Jean Monnet, servitor de Beaupère, déposa, en effet, le 3 avril 1456, que, lui aussi, quitta Rouen avec son maître, le lundi ou le dimanche précédant le supplice (Q, III, 65).

  11. [11]

    Voir Ch., I, 279, 347, 350, 385, 386.

  12. [12]

    Quicherat, II, 348.

  13. [13]

    Quicherat, II, 8-21. Cp. V, 420

  14. [14]

    Voir notre édition de l’Instrument des sentences, p. 16-20.

  15. [15]

    Il est notable que toutes ces mauvaises copies ont été faites, pour des personnages de haute qualité, depuis Diane de Poitiers, le cardinal d’Armagnac, le cardinal de Soubise, le pape Benoît XIV, jusqu’au marquis de Paulmy. Quant à notre ms. latin, le beau parchemin, l’écriture, la place laissée pour de grandes miniatures, montrent qu’il était destiné à un riche bibliophile.

  16. [16]

    Cette dernière inconnue de Quicherat dans son texte original, qui se trouve cependant dans le ms. B. N. lat. 13837 (fol. 38-40 v.), et dans notre ms. de la Relation, fol. 55-58 v. Voir Quicherat, V, 431 et 215.

  17. [17]

    La comparaison du ms. RS avec celui de D montre qu’ils dépendent tous d’un document antérieur, que copie RS et que traduit D sans avoir aucune relation avec RS.

  18. [18]

    Sous des formes d’ailleurs différentes. On en pourra faire la comparaison en recourant à Quicherat (Procès, II, 297, 302, 307, 329, 339, 348, 367, pour 1452 ; et III, 133, 150, 165, pour 1456).

  19. [19]

    Il en sera autrement pour les autres traités qui semblent avoir été rédigés par ordre ; tels celui d’Hélie de Bourdeilles, qui mentionne les lettres patentes expressives de la volonté royale ; et celui de Robert Ciboule, qui dit obéir aux ordres d’une irrefragabilis auctoritas.

  20. [20]

    Les mots regie celsitudini sont omis dans la rédaction du ms. 5970, que Quicherat estime retouchée pour ne plus attirer l’attention sur le rôle du roi en cette révision.

  21. [21]

    C’est du moins ce qu’affirme le Gallia Christiana, t. IX, 1035, qui rapporte que Bouillé développa le thème : Mementote mirabilium ejus quae fecit, prodigia oris ejus. (Ps. 104, 5.)

  22. [22]

    Il est intéressant de noter que dans les comptes du trésorier royal, Bouillé passe aussitôt après les évêques et l’inquisiteur, avant tout autre assesseur, et avant les notaires. (Voir Belon et Balme, Jean Bréhal, p. 164 et sq.).

  23. [23]

    On sait que sa personne était fort agréée par le roi, auprès duquel Souillé est souvent envoyé en ambassade par l’Université.

  24. [24]

    R. Pernoud ne doute pas qu’avant d’être chargé de l’enquête de 1450, Bouillé avait rédigé son Mémoire (Vie et Mort de Jeanne d’Arc, p. 21.)

  25. [25]

    Au tome II, publié en 1844, p. 1, note 1.

  26. [26]

    P. 4 et suiv.

  27. [27]

    Voir plus loin :

    per processum et informationes super vita et conversatione… factas (p. 7) [par l’enquête et les informations recueillies sur sa vie et sa conduite] ; ex depositione plurium testium fide dignorum… (p. 8) [d’après la déposition de plusieurs témoins dignes de foi] ; depositiones testium notabilium (p. 11) [les dépositions de témoins de marque].

  28. [28]

    Voir dans Q III, p. 33, 34, 81, 99, 104, 126, les dépositions faites en 1456 qui auraient pu être alléguées par Bouillé, si son Mémoire avait été rédigé après cette dernière enquête.

  29. [29]

    La conjecture du P. Ayroles, fort plausible, ne résout rien. Admettant que le Mémoire de Bouillé est le premier composé pour la Réhabilitation, probablement avant toute audition de témoins, Ayroles suppose que les courtes lignes, où il les invoque, ont été ajoutées par lui, lorsqu’en 1455, il présenta son rapport à la Commission apostolique. Ce qui n’est pas impossible. Mais les dossiers de 1450 et 1452 que nous possédons ne contiennent rien de ce que rapporte Bouillé. Resterait à supposer que Bouillé a connu des dossiers plus complets, qui ne nous sont pas parvenus. Ce que nous avons estimé très vraisemblable pour le dossier de 1450.

  30. [30]

    Quicherat observe que dans la rédaction insérée dans le ms. 5970, qu’il appelle définitive (III, 322, note et V, 467), on a fait disparaître l’hommage au roi, par ce qu’en 1455 le procès engagé par la commission apostolique affectait de ne parler que de la Réhabilitation de Jeanne. En effet : 1° ce n’est plus alors le roi, mais la famille Darc qui réclame la réparation d’honneur ; 2° ont disparu quelques mots se référant à l’honneur royal : ad exaltacionem regis Francie seu domus Francie que nunquam legitur hereticis favorem prebuisse aut quovismodo adhesisse [pour l’exaltation du roi de France ou de la maison de France, dont il n’est jamais rapporté qu’elle ait accordé sa faveur aux hérétiques ou leur ait apporté une quelconque adhésion] ; et plus loin : la dédicace regie celsitudini [à votre altesse royale]. Mais ces légères retouches ne doivent pas faire oublier que, dans le corps du Mémoire, l’allusion à l’honneur du roi est fréquemment répétée.

  31. [31]

    Lanéry avait cru devoir ajouter ici les mots ardua et difficilis. Ce qui ne se trouve dans aucun ms., et qui est un contre-sens. S’il fallait suppléer, ce serait par les mots : clara et facilis. Mais cela ne semble pas nécessaire, vu la suite.

  32. [32]

    Ce point est remarquable, car Bouillé est sans doute le seul à avoir pris ce soin.

  33. [33]

    Studendo [avec application], dit-il. Les manuscrits ajoutent : perfunctorie legendo [par une lecture hâtive]. Ce qui semble une mauvaise transcription ; car perfunctorie voudrait dire qu’il a lu négligemment, par manière d’acquit. Il est manifeste que c’est tout le contraire que Bouillé veut dire. Et le contraire de ce qu’il a fait. Il précise soigneusement les folios des deux manuscrits auxquels il se réfère.

  34. [34]

    Voir plus loin, p. 69. Quant au traité de Gélu, rédigé en mai 1429, Belon et Balme écrivent :

    On ne peut douter que les juges de la Réhabilitation n’aient connu cet écrit : maître Bouillé et Jean Bréhal l’avaient vraisemblablement reçu des mains mêmes du souverain, tandis qu’ils conféraient avec lui au sujet des préliminaires de la cause. — (Op. cit., p. 92.)

    En tous cas on n’en trouve pas trace dans le Mémoire.

    Par contre Thomas Basin dira avoir reçu de Bouillé son Mémoire. Et Pontanus en transcrira des passages entiers.

  35. [35]

    Voir plus haut, p. 11. R. Pernoud assure qu’on lui apporta, sous forme de lettres closes et scellées les résultats de l’enquête (p. 23). On aimerait en avoir la preuve.

  36. [36]

    C’est par un étrange hasard que le peu que nous connaissons de l’enquête nous soit transmis par le rédacteur anonyme du Sommaire des deux procès. (Voir notre édition de l’instrument des sentences, p. 15-19). On se rappelle que le Procès apostolique de 1456 ne souille mot des informations de 1450.

  37. [37]

    Voir : Paul Ourliac, La Pragmatique Sanction et la Légation en France du Cardinal d’Estouteville (1451-1453), dans Mélanges d’archéologie et d’histoire de l’École française de Rome, 55e année, 1938, p. 403-432.

  38. [38]

    Voir Q II, 291-296.

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